Sa démission en 1991, en direct à la télévision, a entraîné la disparition du bloc soviétique. Celui que Vladimir Poutine rêve précisément de reconstruire en 2022. Farouchement opposé à l'agression militaire de l'Ukraine, Mikhaïl Gorbatchev se disait pourtant favorable à l'annexion de la Crimée en 2014.
Mikhaïl Gorbatchev, dernier dirigeant de l'URSS, est mort mardi soir. Il avait 91 ans. Sérieusement atteint dans sa santé durant les dernières années de sa vie, l'homme de la perestroïka («reconstruction» en russe) a voué sa sueur politique à la révolution économique, sociale et éthique.
Mais derrière le Gorbatchev qui a littéralement changé la face du monde, il y a toujours eu le «Gorby» pop, smart et provoc. Celui qui a marqué tous les esprits. Une icône visuelle qui n'a pas hésité, par exemple, à donner de sa personne dans une pub pour Pizza Hut, histoire d'arrondir quelques fins de mois.
Mikhaïl Gorbatchev et Erich Honecker, lèvres collées. Honecker n'est ni plus ni moins que l'homme ayant fait pousser le mur de Berlin. Cette photo fera le tour du monde.
Le 6 octobre 1989, l'Allemagne de l'Est est envahie par des manifestations un poil tendues. C'est le quarantième anniversaire de la création de la dictature communiste. Le dernier. Et une fête qui va très vite tourner au vinaigre. Un mois plus tard, le mur se fissurait. Ce jour-là ni le président de l'URSS, ni le boss de la RDA n'aurait pu prédire l'événement. «C'était comme sur le Titanic», avouera ensuite un ancien fonctionnaire de l'Est.
Cette pelle à pleine bouche n'est pas tout à fait inédite. On appelle ça le baiser fraternel socialiste. Mais il deviendra très vite le «baiser de la mort», car la perestroïka de «Gorby» allait atomiser définitivement l'Allemagne communiste.
Il fallait oser. En 1997, huit ans après la chute du mur et six ans après sa démission, Gorbatchev apparaît dans une publicité qui sent bon l'impérialisme américain. Aujourd'hui, Pizza Hut a fermé ses succursales en Russie à cause de l'agression menée par Vladimir Poutine. Mais, il y a vingt-cinq ans, il fallait montrer tout l'appétit qu'avait cette fraîche Russie pour la gourmandise consumériste occidentale.
Le scénario est aussi simple qu'une... publicité. Au centre de Moscou, «Gorby» tient sa petite-fille par la main. Un parapluie protège les têtes. Après un coup d'oeil rapide sur la cathédrale du Christ-Sauveur, direction Pizza Hut. Une fois le duo installé à une table du fond, les commérages et les joutes idéologiques sautent comme des bouchons de champagne dans tout le restaurant.
Gorbatchev expliquera avoir accepté le rôle plutôt ironique et insolite pour... le fric. Un million de dollars de cachet qui tomberont instantanément dans la poche de sa fondation.
Plus chic et moins salissant. En 2007, il se dévoile cette fois sur son 31. Au casting, Catherine Deneuve, Andre Agassi, Steffi Graf et... Mikhaïl Gorbatchev. Contacté, l'acteur Sean Penn avait refusé sèchement.
Le tout, pour Louis Vuitton. Et par Annie Leibovitz. La célèbre photographe est dans tous les bons coups, puisqu'elle est notamment responsable des récents portraits controversés du couple Zelensky dans Vogue.
Aux côtés de l'ancien patron de l'URSS, posé sur la banquette arrière, le monogramme Keepall, un modèle des années 1930. Gorbatchev est charismatique, son air est grave. Alors que la locomotive à élégance de LVMH faisait la belle sur les cat-walk du monde entier, sous la direction du créateur Marc Jacobs, Louis Vuitton a voulu soudain rappeler ses origines de grand sellier français.
Mais draguer «Gorby» pour qu'il se glisse dans la peau d'une égérie le temps d'un shooting n'a pas été une promenade de santé. «La donation qui sera reversée à la Croix verte internationale, la fondation dont il est le créateur et président, a achevé de le décider», racontera Antoine Arnault, le fils de, alors directeur de la comm' chez Vuitton.
C'est le naevus flammeus le plus célèbre de la planète. Une tache de vin qu'il avait refusé de faire retoucher au moment des portraits officiels, en 1985, une fois secrétaire général du Parti communiste de l'Union soviétique. Depuis, il ne l'a jamais planqué sous la moindre couche de maquillage.
Si certains voyaient dans cette tache les frontières de la Thaïlande, celui qui a été désigné «homme de l'année» en 1987, puis «homme de la décennie» deux ans plus tard par le magazine Time, a fait l'objet d'une curiosité touristique inattendue.
Oui, un archipel sibérien isolé du reste du monde ressemble comme deux gouttes d'eau à l'angiome de «Gorby». Si bien qu'en 2011, cette grappe d'îles baptisée Durak Aprel a dû contenir un afflux de vacanciers d'un genre nouveau. On les appelait les «shapecations». Des voyageurs férus de destinations qui leur font penser à une forme célèbre, dénichées sur Google Earth.
L'ancien dirigeant de l'URSS avait fait sensation en France, en 2001, puisqu'il avait choisi le trublion en costard pour faire la promotion de son livre. Et, depuis, tout le monde a parlé de cet épisode de «Tout le monde en parle».
Une interview menée logiquement par Thierry Ardisson et baptisée (logiquement) Ardiview. Ce soir-là, «Gorby» était notamment entouré de François Bayrou et de... Titoff. L'humoriste d'un autre temps, moyennement passionné par la chute du bloc soviétique, avait décidé d'interrompre Gorbatchev pour lui soumettre un baiser à "la russe", sur son front. En bon diplomate, il avait accepté.
Voici un court extrait de l'interview: