Lancée le 5 janvier dans le canton de Neuchâtel, une pétition demande l'instauration d'un code de déontologie interdisant explicitement les rapports consentants entre élèves et enseignants. Cette pétition fait suite au licenciement d'un professeur du lycée Blaise-Cendrars de La Chaux-de-Fonds, qui avait entretenu des relations sexuelles avec trois de ses élèves de 2000 à 2020. Que pensent des gymnasiens romands de ces relations intimes? watson a pris le pouls aux gymnases (lycées) de la Cité et du Bugnon.
Vendredi 19 janvier, midi, malgré la bise glaciale qui souffle sur Lausanne, nous interceptons une dizaine d'élèves autour des gymnases de la Cité et du Bugnon. Le cas neuchâtelois, personne n'en a entendu parler, mais la question des relations sexuelles entre enseignants et élèves suscite chez eux de nombreuses réactions. «Franchement, je pense que le prof doit se retenir, en vrai, c'est pas ouf ce genre de chose», nous répond spontanément Gabriel, 17 ans, entouré de son groupe d'amis, il poursuit:
Sa camarade Sarah le reprend: «Si la personne est consentante et majeure, c'est bon, elle fait ce qu'elle veut.» Le groupe de cinq amis s'anime. A partir d'une question pouvant de prime abord sembler banale, on glisse peu à peu dans le débat d'opinions. Théophile, 17 ans, ajoute qu'il n'y a «rien d'illégal de coucher entre adultes consentants».
Légalité versus moralité, chacun argumente sur le bienfondé d'une relation amoureuse prof-élève. Théophile ajoute que l'enjeu réside dans la légalité de la relation, sa réponse fait réagir son amie Sarah qui évoque le cas d'un enseignant d'un gymnase lausannois qui aurait entretenu une relation intime avec une de ses étudiantes:
En évoquant cette histoire, nous l'interrogeons sur les répercussions que peut avoir ce type de relation, le groupe s'accorde à dire que «ça poursuit l'enseignant durant des années et encore aujourd'hui».
Nous laissons le groupe d'amis débattre sur le sujet lorsque nous croisons Tania et Roberto sur le pont Bessière. L'opinion de la jeune femme est sans appel:
La question du rôle de l'enseignant et de l'ascendant que celui-ci peut avoir dans leur relation est soulevée plusieurs fois, surtout par les jeunes femmes que nous avons interrogées.
Son ami Maxime acquiesce, mais selon lui, le problème principal vient d'un possible favoritisme dans le cas où la relation de couple se forme au sein de la même classe. «Si le prof est amené à noter l'élève, ça peut poser de gros problèmes.» Tous les étudiants interrogés semblent s'accorder sur des circonstances ou comportements qu'ils qualifient d'«aggravants»: le couple prof-élève dans la même classe, le favoritisme, l'abus de pouvoir. La situation pouvant se retourner contre l'élève:
Avant de laisser nos gymnasiens à leur pause de midi, on leur demande s'ils ont eu vent de cas similaires au sein de leur établissement, Maxime réagit aussitôt: «Pas ici, mais dans un autre gymnase de Lausanne, tout le monde le sait.»