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Commentaire: le Giro est plus beau que le Tour de France

Au Giro, il faut souffrir pour voir la vie en rose.
Au Giro, il faut souffrir pour voir la vie en rose.image: Keystone
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Le Giro est plus beau que le Tour de France

La quête du maillot rose est peut-être la plus belle de l'année, plus captivante que celle du maillot jaune. Place à la bagarre, programmée le samedi 6 mai pour trois semaines.
06.05.2023, 08:0006.05.2023, 11:14
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La culture populaire cantonne souvent le cyclisme au Tour de France, obnubilée par le tricot jaune, par les records de Merckx, Anquetil, Hinault, le scandale Festina et le spectre de Lance Armstrong. Le chaud mois de juillet rime avec Grande Boucle et les foules de spectateurs massées sur les bords des routes. Concernant le mois de mai, c'est une déclaration d'amour au vélo grâce aux premiers coups de pédales du Tour d'Italie. Là, il est souvent question de cols infinis, d'étapes dantesques, de murs de neige laissant planer la froide sensation d'une défaillance.

Le Giro a cette identité, ces lieux historiques tels que le Monte Zoncolan, le Mortirolo, le Stelvio, le Col de Finestre ou la beauté d'un lieu comme les Tre Cime di Lavaredo – et en toile de fond l'immense exploit d'Eddy Merckx, il y a 55 ans. La course au maillot rose a cette poésie, cette prose, cette sensation que rien n'est acquis, qu'aucune équipe n'arrive réellement à maîtriser une course qui peut basculer dans chacune des étapes. Ils sont légion, ces leaders qui sont passés par la fenêtre, et d'autres qui se sont révélés sur ces trois semaines. L'exemple de José Rujano illustre ces apparitions furtives, véritable comète vénézuélienne du peloton avant de sombrer dans l'anonymat.

Sur le Tour de France, victime peut-être de son importance, de son engouement populaire, la course reste cadenassée. Le Giro lui, reste ouvert et laisse place à des entreprises de grande ampleur. Des retournements de situation, menés par Carapaz en 2019, par exemple, ou cette chute de Kruijswijk laissant filer le sacre en percutant de plein fouet un mur de neige. Mythique pour les suiveurs et dramatique pour le Hollandais.

Ces scènes inouïes sont innombrables dans la Botte, où le sport n'est jamais aussi beau et nourrit le mythe transalpin. On se remémore encore le duel entre Gilberto Simoni et Damiano Cunego, en 2004, auteurs d'une partie de manivelle légendaire, où même les noms d'oiseaux ont plu dans la presse. L'aîné des deux avait craqué en lançant «Tu es un bâtard, tu es vraiment stupide» à son jeune équipier.

La souffrance comme valeur cardinale

Les émotions parlent et la souffrance (physique et mentale) aussi. Une dimension qui plaît aux Italiens, aux tifosi qui vibrent à travers la douleur extrême des cinglés du dérailleur. C'est ainsi que l'événement cycliste transalpin forge sa légende, restant respectueux de son grand frère français, mais s'appliquant à innover et proposant des parcours terribles.

L'identité du Giro reste unique, forte, elle se devine entre nostalgie et passion dévorante qui imprègnent les amoureux de la petite reine à travers des coureurs qui s'infligent un pèlerinage harassant, allant des routes volcaniques de l'Etna à l'altitude suffocante du Stelvio. A coups de photographies du passé, on ne peut s'empêcher de repenser à ces images de Bernal, saignant dans la montée du Passo Giau, encouragé par des furieux équipés de tronçonneuses.

Le maillot rose n'est peut-être pas le plus difficile à aller chercher, mais le plus difficile à garder. Puisque le Giro se classe dans une catégorie à part avec ses conditions météorologiques parfois limites. Une course reconnue comme la plus difficile pour bien des cyclistes professionnels. Ces téméraires de la selle sont lancés dans une quête à la résonance spirituelle, voire symbolique, se refusant à entendre leurs cuisses hurler à la mort.

Taire la douleur pour entrer dans l'histoire, puisqu'il n'est plus tout à fait question d'un spectacle, mais créer des émotions, expliquait Michele Acquarone, l'ancien directeur du Giro. C'est une épreuve qui se court avec les émotions et les tripes, pas pour la gloire de parader sur les Champs Elysées. C'est pourquoi les défaillances sont plus marquantes, comme celle de Thibaut Pinot, fiévreux et lessivé par une étape ahurissante la veille, en 2018, le jour où Chris Froome avait déclassé la concurrence dans la Cima Coppi. Les graviers et la boue, non loin des névés pour décor d'une étape qui verra Simon Yates, leader du général, perdre tout espoir lors de cette... 19e étape. Brutal et épique, comme ce que le Tour d'Italie propose depuis des années.

Du mythique au tragique

C'est un tout, une tragédie digne de la Comedia dell'arte, où le péril imminent guette à force d'en vouloir trop et de se faire emporter par la folie coursière; la chute fatale de Wouter Weylandt, en 2011, rappelle qu'il ne faut pas tenter le diable sur le vélo.

«Le Tour de France est la plus grande course du monde, le Giro est la plus belle»
Angelo Zomegnan, ancien et mythique organisateur

Plus que le Tour, le Giro a la dimension d'un péplum. Une grande arène de gladiateurs où 176 coureurs vont devoir sauver leur peau, jouer un rôle ou endosser celui de figurant. Néanmoins, les acteurs seront assurément braves pour clore le chapitre 2023 de l'édition italienne, à Rome, où un seul cycliste portera le rose pour l'éternité. Il est beau le Giro, il fait rêver les nostalgiques et les puristes; il est si beau qu'il surpasse le Tour de France.

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