Comment cette photo a bouleversé les codes du sport féminin
«Humiliée par la quantité de messages que j'ai reçus d'hommes et de femmes.» Les mots d'Emma Pallant-Browne sur Instagram sont forts. Les nombreuses réactions que la triathlète britannique a reçues font suite à une photo d'elle en pleine compétition, prise le 6 mai à Ibiza.
En zoomant, on aperçoit une tache de sang sur sa combinaison, à hauteur de la vulve. Oui, la jeune femme (34 ans) a eu ses règles pendant la course, et elle n'a pas cherché à les cacher. De quoi apparemment en déranger plus d'un(e).
La photo en question
Alors, dans son long message Instagram posté le 24 mai et accompagnant la fameuse photo qu'elle a repartagée, Emma Pallant-Browne a souhaité réagir pour briser ce qui reste, encore aujourd'hui, l'un des grands tabous du sport.
Fort soutient et phénomène biologique normal
L'actuel septième au classement mondial du triathlon explique aussi pourquoi elle a choisi de courir en maillot de bain clair, un vêtement qui camoufle pourtant moins les taches de sang qu'une combinaison foncée, par exemple:
La Britannique a reçu beaucoup de messages de soutien suite à sa publication. «J'aime avoir mes règles car elles représentent ce dont nous sommes capables en tant que femmes. Et c'est un signe que nos corps sont forts et fonctionnent pleinement!», a par exemple commenté sa consoeur américaine Skye Moench.
La Suissesse Magali Di Marco, médaillée de bronze aux JO de Sydney 2000 en triathlon, a aussi sorti son clavier pour féliciter Emma Pallant-Browne sur Facebook:
Jointe par watson, Magali Di Marco s'avoue «impressionnée par ces jeunes femmes qui parlent si ouvertement de ce sujet». La Valaisanne d'adoption, 51 ans, raconte que la parole était nettement moins libérée il y a encore une dizaine d'années.
Difficultés matérielles
et hypocrisie
La médaillée de bronze de Sydney explique également que même si une triathlète souhaitait cacher ses menstruations pendant la course (où les participantes, pour rappel, enchaînent de la natation, du cyclisme et de la course à pied), la démarche serait difficile: «Les protections hygiéniques ne tiennent pas forcément si le flux sanguin est important, et elles peuvent être très désagréables.»
Pour conclure, Magali Di Marco pointe du doigt une forme d'hypocrisie des personnes qui s'offusquent de voir des menstruations pendant la course.
Et comme le rappelle l'ex-championne, «on ne sent généralement pas la rose après une course». Oui, les odeurs, la transpiration ou le sang (voire d'autres fluides: demandez à Fabien Barthez, surpris une fois en train de soulager sa vessie en plein match de foot!) sont partie intégrante du sport, de compétition ou non. Le message d'Emma Pallant-Browne pourra sûrement permettre de décomplexer de nombreuses jeunes femmes, mais pas que.
Et pour ceux qui resteraient choqués en voyant des menstruations, ils pourront toujours aller voir du combiné nordique (ski de fond et saut à ski), seule discipline uniquement masculine lors des derniers JO 2022 à Pékin.
