Gregg Popovich aurait deux bonnes raisons de venir en Valais. La première: sa passion du vin. En fin connaisseur, il possède une cave étoffée et est co-propriétaire d'un vignoble dans l'Oregon. La seconde? Prouver à Christian Constantin, président du FC Sion, que miser sur un entraîneur à long terme porte ses fruits.
C'est peu dire que la longévité, «Coach Pop» connaît. Il est sur le banc des Spurs de San Antonio depuis... 1996. Soit 27 ans. Une éternité dans le sport professionnel! Et ce dinosaure de la NBA, 74 printemps, n'est pas près de s'arrêter: il vient de signer un nouveau contrat de cinq ans.
Gregg Popovich Signs Five-Year Contract pic.twitter.com/GiH9dgev6k
— San Antonio Spurs (@spurs) July 8, 2023
Même si les Texans ne se sont plus qualifiés pour les play-offs depuis 2019, leurs résultats parlent en faveur de Popovich. Avec lui, ils ont remporté cinq titres (1999, 2003, 2005, 2007 et 2014). C'est simple: le technicien a le troisième plus beau palmarès de NBA derrière Phil Jackson (onze sacres) et Red Auerbach (neuf). En mai 2022, il est devenu le coach avec le plus de victoires en saison régulière (il en est actuellement à 1364). A la tête des Etats-Unis, Gregg Popovich a aussi fêté une médaille d'or olympique aux derniers JO de Tokyo en 2021.
Forcément, le légendaire entraîneur doit ses succès à une immense connaissance du basket – il a embrassé la fonction dès 1973, à seulement 24 ans – et un sens tactique aiguisé. San Antonio est notamment réputé pour son jeu très collectif. Mais ce sont surtout ses compétences humaines et son don pour la communication qui lui ont offert cette carrière extraordinaire.
Car «Coach Pop» n'est pas comme les autres. Un exemple? La séance vidéo le lendemain d'une défaite à Oklahoma City en 2018. Le journaliste et écrivain Daniel Coyle raconte ce moment dans un article pour Time:
Drôle de débriefing de match qu'un film sur la lutte des Afro-Américains pour leurs droits. Mais l'activité n'a rien d'un moment de détente. Si Popovich l'impose, c'est qu'il est convaincu que ses protégés deviennent de meilleurs basketteurs en grandissant comme êtres humains.
Réfléchir, avoir des valeurs et un comportement en adéquation avec celles-ci, partager le sens du collectif: autant de qualités indispensables au succès sportif dont le coach des Spurs n'hésite pas à aller chercher des exemples très loin des parquets. «Avant les entraînements, il te sort tout le temps des anecdotes sur ce qu'il se passe dans le monde. Vous pouvez être sûr qu'en ce moment, il leur parle de l'Ukraine... Ce n'est pas un hasard si on lui demande souvent son avis sur des questions politiques ou sociétales», témoignait l'ancien joueur de San Antonio Boris Diaw dans L'Equipe, en mai 2022.
En plus de faire travailler la matière grise de ses joueurs, Gregg Popovich est un rassembleur hors pair. Né dans l'Indiana en 1949 de parents d'origine monténégrine, le technicien est réputé aussi exigeant que bienveillant avec ses protégés. Un paternalisme à l'ancienne. Daniel Coyle, encore, décrit les interactions du coach avec ses joueurs à l'entraînement:
«Coach Pop» profite aussi des longs voyages à travers tout le pays pour cimenter son groupe. Il organise lui-même les soupers d'après-match, partagés par l'équipe entière. A la fin de la saison, il a pour habitude d'offrir un livre souvenir à tous les membres de son staff. Son contenu? Les menus et les vins servis dans chaque établissement où les Spurs sont allés manger.
Sean Marks, un ex-adjoint à San Antonio, donne un autre exemple des compétences relationnelles du septuagénaire. «Vous serez assis dans l'avion, et tout à coup, un magazine atterrira sur vos genoux. Vous lèverez les yeux et c'est Pop», se souvient-il.
Las pour les vignerons valaisans, Gregg Popovich n'a engagé aucun basketteur du Vieux-Pays pour la prochaine saison. Avec l'arrivée du jeune prodige français Victor Wembanyama dans son équipe, le légendaire entraîneur aura peut-être la chance de remplir sa cave avec quelques bouteilles de Bourgogne ou Bordeaux.