De nombreux experts voient en Carlos Alcaraz la nouvelle pépite du tennis. Le futur numéro un mondial. Voire même celui qui pourra aller titiller les records des trois monstres que sont Nadal (21 titres du Grand Chelem), Federer et Djokovic (tous deux 20).
Le dénouement de la finale du tournoi de Madrid, dimanche, a de quoi renforcer leur intuition. L'Espagnol a s'est adjugé le prestigieux Masters 1000, en écrasant en finale Alexander Zverev (6-3 6-1). Sur l'ocre madrilène, il s'est même offert le luxe de battre Rafael Nadal et Novak Djokovic dans un même tournoi. Une première mondiale sur cette surface! Il y a trois mois à Rio, Alcaraz devenait aussi le plus jeune joueur de l'Histoire (ou de l'ère Open, si on veut chipoter) à être sacré dans un tournoi ATP 500. Des lignes de plus à ajouter aux records de précocité du prodige ibère.
Grâce à ce succès brésilien, Alcaraz – passé de la 9e à la 6e place ATP, ce lundi – avait grimpé au 20e rang mondial. Parmi tous les joueurs pros en activité, il est celui qui a atteint le top 20 le plus rapidement. Le précédent record datait de 2004 et appartenait à un certain Rafael Nadal.
Même nationalité, même t-shirt sans manches, même marque de raquette et donc même talent juvénile: la comparaison avec son illustre aîné est plus que tentante. Mais que vous le sachiez d'entrée, Carlos Alcaraz ne l'aime pas. «Je ne veux pas que les gens me connaissent comme un mini-Nadal ou un deuxième Nadal. Je veux juste être Carlos Alcaraz», clamait-il dans le New York Times en novembre dernier. Et même si la pépite de Murcie compte, évidemment, le trédécuple vainqueur de Roland-Garros dans ses idoles, c'est bien Roger Federer qu'il avait en poster dans sa chambre.
🎾 Today, we feature 16-year-old @alcarazcarlos03, who's being dubbed "The Future of Tennis" & "The Next Nadal" 🤩
— IMG Replay (@IMGReplay) September 25, 2020
⏪ Throwback to his best shots in his first @atptour win, where he became the first player born in 2003 to win an #ATP match! 🤯#ATPTour #archive #storytelling pic.twitter.com/f1cUsjOhht
A voir son jeu, le teenager ne s'est pas contenté de fixer avec adoration l'image figée du Bâlois. Il l'a aussi vu en action et s'en est grandement inspiré. «Il est difficile de comparer qui que ce soit à Roger Federer, bien sûr, mais le jeu de Carlos s’en rapproche. Il peut jouer sur n’importe quelle surface et peut jouer dans n’importe quel style», analysait dans une interview à l'ATP son entraîneur et ancien numéro un mondial, Juan Carlos Ferrero.
Comme Federer à ses débuts, Alcaraz se montre très à l'aise sur toutes les surfaces, avec un jeu agressif et porté sur l'offensive. L'Ibère a gagné quatre de ses cinq titres ATP (Umag en 2021; Rio, Barcelone et Madrid en 2022 ) sur l'ocre, mais il n'est pas pour autant un crocodile de terre battue, contrairement à pas mal de ses compatriotes. «Il a beaucoup de personnalité et cela l'amène à développer un tennis agressif, avec beaucoup de vitesse, notamment sur son coup droit», complétait son coach dans le Huffington Post.
Stefanos Titsipas a eu la malchance de le constater l'automne dernier. Le Grec, lui aussi promis à un avenir des plus brillants, a été la première victime de choix d'Alcaraz. «Je n'ai jamais vu quelqu'un frapper la balle aussi fort», s'étonnait l'Hellène après sa défaite au 3e tour de l'US Open.
That. Was. Wild.
— US Open Tennis (@usopen) September 3, 2021
The final two points of an incredible match between Alcaraz and Tsitsipas. pic.twitter.com/HExTR6qH1o
Le Murcien s'était fait connaître du grand public grâce à cette victoire. Sur le dur américain, il était aussi devenu le plus jeune tennisman à atteindre un quart de finale du Grand Chelem depuis Michael Chang, à Roland-Garros en... 1990.
Cette épopée aux States a aussi permis de jauger le mental du rookie. En un mot? Fort. Comme ses parpaings du fond du terrain. «Les meilleurs joueurs ont du caractère, beaucoup de caractère. Etre à l'US Open et jouer contre Tsitsipas dans le plus grand stade du monde, si vous n'avez pas de caractère, vous rétrécissez. Carlos est tout le contraire. Il semble devenir plus grand, et c'est pour moi un très bon signe», se réjouissait Juan Carlos Ferrero.
Carlos Alcaraz is wayyyy too hot 🥵
— We Are Tennis (@WeAreTennis) November 11, 2021
(🎥 @TennisTV) pic.twitter.com/Rs5yVUvWiz
Autrement dit, plus la tâche est dure, plus Alcaraz semble à l'aise. Et forcément, quand on veut gagner des finales de Grand Chelem, cette capacité à se sublimer sous la pression est déterminante. Le jeune Espagnol a conscience de posséder cet avantage:
Oui, Carlos Alcaraz a confiance en lui. Une autre preuve? «Ce titre me donne beaucoup de confiance dans ce que je fais, car je considère que je suis sur la bonne voie pour être n°1 mondial», s'avançait après son sacre à Rio celui qui était encore 120e mondial en mai dernier.
Avant de s'asseoir sur le trône, il visait une place dans le top 15 avant la fin de l'année et un ambitieux ticket pour le Masters. Le premier objectif est déjà atteint.
Pour réaliser tous ses rêves, ce fan du Real Madrid devra encore beaucoup travailler, bien sûr. Comme il l'a déjà fait ces derniers mois – physiquement, notamment. Il aura aussi besoin de chance, en évitant les blessures. Mais surtout, le prodige devra garder son immense motivation. Federer, Nadal et Djokovic l'ont prouvé: on ne réalise pas tout ce qu'ils ont fait sans passion et abnégation.
Comme les trois meilleurs joueurs de l'Histoire, Carlos Alcaraz a le tennis dans le sang depuis petit. Son père a fait partie des 40 meilleurs joueurs d'Espagne. Mais faute d'argent, il a dû stopper sa carrière à 20 ans et est devenu entraîneur. Un problème que n'a pas rencontré son fils, soutenu par un mécène, ami de la famille, depuis plusieurs années.
L'actuel 6e mondial a touché sa première raquette à 3 ans, seulement. A cet âge, il passait déjà des heures à taper contre le mur du club familial à El Palmar. «Il n'y avait aucun moyen de l'éloigner de là», rembobinait son père dans le New York Times. Une infrastructure qu'avait construite le grand-père de Carlos, en transformant cet ancien club de chasse en terrains de tennis.
Aujourd'hui, en plus du gibier, ce sont les amoureux de ce sport qui remercient le chef de la famille Alcaraz d'avoir préféré la raquette au fusil.