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Agriculture

Une pénurie de pommes de terre suisses? Ce paysan s'inquiète

Les paysans s'inquiètent des nouvelles lois concernant les pesticides. (KEYSTONE/Georgios Kefalas)
Pour les paysans, la production de denrées alimentaires végétales en Suisse sera menacée à long terme. Image: KEYSTONE

Une pénurie de pommes de terre suisses? Ce paysan s'inquiète

Les produits phytosanitaires dangereux pour l'homme et l'environnement sont interdits en Suisse. Cela pose de nombreux défis aux agriculteurs. Alors que l'Union des agriculteurs critique l'excès de zèle de la politique, le WWF plaide pour une protection globale des plantes.
09.07.2023, 11:4109.07.2023, 12:19
Chiara Stäheli / ch media
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Il ne veut pas peindre le diable sur la muraille, mais David Brugger l'assure: si les choses continuent ainsi, la production de denrées alimentaires végétales en Suisse sera menacée à long terme. La raison? La disparition progressive des produits phytosanitaires, selon David Brugger, qui dirige le secteur Production végétale de l'Union suisse des paysans:

«Ces dernières années, plus de 200 substances actives ont été interdites. Cela entraîne des problèmes massifs pour diverses cultures»

Pour situer le contexte: en 2022, 334 substances actives étaient encore autorisées.

Pour certaines variétés, «il n'y a plus un seul produit phytosanitaire qui soit fiable». Conséquence: des pertes de récolte, un surcroît de travail et «une baisse massive de la qualité». David Brugger cite l'exemple des pommes de terre. Les dégâts causés par le taupin donnent du fil à retordre à de nombreux agriculteurs et agricultrices. Il suffit que sept tubercules sur cent soient atteints pour que les magasins refusent de les accepter. Il y a quelques années encore, il était possible d'utiliser un insecticide contre le taupin. Mais son autorisation a été retirée.

Ce n'est pas l'unique exemple, selon David Brugger. Pour de nombreuses autres cultures, il n'existe plus qu'un seul groupe de substances actives. Problème: cela favorise l'apparition de résistances. En effet, la protection chimique des plantes ne fonctionne à long terme que grâce au changement régulier de groupes de substances actives.

«Si l'on n'utilise qu'une seule substance active, ce n'est qu'une question de temps jusqu'à ce que les ravageurs développent une résistance généralisée»

C'est ce à quoi il faut s'attendre, par exemple, pour le colza, les betteraves sucrières ou les légumes, selon le spécialiste.

La protection des plantes peut aussi se faire sans pesticides

Selon le WWF, cette argumentation ne va pas assez loin. L'organisation de protection de l'environnement rappelle que la protection des plantes ne se limite pas aux produits phytosanitaires:

«La protection des plantes est un système global. Celui-ci comprend le choix des cultures, la rotation des cultures, la biodiversité dans les terres arables, le choix des variétés, les cultures mixtes et d'autres conditions agronomiques générales.»

Les produits phytosanitaires ne sont que «le sommet de la pyramide». C'est d'ailleurs ce qui est stipulé dans l'ordonnance sur les paiements directs: avant d'utiliser des produits phytosanitaires chimiques, il convient de recourir à des stratégies de lutte biologique et mécanique.

De plus, selon le WWF, les pesticides ne sont pas interdits sur un coup de tête: «Les pesticides ne sont interdits que lorsqu'ils nuisent à la santé humaine ou à l'environnement dans une mesure telle que le risque est inacceptable». La Suisse reprend ainsi les interdictions de l'UE, mais pas les autorisations.

Selon les estimations, environ un million de personnes consomment de l'eau potable contenant des résidus trop importants.

«Nous avons donc un gros problème à résoudre»
WWF

Il est donc capital de «mettre en œuvre les directives politiques et de ne pas les affaiblir», écrit le WWF.

David Brugger est d'un tout autre avis. L'Union des paysans ne s'oppose pas fondamentalement à une réduction de l'utilisation des pesticides, mais il assure que le Parlement et les autorités ont «dépassé les bornes» en matière de protection des plantes. Et cela semble ne jamais s'arrêter: «les politiciens exigent toujours plus - avant même que ce qui a déjà été décidé ne soit entièrement mis en œuvre».

Le responsable de l'Union suisse des paysans demande donc une pause:

«Ce qu'il faut maintenant, c'est une pesée des intérêts et une mise en œuvre pragmatique des directives politiques. Sinon, les agriculteurs arrêteront la production végétale et nous devrons par conséquent importer nettement plus de denrées alimentaires produites avec des produits et des méthodes interdits chez nous.»

Il apparaît d'ores et déjà que le taux d'autosuffisance en matière de denrées alimentaires végétales a atteint un creux en 2022, avec 33%. Cette évolution est diamétralement opposée au développement de la production végétale attendu par la société et la politique.

Les admissions d'urgence deviennent la règle

Le sujet préoccupe également les autorités: interrogé à ce sujet, l'Office fédéral de l'agriculture constate qu'en raison du retrait d'un «grand nombre d'autorisations de produits», il y a moins de possibilités de protéger efficacement les cultures. Il confirme les déclarations de David Brugger selon lesquelles, dans certains cas, «il n'y a plus de produits suffisamment efficaces».

Ce phénomène augmente la pression sur ce que l'on appelle les autorisations d'urgence, qui sont accordées dans des cas exceptionnels. L'Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) peut accorder de telles autorisations limitées dans le temps pour des produits phytosanitaires «si une telle mesure s'avère nécessaire face à un danger pour la santé des plantes qui ne peut être évité d'une autre manière». C'est-à-dire lorsqu'il n'existe pas de produits phytosanitaires autorisés capables de lutter efficacement contre un ravageur donné.

Pour les pommes de terre, cet instrument a été utilisé pas moins de quatre fois au cours des quatre dernières années: pour lutter contre les taupins, l'OFAG a de nouveau accordé cette année une autorisation d'urgence pour l'insecticide biologique Attracap. Toutes cultures confondues, le nombre d'autorisations d'urgence a augmenté ces dernières années, comme le confirme l'OFAG. La raison en est le durcissement des critères pour les autorisations régulières. Tout le monde s'accorde à dire que cela n'est pas une solution durable.

(Traduit et adapté par Chiara Lecca)

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