Daniel Steinmann exprime une profonde colère, perceptible même au bout du fil. Il dénonce une inégalité de traitement, soulignant les projets controversés de la Confédération. En effet, cette dernière prévoit de cesser de verser des subventions pour l'élevage des chevaux de sport dès 2026, ce qui suscite la consternation du président de la Fédération d'élevage du cheval de sport CH (FECH).
Parmi les multiples subventions allouées par la Confédération, celle destinée à l'élevage des chevaux de sport ne représente qu'une infime partie. Globalement, le gouvernement verse près de 47,6 milliards de francs d'aides financières et d'indemnités, incluant notamment les contributions à l'AVS, les fonds pour l'infrastructure ferroviaire, ainsi que les paiements directs à l'agriculture.
Avec la situation financière délicate actuelle, ces fonds sont soumis à une forte pression. Cependant, la suppression de ces subventions est rarement une démarche aisée: les parties concernées réagissent vivement, mettant en garde contre les répercussions. Cette situation est illustrée de manière poignante par le débat autour des aides pour les chevaux de sport.
La Fédération FECH préfère utiliser le terme «chevaux de sang», car seulement une minorité parvient à atteindre le niveau compétitif dans le sport équestre. Daniel Steinmann souligne que l'élevage de chevaux de sang possède une tradition ancestrale en Suisse, mais qu'elle est actuellement en péril. Selon lui, si les contributions à cet élevage sont supprimées, un pan entier de notre patrimoine culturel risque de disparaître.
L'affaire a débuté par un rapport du Contrôle fédéral des finances. Celui-ci a examiné en 2018 différentes subventions accordées par l'Office fédéral de l'agriculture à des organisations externes et a recommandé de supprimer les contributions «qui ne contribuent pas à la sécurité alimentaire durable (p. ex. chevaux de sport)», comme l'indique le rapport.
Un an plus tard, l'Office fédéral a informé la FECH qu'aucun financement supplémentaire ne serait alloué à l'élevage des chevaux de sport à l'avenir. Selon des rapports récents du Schweizer Bauer et du Bauernzeitung, ces subventions devraient être supprimées à partir de 2026. Il est à noter que la contribution fédérale pour le maintien de la race suisse des Franches-Montagnes ne sera pas affectée par cette décision.
Pour la Fédération FECH, la situation est critique. Jusqu'à présent, elle bénéficie d'environ 240 000 francs de subventions annuelles pour l'élevage, ce qui constitue 36% de ses revenus totaux. Selon la directrice Anja Lüth, une suppression des subventions obligerait la FECH à «procéder à des coupes drastiques». La fusion de la fédération est probablement inévitable, avec pour conséquence une baisse de la qualité, explique-t-elle.
Augmenter les cotisations des membres ou les taxes ne semble pas être une option viable, surtout étant donné que nous sommes déjà désavantagés par rapport aux organisations d'élevage étrangères. Lüth reconnaît que les autorités publiques doivent réaliser des économies. Elle admet que, contrairement à d'autres secteurs, l'élevage des chevaux de sang ne contribue pas directement à la sécurité alimentaire.
Cependant, elle souligne que pour deux tiers des éleveurs, qui sont également agriculteurs, l'élevage constitue un pilier fondamental. Lüth et Steinmann expriment leur frustration face à l'augmentation prévue des subventions pour les alpagas et les lamas, soulignant que l'argument de la sécurité alimentaire semble ne pas s'appliquer dans ce cas.
Malgré l'intervention de l'association auprès de l'Office fédéral de l'agriculture (Ofag) pour s'opposer à la suppression envisagée des subventions, leurs efforts ont été vains. L'autorité prévoit de proposer cette modification lors de la révision complète de l'ordonnance sur l'élevage au début de l'année 2025, comme l'a confirmé un porte-parole en réponse à une demande.
L'Ofag rejette toute comparaison avec les alpagas et les lamas, soulignant que ces derniers ne partagent pas la même orientation clairement axée sur le sport et les loisirs, contrairement aux chevaux de sport. Une porte-parole de l'office souligne que la viande de ces animaux est consommée, et qu'ils contribuent au maintien des prairies ouvertes, jouant ainsi un rôle crucial dans le système alimentaire suisse.
Cependant, la suppression d'une subvention est rarement une démarche facile et rencontre souvent une forte résistance. Les défenseurs de l'élevage équin disposent de solides réseaux au sein de la Berne fédérale, notamment à travers le groupe parlementaire Cheval, dont l'ancien membre était le conseiller fédéral actuel, Albert Rösti. La présidence de ce groupe est assurée par le conseiller aux Etats libéral-radical, Damian Müller, qui occupe également la présidence de l'association faîtière des sports équestres, Swiss Equestrian.
Le cheval fait partie de l'agriculture, souligne Müller, qui craint que les franches-montagnes soit également touché dans un proche avenir.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)