L’avion, les riches, Davos. Cherchez l’intrus! Pour Les Verts, il n’y en a pas. A leurs yeux, les trois forment un combo nuisible à la planète. Deux têtes d’affiche écologistes en ont remis une couche, ce week-end, chacune à sa façon, sur ce triptyque maléfique. C’est au moment où le Forum de Davos est dans la panade avec son «président à vie» Klaus Schwab massé gratis, que la présidente des Verts, Lisa Mazzone, dans une interview au SonntagsBlick, sort l’attirail populiste en qualifiant le WEF (World Economic Forum) de «rencontre antidémocratique des super-riches, où l'on célèbre les Trump, Bolsonaro et Milei de ce monde».
Pour bien faire, Lisa Mazzone assortit son coup de gueule d’une proposition sentant la com à plein nez: un «Bürgenstock du multilatéralisme», rapport aux coups de couteau de Donald Trump dans les agences de l’ONU, dont la Genève internationale est le pivot. La Genevoise Lisa Mazzone demande la fin des subventions de la Confédération au WEF, 2,55 millions de francs par édition, au profit du multilatéralisme vertueux, Davos étant un multilatéralisme perverti, comprend-on. Avec les Verts, on n’est jamais en retard d’une leçon de morale.
Pour la petite histoire, on rappellera que le sommet du Bürgenstock de juin 2024 consacré à la guerre en Ukraine fut un échec retentissant. On parla davantage de la literie de l’hôtel devant accueillir les grands de ce monde sur les hauteurs du lac des Quatre-Cantons, que des chances de paix, qu’on savait alors illusoires. Mais bon, un «Bürgenstock du multilatéralisme», à défaut de dépasser le stade de la «récup» d’un WEF en péril par une présidente cherchant à faire exister un parti en recul dans les urnes, ça sonne pas mal, en effet.
L’autre volet du moment «vert», ce sont les révélations de Blick, samedi, sur le voyage en famille dans un «5 étoiles» à Oman de la Verte Céline Vara, future conseillère d’Etat neuchâteloise. C’est bien son droit, à elle comme à d'autres, de s’offrir un séjour de détente avec les siens, au chaud, dans un bel endroit du monde.
Mais les Verts ne manquent pas une occasion de vilipender les «riches» et leurs voyages en avion, tenus parmi les grands coupables du réchauffement climatique. On se permettra de faire remarquer que la richesse est relative. Qu’est «riche» celui ou celle qui peut se permettre des loisirs inaccessibles aux plus modestes. Qu’il n’est pas nécessaire d’être millionnaire pour aller à Oman en avion en famille, qu’un bon, mieux, deux bons salaires suffisent.
Au-delà de la difficulté qu'auront les Verts, prêcheurs de la sobriété climatique, à plaider, comme Céline Vara, la «vie privée» pour justifier un voyage à forte empreinte carbone, l'immoralité réside peut-être plus dans cette morale facile consistant à pourfendre les «super-riches», quand on a soi-même les moyens, par l'héritage ou, à l'image de Céline Vara et c'est à son honneur, le mérite, de vivre à peu près la vie qu'on veut.
Conspuer les «super-riches», c'est aussi une façon de rendre acceptable ou supportable à soi-même ses propres inconséquences.