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Si nos voisins autrichiens ont décrété le confinement pour tous dès ce lundi, la Suisse ne l'envisage pas (encore). Mais quel serait l'impact psychologique de ce «retour en arrière» pour la population ? Eléments de réponse.
22.11.2021, 12:0822.11.2021, 12:22
La première pensée qui nous vient à l'esprit en apprenant la nouvelle du reconfinement autrichien pourrait se résumer en une phrase qui ressemble à «J'espère qu'on ne va pas y passer aussi». Car oui, après plus d'une année de pandémie, le moral est plutôt en berne. Ainsi, selon Michaël Saraga, médecin adjoint au département de psychiatrie du Chuv:
«La crise est toujours en cours et la population est fatiguée. Les gens vont plus mal qu'au printemps 2020»
Cela semble être une évidence, mais si nouveau confinement il y a, moins bien nous nous sentirons. Pour le psychiatre, la grande différence entre cette fin d'année 2021 et le confinement du printemps 2020 réside dans l'augmentation de la tension qui règne au sein de la population.
«Au cours du premier confinement, il y a eu un mouvement de solidarité, un "tous unis contre le virus". Aujourd'hui on cherche à désigner des coupables comme les non-vaccinés ou les autorités. On veut reprocher cette situation à quelqu'un»
Mais comment allons-nous affronter les conséquences de cette 5ᵉ vague ? Selon Carol Gachet, psychologue spécialisée en psychotraumatologie, durant cette crise qui n'en finit pas de durer, nous n'avons pas pu relâcher le stress qui s'est accumulé.
«Lors de la première vague, on a vécu un stress traumatique avec l'annonce du confinement. Après un tel choc, le stress est censé redescendre gentiment pour revenir à la normale. Mais dans cette crise, on a continué à garder la population en état d'alerte»
Et la psychologue d'ajouter que si les réactions de stress aigües ne disparaissent pas chez certaines personnes après un mois, on peut alors considérer qu'elles vivent un stress post-traumatique.
Les ados en PLS?
Les premières victimes collatérales de cette crise sanitaire sont les adolescents. Selon la plateforme Ciao.ch, les idées suicidaires ou évoquant l'automutilation ont augmenté de 200% depuis le début de la crise sanitaire. Les jeunes vont mal à cause des restrictions, mais aussi de la rareté des liens sociaux.
L'adolescence est caractérisée par des tâches développementales dans le cadre desquelles l’individu acquiert progressivement son autonomie et forge son identité, largement au travers de la socialisation et de la formation. Dans cette perspective, on comprend que la pandémie de Covid-19 affecte de façon spectaculaire ce processus et menace la santé et le bien-être des adolescent·e·s en réduisant l’accès aux soins, à l’éducation, aux sports et aux loisirs.
Extrait d'un article de la Revue Médicale Suisse Carol Gachet rebondit sur ce constat en insistant sur la pression que subissent les adolescents aujourd'hui et le besoin de leur donner des perspectives positives pour leur futur.
«Reconfiner ça serait empêcher les jeunes de se projeter dans l'avenir. Il faut leur donner des perspectives car l'impact du confinement sur leur santé psychique est trop forte»
Sens de la tribu et joie de vivre
Alors comment se préparer mentalement pour affronter cette nouvelle vague? La psychologue fait alors appel à notre sens de la tribu. «Quand un prédateur menace le troupeau, il resserre les liens pour se protéger. L'être humain n'est pas si différent de l'animal. Face à une menace, il doit se regrouper pour survivre.»
Car là réside la différence fondamentale entre le premier confinement et l'incertitude de ces derniers jours. Après plus d'une année d'expérience, on a pris la mesure des effets nocifs du confinement sur notre santé mentale. Ainsi, interdire une nouvelle fois aux gens de se voir et leur demander de se séparer de leurs proches ne devrait plus être envisageable selon Carol Gachet.
«Aujourd'hui, on sait qu'on doit cultiver la proximité, la joie d'être ensemble et le lien d'attachement qui est primordial pour rester en bonne santé»
Et si on devait porter le masque à vie? Décryptage en vidéo.
Video: watson
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Christoph Frei: C’est un succès remarquable pour Donald Trump, un véritable raz de marée. Le résultat montre encore une fois qu’il faut prendre les sondages avec prudence. Se tromper à ce point devrait nous pousser, dans les disciplines de la recherche sociale concernées, à faire preuve de davantage d’humilité.