Suisse
Covid-19

Berne va désactiver l'app SwissCovid, voici ce qu'il faut savoir

SwissCovid
C'en est bientôt fini de SwissCovid. L’application de traçage des contacts a été introduite en juin 2020 et a compté plus de 2 millions d’utilisateurs actifs. image: KEYSTONE/Ti-Press

Berne va désactiver l'app SwissCovid: tout ce qu'il faut savoir

Des chercheurs et des informaticiens suisses ont voulu lutter contre la pandémie avec une application pour smartphones innovante. Puis l'Etat a pris le relais. Aujourd’hui, on veut y mettre un terme. Il est temps de faire le bilan.
Cet article est également disponible en allemand. Vers l'article
26.03.2022, 08:0326.03.2022, 19:09
Daniel Schurter
Daniel Schurter
Daniel Schurter
Suivez-moi
Plus de «Suisse»

C'est bientôt la fin de SwissCovid.

Après le 1er avril, l'application disparaîtra des app stores d'Apple et de Google, comme l'a confirmé son responsable, l'Office fédéral de la santé publique (OFSP).

Le système suisse de traçage de proximité sera stoppé. De très nombreuses questions restent en suspens. Nous avons essayé d’y apporter des réponses.

L'application SwissCovid est-elle toujours active sur ton téléphone portable?

Quand l'application disparaîtra-t-elle des app stores?

En avril, dit la porte-parole de l'OFSP Katrin Holenstein.

Que les responsables tirent la prise et fassent disparaître l'application de l'Apple Store et du Google Play Store le 1er avril ou plus tard dans le mois, cela ne change pas grand-chose.

Doit-on dire adieu à SwissCovid?

Pas encore. La porte-parole de l'OFSP écrit:

«En fonction de l'évolution de la situation épidémiologique durant l'hiver 2022/2023, l'exploitation de l'application SwissCovid doit pouvoir reprendre rapidement. C'est pourquoi les infrastructures informatiques nécessaires continueront d'être maintenues en arrière-plan.»

Pour quelles raisons réactiverait-on SwissCovid?

Selon l'OFSP, ce n'est pas encore clair (ou alors les responsables ne veulent pas trop se mouiller).

Katrin Holenstein explique:

«Des indicateurs concrets n'ont pas été définis. Une détérioration de la situation épidémiologique, qui nécessiterait de nouvelles mesures, pourrait favoriser une décision allant dans ce sens.»

Pourquoi désactiver l’application malgré le nombre élevé d'infections?

Parce que le Conseil fédéral mise sur la contamination.

La porte-parole de l'OFSP le formule ainsi:

«Avec la levée de l'obligation d'isolement au 31 mars, les conditions pour une poursuite efficace de l'application SwissCovid ne sont plus réunies – du moins temporairement. Le Contact Tracing est fortement réduit en même temps que la levée de l'obligation d'isolement.

Comme l'application SwissCovid dépend pour son fonctionnement de tests généralisés et d'un traçage des contacts largement effectué, elle doit être temporairement désactivée.»

Le gouvernement suisse décrète donc (après concertation avec les responsables cantonaux) que toutes les mesures de lutte contre la pandémie de coronavirus sont supprimées. L'application d'alerte ne servirait plus à rien sans ces mesures.

SwissCovid, un flop?

Pas du tout, au contraire.

SwissCovid a sauvé des vies, notamment avant la disponibilité des vaccins.

Des études scientifiques indépendantes ont démontré un effet positif. De nombreuses personnes se seraient fait dépister parce qu'elles avaient reçu un avertissement via l'application. Les infections au Covid ont ainsi été détectées à temps et de nombreuses contaminations ont très probablement été évitées.

Grâce aux avertissements de l'application, les personnes présentant un risque d'infection se sont mises en quarantaine environ un jour plus tôt. Dans l'ensemble, SwissCovid a apporté une contribution importante à la lutte contre la pandémie, selon les spécialistes.

D'un point de vue financier, SwissCovid a également porté ses fruits: moins de 10 millions de francs ont été dépensés pour le développement et l'exploitation. A titre de comparaison, le Covid a coûté au total plus de 30 milliards de francs à la Suisse.

Est-ce que SwissCovid a répondu à toutes les attentes?

Pas vraiment.

L'impact aurait pu être bien plus important si plus de personnes avaient utilisé l'application. Et pour des raisons (personnelles) inconnues, l'alerte individuelle n'a pas non plus été très efficace: beaucoup de personnes infectées n'ont pas saisi le code Covid. Etait-ce un souci de confort?

Les responsables de la Confédération et des cantons doivent se demander pourquoi ils n'ont pas réussi à convaincre une partie considérable de la population suisse des avantages de l'application SwissCovid.

La population non technophile a-t-elle manqué de confiance, d'information ou de formation? Ce qui est sûr, c'est que de graves erreurs de communication ont provoqué l'incertitude et la colère. De plus, une fois l'euphorie du début retombée, SwissCovid a rapidement été délaissée par l'OFSP et le premier responsable politique, le conseiller fédéral Alain Berset. L'application n'a plus été mentionnée lors des conférences de presse.

Le taux de vaccination notoirement bas a toutefois aussi montré que de nombreux Suisses ne pouvaient (ou ne voulaient) pas entendre les arguments rationnels au milieu d'une crise grave.

Quelles ont été les principales faiblesses?

La Confédération et les cantons ont échoué dans la mise à disposition et l'exploitation de l'infrastructure SwissCovid. Il s’agit là d'une défaillance totale par phases.

Le couplage avec les systèmes cantonaux de traçage de contacts a entraîné des engorgements lourds de conséquences. Les codes Covid étaient envoyés trop tard ou pas du tout. De nombreux utilisateurs se sont résignés.

En raison du manque de numérisation du système de santé suisse, il n'a pas été possible de réaliser un échange de données automatisé. L'absence d'une carte d'identité numérique sécurisée s'est également fait sentir.

Ainsi, contrairement à l'application allemande Corona-Warn, SwissCovid n'offre pas la possibilité d'afficher automatiquement les résultats des tests PCR dans l'application. Il aurait pourtant été judicieux, par exemple, de délivrer immédiatement un code Covid à la personne concernée en cas de résultat positif du test de dépistage.

Si l'on considère les efforts de communication de l'OFSP, en tant qu'éditeur de SwissCovid, on remarque que les responsables ont pour ainsi dire capitulé dès la deuxième année de coronavirus. Le compte Twitter abandonné @SwissCovid en est la preuve.

Deux tweets en six mois...
Deux tweets en six mois...screenshot: twitter

Quelle a été l'efficacité de SwissCovid?

Nous ne le saurons probablement jamais de manière certaine. Pour plusieurs raisons:

  • Le système SwissCovid a été conçu dans le respect de la protection des données, de sorte qu'aucune donnée pertinente sur l'utilisation individuelle ne tombe dans les mains des exploitants.
  • La Confédération, respectivement l'OFSP en tant que responsable de l'application, a omis de faire étudier scientifiquement l'efficacité sur une longue période. Il y avait des doutes justifiés concernant l'estimation de la distance, qui se base sur la puissance du signal Bluetooth des téléphones portables*.
  • Les processus liés à l'application s'étant littéralement effondrés lors de la deuxième vague de Covid, les données nécessaires au calcul de l'efficacité font défaut. C'est là que le manque de numérisation du système de santé et de coopération entre les cantons ont pris leur contre-pied.

* Il convient de noter que l'estimation de la distance par signal Bluetooth est née d'une nécessité, car aucun meilleur procédé n'était disponible. À l'avenir, la technologie à très large bande (UWB) pourrait jouer un rôle important. Certains smartphones haut de gamme actuels, comme ceux d'Apple et de Samsung, sont déjà équipés d'une puce UWB qui permet de déterminer au millimètre près la distance entre deux appareils. Cela permettrait également un échange de données sécurisé. Toutefois, les fabricants de téléphones portables ont jusqu'à présent omis d'intégrer systématiquement la technologie UWB dans les nouveaux appareils mobiles.

Que faut-il améliorer en vue d'une prochaine pandémie?

Avertir les gens qu'ils ont peut-être été contaminés a contribué à lutter contre la propagation du Covid.

Mais il y a un énorme potentiel d'amélioration dans la mise en œuvre technique de ce système. Les responsables de la Confédération et des cantons devraient tirer des leçons du gâchis des données dû au fédéralisme. Il s'agit notamment de faire progresser la numérisation du système de santé sur l'ensemble du territoire, de manière sûre et conforme à la protection des données.

Si une nouvelle pandémie doit se déclarer, il faut que le pays soit mieux préparé. C'est pourquoi la Confédération devrait préparer une application épidémiologique fonctionnelle, en s'appuyant sur les expériences faites avec SwissCovid et les applications de certificats.

Du point de vue du rédacteur de watson, qui s'occupe intensivement des applications d'alerte Covid depuis deux ans, il serait judicieux de regrouper différentes fonctions (par exemple l'alerte individuelle, la gestion sécurisée des certificats, la réservation des rendez-vous de vaccination, etc.) dans une seule application gérée par l'Etat.

C'est ce qu'ont fait l'Allemagne et l'Angleterre avec succès: une application utilisée au quotidien ne tombe pas facilement dans l'oubli, mais reste dans la conscience publique. De plus, lors des mises à jour ultérieures et par le biais de notifications, les utilisateurs peuvent être encouragés à activer volontairement des fonctions supplémentaires utiles («opt-in»).

Enfin, il convient également de rappeler les manquements dans la lutte transfrontalière contre les épidémies. La Suisse, qui n'est pas membre de l'UE, a eu beaucoup de mal à s'intégrer dans le système européen. La Confédération a sans doute capitulé trop tôt en ce qui concerne l'interopérabilité: les politiciens ont ainsi omis de convenir contractuellement de l'échange de données avec d'autres pays. Conclusion décevante: SwissCovid ne fonctionne ni en Autriche, ni en Italie, mais seulement au Liechtenstein et en Allemagne (et la France est de toute façon restée à l'écart avec sa propre application).

SwissCovid est-il un outil de surveillance?

Non. Cette affirmation a fait son chemin, des articles de presse en ont même parlé.

La vérité: SwissCovid a été conçu selon le principe de l'économie des données, a été jugé fiable par le plus haut responsable de la protection des données du pays et a également satisfait à toutes les exigences légales en matière de sécurité des données.

Aucune panne technique grave n'est survenue et aucun problème de sécurité informatique n'a été rendu public depuis le lancement.

Qu'en est-il du cadre légal?

Selon l'actuelle loi sur les épidémies, le cadre juridique de base de l'application SwissCovid ne prend fin que le 31 décembre 2022, mais les ordonnances correspondantes seront «probablement abrogées dès la fin mars», comme l'écrit la porte-parole de l'OFSP. La décision devrait être prise lors de la réunion du Conseil fédéral du 30 mars.

Concrètement, il s'agit des ordonnances suivantes:

  • OSTP (Ordonnance sur le système de traçage de proximité pour le coronavirus Sars-CoV-2)
  • OSIM (Ordonnance sur un système visant à informer d’une infection possible au coronavirus SARS-CoV-2 lors de manifestations)

Et maintenant à toi!

Quel est ton bilan de SwissCovid? Selon toi, la Suisse a-t-elle marqué des points dans la lutte numérique contre les épidémies ou l'application a-t-elle été un coup d'épée dans l'eau?

Ecris-nous via la fonction commentaire!

La Suisse doit-elle lutter contre les futures crises sanitaires par le biais d'applications?

Sources

Traduit de l'allemand par Tanja Maeder

Fin du certificat covid, vous en pensez quoi?
Video: watson
0 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
Le pollen sera plus agressif en 2024 à cause de cet arbre
L'arrivée des beaux jours s'accompagne d'un élément indésirable qui va fortement embêter environ 20% de la population: le pollen. Ce printemps, les allergies de certains seront d'ailleurs plus fortes que d'habitude. Une experte de aha! Centre d'Allergie Suisse explique pourquoi.

Pourquoi les allergies seront-elles plus fortes en 2024?
Marie-Hélène Corajod: Pour deux raisons principales. Premièrement, car la saison pollinique a commencé avant l'heure cette année pour le noisetier et le bouleau. La floraison de ce dernier a débuté une à deux semaines plus tôt que d'habitude en raison des températures exceptionnellement élevées depuis début février. Secondement, car le bouleau produit énormément de pollen une année sur deux.

L’article