A partir de cette année, les partis bourgeois perdent un donateur généreux et régulier. Comme CH Media (dont watson fait partie) l'a appris de sources bien informées, UBS supprime les dons que Credit Suisse versait jusqu'à présent aux partis suisses – et ne prévoit pas de les remplacer.
Le 19 mars 2023, le Conseil fédéral, la Banque nationale suisse et les deux grandes banques ont annoncé la reprise de Credit Suisse par UBS. Avant cela, Credit Suisse avait été pendant des années l'entreprise la plus généreuse du pays envers les partis politiques. Elle mettait à disposition une contribution annuelle d'un million de francs. De son côté, UBS a augmenté son volume de dons aux partis, qui a longtemps été d'un demi-million de francs par an, à 750 000 francs fin 2022.
Mais UBS ne semble pas vouloir remplacer les contributions supprimées de CS, comme nous l'avons appris auprès de plusieurs secrétariats de partis.
Interrogé par CH Media, le service de presse d'UBS ne veut pas confirmer cette information. Un porte-parole de la banque renvoie au supplément du rapport annuel de durabilité que la banque publie au printemps.
Une autre source au sein d'UBS souligne qu'aucune décision définitive n'a encore été prise formellement.
Comme l'indique cette annexe au «Sustainability Report 2023» d'UBS, Credit Suisse s'était déjà limité l'année dernière. Malgré sa reprise par UBS annoncée en mars, Credit Suisse a encore distribué 450 000 francs aux partis politiques en 2023. Pour UBS, la somme est restée inchangée: 750 000 francs.
Fin août, les partis ont dû publier pour la première fois leurs budgets annuels en raison des nouvelles dispositions en matière de transparence du financement politique. Cela permet de voir quels partis ont profité de la générosité de Credit Suisse en 2023. L'UDC arrive en tête avec 160 000 francs, suivie du Centre avec 119 000 francs, du PLR avec 99 000 francs et des Vert'libéraux avec 44 000 francs.
UBS a aussi fait des dons aux quatre partis mentionnés. Les montants allaient de 241 000 francs (UDC) à 66 000 francs (Vert'libéraux). La banque répartit ses dons en fonction du nombre de sièges à l'Assemblée fédérale et aux parlements cantonaux. Les partis qui entrent en ligne de compte sont ceux qui s'engagent pour la liberté de concurrence, la libre économie de marché et la place financière suisse.
Les Verts et le PS n'ont rien reçu – ils ne remplissaient manifestement pas ces critères aux yeux de l'UBS. Les deux partis de gauche n'acceptent de toute façon les dons d'entreprises que de la part de celles organisées en coopératives ou les sociétés de collaborateurs.
La suppression des dons ne met pas en danger les partis de droite. L'UDC compte sur un budget de 5,9 millions de francs, quand les Vert'libéraux tablent sur 1,4 million de francs. Mais cette absence devrait tout de même faire mal. En effet, alors que le PS et les Verts se financent principalement par les cotisations de leurs membres et grâce aux mandats de leurs élus, les partis bourgeois dépendent davantage des dons de particuliers, d'associations et d'entreprises, du moins au niveau national.
La disparition d'un grand donateur régulier comme Credit Suisse est particulièrement inopportune pour l'année en cours, entend-on au siège d'un parti bourgeois. L'année électorale 2023 a mis les caisses du parti à rude épreuve, et la recherche de dons (fundraising) s'avère plus difficile cette année, car de nombreux donateurs potentiels ont déjà ouvert leur porte-monnaie l'année dernière.
Les dons d'UBS aux partis bourgeois devraient toutefois continuer à affluer cette année. Le service de presse n'a pas non plus voulu donner d'informations concrètes à ce sujet. Il renvoie à nouveau au supplément du rapport de durabilité mentionné plus haut. UBS y écrit:
Celui-ci est toutefois régulièrement contrôlé, précise le rapport.
Le PS est également indirectement touché par la suppression des dons de CS. La fondation Anny-Klawa-Morf, créée par le parti en mars 2019 mais formellement indépendante, a été financée à bien plus de 50% par un don annuel important de Credit Suisse au cours de ses quatre premières années d'existence. En 2022 par exemple, le don de CS s'élevait à 191 000 francs.
Selon sa propre description, la fondation s'engage pour une «éducation politique progressiste» et s'oriente «vers les valeurs fondamentales de la social-démocratie». Elle réalise des études et des documents de travail et organise des débats ou des visites de ville. La fondation ne finance pas de campagnes électorales ou de votations, et ne soutient pas non plus financièrement les activités courantes du PS Suisse.
Contrairement au parti qui l'a fondée, la fondation accepte les dons d'entreprises qui ne sont pas organisées en coopératives et qui n'appartiennent pas à leurs collaborateurs. Concrètement, cela signifie que les entreprises – comme CS jusqu'à récemment – qui soutiennent financièrement les partis suisses, indépendamment de leur orientation politique, peuvent verser à la fondation Anny-Klawa-Morf la contribution qu'elles auraient prévue pour le PS.
Comme Simeon Marty, directeur de la fondation, l'explique, le don de Credit Suisse a déjà fait défaut en 2023, malgré une demande de la fondation en ce sens. Cela aurait entraîné une perte annuelle importante: en novembre 2023, le conseil de fondation a dû décider de mesures d'économie, peut-on lire dans le dernier rapport annuel. Pour l'année 2024, les activités ont été adaptées au budget par la suite, selon Marty. En outre, un poste vacant n'aurait pas été repourvu.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci