Les Etats-Unis n’ont manifestement plus la cote. Du moins, plus la même depuis que Donald Trump s’est installé une nouvelle fois à la Maison-Blanche. Alors que les appels au boycott des produits américains résonnent fortement en Europe, les actions, les décisions et les prises de parole du nouveau président semblent également freiner l’envie, pour certains, de tutoyer the american dream le temps de quelques semaines de vacances.
En France, par exemple, «les intentions de départ sont en baisse de 25% par rapport à 2024», expliquait Didier Arino de Protourisme, au Figaro. De manière générale, on sent un début de frilosité, notamment dans les dédales de la Bourse internationale du tourisme qui se tenait à Berlin début mars.
Si les voisins canadiens ne sont pas d’humeur à se balader dans un pays qui les étouffe à coups de taxes douanières et de menaces d’annexion, en Europe, c’est l’indécision qui prime. «Une hésitation qui pourrait conduire les Européens à reporter des vacances aux Etats-Unis, même vaguement planifiées», avoue à Die Zeit Peter van Berkel, patron d’une société de voyages organisés basée en Floride.
Qu’en est-il en Suisse? Tout dépend à qui on pose la question. Les grands voyagistes nous assurent que tout va pour le mieux. Dertour, qui gère notamment Helvetic Tours, Kuoni et qui vient d’avaler l’ancienne filiale de Migros Hotelplan, affirme que «le changement de président aux Etats-Unis n'a pas eu d'effet négatif sur les réservations».
Même son de cloche du côté de Swiss, pour qui «l’Amérique du Nord reste l'une des principales régions de desserte»: «La demande en provenance de la Suisse demeure stable et les réservations sont globalement au même niveau que l'année précédente», nous assure Michael Pelzer, porte-parole de la compagnie aérienne.
Pour déceler un début de réticence aux vacances américaines chez les touristes suisses, il nous a fallu contacter de plus petites agences de voyages. «Depuis une semaine, on sent bien qu’il se passe quelque chose», nous glisse par exemple une employée d’une agence vaudoise.
En revanche, chez Rubis Voyages à Colombier (NE), c’est carrément «un vent de panique» qui souffle sur les réservations à destination des Etats-Unis: «Beaucoup de nos clients ne veulent plus se rendre en Amérique du Nord», confie Elena, agente de voyage. Au bout du fil, elle nous explique que si certains «refusent d’emblée d’envisager les Etats-Unis», d’autres clients annulent leur voyage déjà réservé.
Elena nous déroule le cas d’une cliente qui devait embarquer pour une croisière en 2026. Mais en apprenant que l’embarcation devait traverser le canal de Panama, avant de rejoindre le pays de Donald Trump, elle est venue annuler son voyage.
Des annulations qui surviennent pour des raisons politiques? De l’anti-trumpisme?
Pas vraiment.
La sécurité? Une raison qui peut, à première vue, sembler étonnante. Or, un rapide coup d’œil sur les conseils aux voyageurs dispensés par le Département fédéral des affaires étrangères, mis à jour le 13 mars 2025, nous apprend que cette «peur irrationnelle» ressentie par les clients d’Elena chez Rubis Voyages ne tombe pas du ciel.
Si le DFAE affirme en introduction que «les voyages aux Etats Unis d’Amérique sont en principe considérés comme sûrs», la suite des recommandations a de quoi effrayer les touristes les plus impressionnables: «La prudence est toutefois de mise si vous vous trouvez à proximité d’une manifestation, car des débordements sont possibles».
En outre, il est vivement conseillé aux voyageurs de faire preuve de prudence dans les «lieux fréquentés», car les «autorités américaines font référence à la menace d’attentats terroristes». Bien sûr, les recommandations du DFAE ne sont pas là pour vendre des voyages et le vocabulaire utilisé est d’un sérieux très officiel, et ce, pour beaucoup de pays dans le monde.
Mais c’est sans doute suffisant pour que certains touristes suisses se reportent sur l’Asie ou l’Italie au moment de réserver leurs vacances, étant donné que l’Amérique de Trump infeste l’actualité mondiale.
Avant de raccrocher, Elena nous raconte encore le cas de ce client qui, juste avant l’élection, prévoyait d’annuler son voyage aux Etats-Unis «si Donald Trump venait à remporter l’élection». Il tiendra parole «quelques jours plus tard».
En conclusion, si le pays de l’Oncle Sam n’est pas encore déserté par la clientèle helvétique, ça cogite déjà avant de prévoir un road trip dans le Midwest, alors que le milliardaire MAGA n’est au pouvoir que depuis cinquante jours.