Elon Musk est mort. On le sentait déjà gros comme une maison après leur première coucherie sur un tas de billets verts, en pleine campagne présidentielle. Celui qui a presque tout conquis avait fini par craquer pour le dernier terrain encore vierge de ses coups de tronçonneuse: la politique.
Un pouvoir alléchant pour tout roi autoproclamé, mais qui se manipule avec un poil plus de précautions qu’un portefeuille d’actions, une voiture électrique ou une série de tweets. Même Donald Trump, le célèbre bourrin maladroit, a compris où se trouvent les (rares) limites de l’exercice. Et, ce, dès 2016.
Aujourd’hui, après plusieurs mois d’une romance de façade, l’homme le plus riche et l’homme le plus puissant du monde se lancent des noms d’oiseau sous nos yeux ahuris.
Une relation toxique, déséquilibrée, bêtement masculine, perturbante, intéressée, probablement illégitime, malgré tout passionnante bien que très éloignée des intérêts du peuple. Un coup de foudre qui non seulement ne pouvait durer, mais qui n’aurait sans doute jamais dû naître. Entre les deux mâles les plus immatures et instables de la planète, il y avait pourtant une sincère fascination mutuelle. Si différents et en même pas tant que ça.
Pour rappel, c’est Elon Musk qui a dragué le premier, en sortant son chéquier et en habillant son réseau social aux couleurs du futur président des Etats-Unis. Pour faire le paon, dérouler la parade, balancer quelques clins d’œil appuyés. A l’instar du garçon le plus populaire du collège qui, par défi et gourmandise mal placée, fait tout pour conquérir la nouvelle venue. Trump, lui, a été touché par tant d’attention en provenance du jeune effronté, conscient que ça pouvait lui offrir de quoi bichonner son objectif.
A quel point Elon Musk a-t-il participé à la victoire électorale de Donald Trump? Le président a-t-il de lourdes casseroles dans le dossier Epstein? Difficile à dire et, au fond, peu importe. Pour l’heure en tout cas. Même si tout ça appartient finalement au passé, c’est inlassablement ce dernier qui vient nourrir les guerres du présent. L’heure est au ressassement et à la mauvaise foi. Les étapes du deuil sont les mêmes pour tous.
En cela, leur bruyante rupture n’a rien à envier aux divorces ordinaires, bourrés de rancœurs, d’égos blessés et d’amours gâchées. Et voici les Etats-Unis et le reste du monde contraints d’incarner la progéniture, coincée au milieu du conflit parental, impatiente de savoir chez qui elle va dormir.
Si, dans la vraie vie, cette problématique peut parfois durer de longues années, le droit de garde est une affaire réglée en ce qui concerne Musk et Trump. En quelques mois de passion, le riche papa de la tech a perdu beaucoup de plumes. Une image écornée, une clientèle agacée, des bagnoles moquées, un compte en banque rudoyé.
Plus gênant, le patron de SpaceX doit dealer avec l’idée d’un échec cuisant, car son court passage à Washington n’aura convaincu personne, Trump en tête, laissant derrière lui un bordel monstre.
La Maison-Blanche, même si le tech boy a eu la permission d’y ranger ses slips quelques mois, appartient bel et bien à daddy Trump jusqu’en 2028. En cela, sur le terrain politique, Elon Musk a déjà perdu. Et il le sait. C’est sans doute pour cette raison qu’il fulmine dans le vide, rudoyant son réseau social comme un tout frais divorcé irait taper dans un sac au fitness ou dans une bouteille de gnôle au bar du coin.
Il n’a cependant pas dit son dernier mot et ses munitions techno-financières ont de quoi foutre un sacré bordel dans le daily business du président. Ses fusées et ses satellites, autrement dit sa mainmise sur l’espace américain, joueront un rôle majeur dans les prochaines semaines, sachant que Donald Trump n’a pas tout à fait les moyens de s’en passer.
Mais le potentiel de nuisance quasi infini d’Elon Musk ne vaut pas grand-chose lorsque l’on se trompe de terrain de jeu. La politique ne tolère pas les mêmes bravades que la finance ou la technologie. Jusqu’en 2028, qu’il décide de pourrir le mandat MAGA, menacer les élus républicains qui voteront le «Big Beautiful Bill» ou créer un nouveau parti libertarien, par pur esprit de vengeance, l’homme le plus riche du monde va devoir se contenter d’essayer de rester l’homme le plus riche du monde.
En limitant la casse.
On raconte d’ailleurs que les deux tourtereaux envisagent déjà une séance de conciliation. Un coup de fil pour calmer le jeu. C’est dans l’intérêt de papa Musk, pour autant qu’il ait l’intelligence de se souvenir qu’un président des Etats-Unis, même Donald Trump, ne sera jamais un vulgaire ex qu’il est possible de bloquer sur WhatsApp.