Face à Trump, la cheffe du Seco «tente de sauver ce qui peut l'être»
Une petite horloge Rolex. Un lingot d'or. C'est avec ces cadeaux princiers d'une valeur d'environ 100 000 francs qu'un groupe de patrons suisses, dont plusieurs Romands, ont visité Donald Trump, le 4 novembre. Dix jours plus tard, Guy Parmelin revenait de Washington avec des droits de douane abaissés de 39% à 15%.
Les réactions politiques n'ont pas tardé. Les conseillers nationaux verts Raphaël Mahaim (VD) et Greta Gysin (TI) ont annoncé la semaine dernière avoir déposé une dénonciation pénale auprès du Ministère public de la Confédération pour corruption.
Le cas a donc été formellement signalé à la justice fédérale, qui a confirmé à watson que trois dénonciations pénales contre inconnu ont été déposées, sans pouvoir nous en dire plus sur la suite de la procédure pour le moment.
Des patrons «prêts à agir» loués par le Seco
L'histoire ne s'arrête pas là. Mardi dans la NZZ, la patronne du Secrétariat pour l'économie (Seco), Helene Budliger Artieda, a réagi à l'affaire. Selon elle, non seulement les patrons suisses avaient averti le Seco des cadeaux qu'ils allaient offrir au président américain, mais ils ont bien fait d'agir de la sorte.
Elle indique qu'il s'agissait d'une initiative privée et que les hommes n'ont pas négocié avec le président américain à proprement parler. Elle estime qu'ils ont «réussi à établir un lien concret» avec Donald Trump, «comme peu d'autres ont su le faire» et n'hésite pas à parler d'une «visite cruciale» à Washington.
La diplomatie, «pas à n'importe quel prix»
Contacté, Raphaël Mahaim, à l'origine de la plainte, n'est pas vraiment surpris de ce soutien aux patrons suisses de la part de la Confédération, mais n'en demeure pas moins critique:
Il ajoute: «Mais cela va bientôt s'apparenter à de l'acharnement thérapeutique». Car pour le Vaudois, l'épisode des patrons suisses dans le Bureau ovale a déjà écorné l'image de la Suisse. «Je ne conteste pas la nécessité d'une diplomatie économique», tempère-t-il. Il précise:
Des cadeaux cédés au gouvernement américain?
Il n'empêche, la dénonciation portée avec sa collègue tessinoise n'était-elle pas juste une occasion de marquer un coup politique? «Non», corrige l'avocat de formation, qui cite un rapport du Congrès américain de 2023 indiquant que, durant son premier mandat présidentiel, Donald Trump n'a tout simplement pas enregistré une bonne partie des cadeaux reçus dans le cadre de visites diplomatiques.
Selon ABC News, on comptabiliserait une centaine de cadeaux non enregistrés pour un total de 300 000 dollars, parmi lesquels un club de golf en or, offert par le Premier ministre japonais. Selon la loi américaine, le président ne peut garder pour lui-même des cadeaux à valeur de plus de 415 dollars et doit céder les présents supplémentaires à la Bibliothèque présidentielle. «A notre connaissance, il n'y a pas encore enregistré la Rolex et le lingot d'or», indique Raphaël Mahaim.
«Les conditions de l'infraction pourraient alors être remplies sur le plan pénal. Une instruction du procureur général de la Confédération se justifie dans tous les cas», estime l'avocat.
Par ailleurs, nous sommes désormais une semaine au-delà des dix jours au sein desquels le deal entre Guy Parmelin et le représentant américain du commerce, Jamieson Greer, aurait dû être signés. Le Vert déplore donc le résultat de ces négociations.
