Le 13 avril, les autorités ont invité la population de la localité grisonne de Brienz à se préparer à une évacuation des lieux en raison d'un éboulement qui menace le village et ses habitants. Mardi, le mot d'ordre a été donné: tous doivent partir d'ici vendredi. Maintenant, tout se précipite.
La masse rocheuse située au-dessus du village se déplace plus vite que prévu et les mesures effectuées par Stefan Schneider, géologue de l'EPFZ, confirment cette nette accélération. La vitesse absolue n'est pas le seul facteur déterminant, explique-t-il. «Depuis début avril, les vitesses ont doublé, voire triplé.» Il est probable que la roche s'effondre ou glisse dans les 7 à 24 prochains jours.
Personne ne sait exactement quelle sera la force de l'éboulement. Ce qui est clair en revanche, c'est que la catastrophe est imminente. C'est pourquoi la «phase orange» est officiellement en vigueur depuis mardi: les habitants doivent quitter le village avant vendredi soir, 18 heures. Aujourd'hui déjà, l'accès au village est fermé.
Lors de la séance organisée à la hâte mardi soir, le maire Daniel Albertin a expliqué être conscient que la décision d'évacuer serait accueillie avec beaucoup d'émotions par les habitants. Dès vendredi, ces derniers ne pourront plus passer la nuit à Brienz. Tant que la situation le permettra, ils pourront toutefois encore passer quelques heures dans le village en journée. Beaucoup ont déjà fait leurs valises.
Pour la population, la situation n'est pas seulement difficile sur le plan émotionnel. Des questions se posent également sur le plan pratique. Lors de l'assemblée, une femme s'est par exemple demandé comment le courrier sera distribué après l'évacuation. Une autre demande si elle peut continuer à se rendre chez elle en voiture, tandis qu'une troisième souhaite savoir si le car postal circulera encore.
Pour d'autres, les aspects financiers sont prioritaires: comment déclarer les dommages causés aux bâtiments aux assurances? La peur est également présente. Les précipitations actuelles et à venir accélèrent-elles le glissement de terrain? Quelle est la marge d'erreur des géologues de l'EPFZ?
Après la séance, la plupart des habitants regagnent leur maison à Brienz. Pour que l'évacuation se déroule sans problème, le gouvernement des Grisons a alloué mardi matin 500 000 francs pour des mesures d'urgence. Afin de «ne pas avoir à gérer les détails» dans la précipitation, comme l'explique le conseiller d'Etat Martin Bühler.
La commune a également mis à disposition 200 000 francs supplémentaires pour des mesures à court terme pour d'éventuels frais d'hôtel ou de transport, par exemple. Le conseiller d'Etat Martin Bühler promet aussi des aides financières, notamment pour faire face aux pertes de rendement des agriculteurs.
Le président du gouvernement grison Peter Peyer souligne que la santé mentale et physique de la population du village reste sa priorité. Selon le maire de la commune, une cinquantaine de foyers doivent être évacués. Seulement voilà, tous les habitants n'ont pas de solution pour se reloger. Le maire compte particulièrement sur le système de bénévolat et d'hébergement par un tiers.
L'évacuation n'est pas une surprise pour les habitants. Depuis des années, le village est sous surveillance en raison du déplacement de masses rocheuses au-dessus et en dessous du village. En octobre 2021, on espérait encore pouvoir stopper le glissement en évacuant l'eau de la montagne par une galerie provisoire.
Le glissement a certes pu être quelque peu freiné, mais il y a un mois, la roche en amont du village a montré des signes d'effondrement ou du moins, de glissade. Les autorités ont appelé la population à se préparer à une évacuation.
Vendredi, la commune a alors décrété la «phase jaune», les habitants se sont vus dans l'obligation de se préparer à partir. Si les experts estimaient avoir encore deux à six semaines avant que la roche ne se détache, les habitants ont dû se résoudre à quitter leurs maisons plus rapidement.
De son côté, le prêtre Federico Pelicon affirme que les gens sont mitigés face à cette situation. Il y a bien sûr l'incertitude, la difficulté de quitter sa maison et son village. Mais en même temps, l'espoir «que les choses ne soient pas si graves» se répand, dit-il. Tous espèrent que le village soit en grande partie épargné et qu'ils pourront bientôt revenir chez eux.
C'est également le souhait des autorités qui espèrent que les habitants pourront retourner dans leurs maisons après l'éboulement. La conseillère d'État Carmelia Maissen se veut rassurante lorsqu'elle affirme être consciente de la gravité de la situation. «Nous nous engageons à faire avancer la planification du retour des habitants, afin que la vie revienne au plus vite au village». Mais pour cela, il faudra d'abord se résigner à voir la roche se détacher.
Traduit et adapté par Noëline Flippe