Accord secret de plusieurs milliards, marchandage sans précédent, pantalonnade financière: le Blick n'a pas manqué de superlatifs lorsqu'il a rendu public dans son édition de mercredi un plan du centre-gauche. Des politiciennes de différents partis veulent trancher le nœud gordien.
La droite veut rapidement plus de moyens pour l'armée, la gauche veut éviter que l'argent destiné à l'aide à la reconstruction de l'Ukraine soit dépensé au détriment de la coopération internationale au développement (CI). Et Le Centre se trouve en quelque sorte entre les deux. Tous doivent maintenant s'accorder et faire des concessions dans le but d'accroître la sécurité et la stabilité en Europe.
Le centre-gauche prévoit donc un accord à 16 milliards. Les dépenses de l'armée devraient déjà atteindre 1% du produit intérieur brut d'ici 2030, au lieu de 2035. Le coût: 11 milliards de francs. Et les cinq milliards de francs pour l'aide à la reconstruction ne doivent pas provenir du budget de la CI, comme le prévoit le Conseil fédéral. Les 16 milliards de francs doivent être comptabilisés comme «dépenses extraordinaires» et échapper ainsi au frein à l'endettement. Mais pour cela, il faut une loi spéciale.
Jeudi, la Commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats se prononcera sur une proposition en ce sens de la conseillère aux Etats Marianne Binder (Centre), comme le confirment différentes sources. La demande a été déposée lors de la dernière séance à la mi-mars; entre-temps, l'administration a dû répondre à quelques questions à ce sujet. Le rapport est disponible, mais il est soumis au secret de la commission.
La controverse porte surtout sur le fait de savoir si les 16 milliards de francs peuvent être comptabilisés comme «extraordinaires». Le Conseil fédéral a répondu par la négative à cette question en ce qui concerne l'armée, mais aussi la reconstruction en Ukraine.
En mars, lorsque le Conseil national a discuté d'un fonds pour l'aide à la reconstruction – et l'a rejeté avec les voix de l'UDC, du PLR et du Centre. Le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis avait déclaré:
Lorsque le conseiller aux Etats Werner Salzmann (UDC/BE) a voulu augmenter les dépenses de l'armée en contournant le frein à l'endettement, le Conseil fédéral a également dit non. Selon la loi sur les finances de la Confédération, les dépenses extraordinaires ne sont autorisées qu'en raison d'évolutions exceptionnelles et non contrôlables par la Confédération. Les dépenses de l'armée n'en font pas partie.
Le Parlement a bien sûr le pouvoir de modifier la loi. Ces dernières semaines, des représentantes des deux chambres ont fait avancer l'idée d'un deal à 16 milliards. Selon certaines informations, la ministre de la Défense Viola Amherd (Centre) serait également favorable à l'idée.
Il sera intéressant de voir si les politiciens parviennent également à convaincre leur groupe parlementaire. Le PS est-il vraiment favorable à une augmentation rapide et importante des dépenses de l'armée? Et le Centre est-il prêt à contourner le frein à l'endettement? L'UDC Mauro Tuena, est convaincu que ce serait le début de la fin du frein à l'endettement.
Un groupe de travail dirigé par le conseiller aux Etats Peter Hegglin (Centre/ZG) a récemment proposé d'augmenter temporairement la TVA si l'on veut dépenser tant d'argent pour le financement de l'armée. Ce serait la voie la plus honnête, selon lui. Il ne croit pas au méga-deal que ses collègues de parti mettent en avant. «L'idée n'a pas été pensée jusqu'au bout», dit Peter Hegglin. «Avec un financement en dehors du frein à l'endettement, la Constitution et la loi sont bafouées.»
Peter Hegglin admet ouvertement qu'il existe au sein de son groupe des positions divergentes entre les politiciens des finances (comme lui) et les politiciens de la sécurité. Ces derniers privilégieraient le contournement du frein à l'endettement, car une votation populaire est considérée comme un obstacle trop important.
Le centre-gauche dispose d'une majorité au sein de la Commission de la politique de sécurité. L'accord à 16 milliards a donc des chances d'aboutir. S'il passe, les politiciennes des finances du Conseil national se chargeront du dossier: le 7 mai, leur commission des finances se prononcera probablement sur l'accord. (aargauerzeitung.ch)
Traduit et adapté par Tanja Maeder