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Pourquoi le massacre du Hamas est un séisme pour la diplomatie suisse

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Le chef du DFAE, Ignazio Cassis. En arrière-fond, la guerre à Gaza.Image: Shutterstock

Le massacre du Hamas percute de plein fouet la diplomatie suisse

Le massacre du Hamas, le 7 octobre, oblige la Suisse à revoir sa politique humanitaire au Proche-Orient, estime un diplomate du DFAE. Des sanctions pourraient être décidées contre l'Iran, le Qatar et des dirigeants du Hamas.
10.11.2023, 06:0410.11.2023, 16:52
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Pour la Suisse, le 7 octobre 2023 a de mêmes effets sismiques que le 24 février 2022. Comme l’invasion de l’Ukraine par la Russie a fait trembler le socle de sa neutralité, le massacre du Hamas met à l’épreuve son logiciel moyen-oriental. Tout ne sera probablement plus comme avant.

«Les épouvantables attaques terroristes du groupe armé palestinien ne permettent plus à la Suisse de soutenir financièrement la moindre ONG qui, d’une manière ou d’une autre, pourrait donner l’impression de légitimer de tels actes, en les assimilant à des faits de résistance, par exemple»
Un diplomate du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE)

Le chef du DFAE, Ignazio Cassis, a pris la mesure du bouleversement provoqué par l’attaque du Hamas. Le 25 octobre, il annonçait la suspension du financement de onze ONG – six israéliennes, cinq palestiniennes – œuvrant pour les droits humains au Proche-Orient. Lors d’une précédente annonce, le 13, il indiquait qu’une task force Proche-Orient au sein de son département allait examiner les moyens juridiques permettant de déclarer le Hamas organisation terroriste. Dans le même temps, elle serait chargée de vérifier que les montants alloués à la coopération dans la région – 2,3 millions de francs pour l’année 2023 – ne servent pas à la propagande ou aux combats.

«Concrètement, il s’agit entre autres de s’assurer que des manuels scolaires distribués aux enfants palestiniens ne désignent pas les juifs comme des ennemis à abattre»
Le diplomate suisse cité plus haut

Mais l’audit en cours embrasse des champs bien plus vastes. C’est ce qu’explique le conseiller national Nicolas Walder (Les Vert.e.s/GE), membre de la commission de politique extérieure, qui se réunira lundi pour un suivi des travaux de la task force.

«Le but, c’est de tout entreprendre pour éviter que des flux financiers passant par la Suisse, ses banques ou ses entreprises, ne servent au financement de groupes armés. Il faudra par ailleurs envisager la possibilité de prendre des sanctions contre certains pays proches ou réputés proches du Hamas, on pense au Qatar et à l’Iran. Enfin, les avoirs des responsables du Hamas pourraient être gelés, ce qui n’est pas le cas en Suisse pour l’instant. On l’a bien fait avec des oligarques russes.»
Nicolas Walder

On n’y est pas encore. Pour l’heure, le DFAE, en attendant de couper des branches qui se révéleront peut-être pourries, envoie du bois en termes de communication. Le diplomate précité l'affirme: «Après le 7 octobre, la Suisse ne peut en aucun cas courir le risque d'être traitée comme une espèce de complice, même à son corps défendant, du Hamas.» Tout sauf un bad buzz sur la scène internationale.

Des ONG boucs émissaires?

D’où son intention d’inscrire le groupe gazaoui sur la liste des organisations terroristes – le Conseil fédéral pourrait faire connaître sa décision à ce sujet le 15 novembre. D’où ses mesures conservatoires à l’endroit de onze ONG. Ce dernier point ne fait pas l’unanimité chez ceux qui pensent que l’aide humanitaire à des ONG apparemment sans taches, fussent-elles critiques de la politique du gouvernement israélien à l’égard des Palestiniens, ne doit pas être sacrifiée sur l’autel de la raison d’Etat. «Il aurait mieux valu procéder à un examen préalable de leurs actions avant de les sanctionner s’il y a lieu», réagit Nicolas Walder.

«En agissant de la sorte, on jette l’opprobre sur elles»
Nicolas Walder

Les onze ONG devraient être fixées sur leur sort fin novembre.

«Humiliations infligées par des colons aux bédouins»

La Suisse est-elle en train d’agir contre ses intérêts? Ou plutôt contre sa nature? Celle d’un Etat patrie tout à la fois du CICR et des Conventions de Genève, où le droit humanitaire et la neutralité ne font qu’un. Là encore, le massacre du 7 octobre, en raison de son extrême cruauté, «fait exploser une situation déjà difficile pour le CICR», relève le diplomate. Qui développe:

«En effet, le CICR et l’action humanitaire de la Suisse dans la région sont par définition tournés vers les victimes. Et qui sont les victimes? Ce sont les Palestiniens, au premier chef ceux des territoires occupés. Le personnel humanitaire constate sur place les brimades et humiliations infligées par des colons aux bédouins, les oliviers arrachés. Une empathie s’installe avec les Palestiniens, c’est inévitable, même s’il faudrait ne jamais prendre parti.»

Le 7 octobre force à considérer que l’horreur, dans ce qu’elle a d’absolu, est venue côté palestinien. Qu’elle ne soit pas sans causes, comme le relèvent certains, n’ôte rien à sa spécificité.

C’est probablement cette spécificité qui, le 1er novembre, a retenu Ignazio Cassis d’appeler Israël à un cessez-le-feu, alors que la guerre menée par Tsahal fait des milliers de morts parmi les Gazaouis, 10 000, dont 4000 enfants, selon le Hamas. «Cela aurait voulu dire qu’Israël n’a pas le droit de se défendre, alors qu’un groupe armé appelant à sa destruction a mitraillé, brûlé et coupé en morceaux plus d'un millier de civils sans défense. La barbarie du Hamas n'est pas de même nature que la réponse militaire d'Israël, bien qu'elle soit dramatique pour les civils palestiniens», analyse crûment le diplomate suisse. Qui résume la situation d’une formule:

«En commettant le pire, le Hamas a provoqué le pire»
«Les Palestiniens sont durs à tuer, je le sais, j'en ai épousé une!»
Video: watson
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