Nous avons un peu vite oublié que la vie quotidienne des Autrichiens est à l'étroit depuis le 8 novembre déjà: pas de resto, pas de coiffeur, pas de concerts sans une vaccination complète ou une guérison de moins de six mois. Cette fameuse 2G qui n’est pas (encore) tout à fait sur la table des négociations en Suisse. Mais les nouvelles injonctions déposées lundi sur les épaules des Autrichiens non vaccinés piquent les yeux:
Ceux qui ne se sont pas encore approchés d’une fiole de vaccin sont confinés. Jusqu'à nouvel ordre. Et des contrôles seront réalisés. Oui, on se croirait retombés en 2020. Lockdown is back. A la différence que les restaurants, les coiffeurs, les théâtres, eux, sont toujours bien ouverts et que les citoyens ayant obéi à l’intimation vaccinale peuvent continuer de s’y rendre.
Résultat: une tranche non négligeable de la population autrichienne est désormais réduite à sa seule force de travail, tandis que les bons élèves pourront acheter leurs cadeaux de Noël avec du vin chaud dans les moufles sans avoir à engraisser Jeff Bezos.
Les citoyens autrichiens sont, pour la première fois depuis le début de la pandémie, en mesure de pointer le coupable du doigt. A même la rue. «Lui, il n'est pas vacciné.» Bonne ambiance. De celles qui consistent à dire «Partez devant, je vais vous ralentir».
Le chancelier s'est défendu bec et ongles de vouloir diviser son pays en deux. Mais ce qui ressemble de loin à une punition est bel et bien une punition. Et le peuple autrichien en est furieusement conscient, lui qui manifeste dans les rues depuis le début de la semaine.
Enfermer les citoyens parce qu'ils sont «coupables» de naïveté immunologique, c'est faire preuve de naïveté démocratique. Et nul besoin d'être farouchement anti-vaccin pour le regretter. Une décision qui, même en cas de rebond miracle du taux de vaccination autrichien, ne sera rien d'autre qu'un coup de canif dans l'éthique.
«Sortons de la pandémie ensemble», scandait Guy Parmelin en lançant la «Semaine de la vaccination en Suisse». En Autriche, se serrer les coudes, c'est terminé. Le concept de solidarité contre le Covid-19 a sauté avec ce confinement des derniers réfractaires. Certes, la vaccination est une arme fiable et capitale pour combattre le virus. Mais l'éthique et la solidarité lui permettent de maintenir un pays en paix.
Lundi, le gouvernement autrichien n'a pas seulement tenté de freiner la flambée (dramatique) des cas. Il a donné du fuel à une colère qui, si elle ne se justifiera jamais, ne se contient plus. Dans une Europe où les politiciens, les scientifiques et les journalistes, aussi en Suisse romande, sont menacés de mort. Punir les citoyens non vaccinés en les assignant, eux seuls, à résidence, c'est aussi les assigner officiellement à résistance.