Selon une étude, l'incontinence féminine est le sujet tabou numéro 1 en Suisse. Ainsi, une femme sur cinq ne parlerait à personne des faiblesses de sa vessie. Et, dans certains cas, ce n'est peut-être pas la vessie le problème, mais bien le périnée. Une élue lausannoise est formelle: on n'en parle pas assez.
D'après la socialiste Onaï Reymond, il est temps de s'intéresser d'un peu plus près à la santé pelvienne. C'est ce qu'elle demande dans un récent postulat. Son but? Briser le tabou autour du périnée et demander une meilleure prise en charge.
Pour y remédier, le postulat demande entre autres qu'une vaste campagne d'information soit lancée. «Certaines femmes n’ont jamais entendu parler du périnée. Pourtant, il a été constaté que la prévention et la prise en charge par une physiothérapie de rééducation agissent conséquemment sur les problèmes pelviens et permettent d’éviter des opérations beaucoup plus conséquentes», rapporte Onaï Reymond.
Pour y voir plus clair, watson a posé quelques questions à Solen Duclos, physiothérapeute spécialisée en urogynécologie, qui prend notamment en charge la rééducation périnéale. 👇
Solen Duclos: «Le périnée, c'est tout simplement un ensemble de muscles qui maintiennent nos organes internes. C’est une sorte de hamac musculaire, qui soutient notamment la vessie, le vagin, l'utérus et le système ano-rectal. Sa fonction, c'est de soutenir ces organes et d'aider à leur bon fonctionnement. C'est important de ne pas endommager son périnée pour éviter des problèmes comme des fuites urinaires et prolapsus.»
Solen Duclos. «L’incontinence urinaire est significative d’une problématique périnéale; il faut en parler avec un médecin le plus vite possible, car plus la prise en charge est rapide, plus il y aura de bons résultats. On imagine souvent que cela n'arrive qu'au moment de la grossesse, de la ménopause ou avec l’âge, pourtant cela touche aussi énormément de jeunes femmes. Notamment les femmes sportives, qui pratiquent des sports avec rebonds (course à pied, handball). C'est quelque chose qui se travaille et se corrige avec un thérapeute spécialisé. À mon avis, on parle encore trop peu des prolapsus et des troubles sexuels. En effet, le périnée permet de maintenir les organes à leur place, son usure ou sa faiblesse peut entrainer une descente de ses organes (utérus, rectum, vessie) dans le vagin. Cela entraine diverses gênes: une pesanteur, une boule que l’on ressent et cela peut aussi avoir des conséquences sur la sexualité.»
Solen Duclos: «On parle souvent de muscler son périnée, mais à mon sens, ce n'est pas forcément ça qui est important. Il y a plusieurs raisons qui font qu'un périnée est très ou trop peu tonique: les pratiques sportives, le travail et les habitudes de vie y contribuent de diverses manières. D’où l’importance d’un bilan périnéale permettant de cibler les besoins selon chacune. Si un périnée est hyper musclé, il faut apprendre à le relâcher. Ce qui est important, à mon sens, c'est la prévention. Toutes les femmes ont cette zone de faiblesse, donc c'est capital de savoir comment éviter des lésions pour plus tard, pas que pour la grossesse ou l'après-grossesse, mais pour toute notre vie de femme.»
Solen Duclos: «Il faut absolument éviter les pressions répétées sur ce muscle. Par exemple, il faut faire attention aux charges lourdes. Lorsque l'on doit soulever quelque chose de lourd, il faut garder le dos droit, souffler et verrouiller le périnée avant et pendant l'effort. Il faut aussi éviter les sports à hyperpression, telles que les abdominaux type crunch. Si on aime la course à pied, il faut penser à courir sur un sol plus souple que le béton par exemple et choisir des chaussures avec un bon amorti.»
Solen Duclos: «De manière générale, on parle très peu du périnée, surtout avant la grossesse. Souvent, les femmes viennent me voir après avoir accouché pour faire une rééducation périnéale. Mais, là encore, elles ne le font pas systématiquement. Le manque d’information crée des incertitudes et chacun fait comme il pense. Certaines patientes attendent la fin des grossesses pour venir ou attendent que les gênes soient très intenses pour consulter. C’est dommage. Mon travail permet au contraire d’aider à un prochain accouchement et/ou de récupérer après celui-ci.»
Solen Duclos: «Le périnée joue un rôle important et permet d'améliorer les rapports sexuels. Quand on connait ce muscle et qu'on est capable de le contracter pendant l'acte, on peut augmenter le plaisir, surtout pour monsieur. Les femmes qui ont un périnée relâché ressentent moins la pénétration. Savoir comment le contracter peut donc aussi améliorer leur sexualité. Mais cela dépend du périnée de chaque femme.»