«Jour|nuit», «Beyoncé|Rihanna», «Hachis parmentier|Guy Parmelin»: voilà quelques exemples de questions qui pourraient se retrouver dans une interview Fast and Furious de Konbini:
C'est rapide, un peu voyeur, marrant, rythmé et il faut faire un choix binaire puis le justifier en deux phrases: ça cartonne, puisque c'est formaté pour nos algorithmes et notre court cycle d'attention (vous êtes encore là?).
Dès lors, pas étonnant que le format soit repris à la sauce «bien de chez nous, ou bien». C'est notamment ce qu'a fait le quotidien 24heures, avec les candidates et candidats aux prochaines élections vaudoises.
En effet, les 13 papables sont soumis à une série de questions pour en apprendre «sur les personnalités en lice», malgré «les clivages politiques traditionnels [qui] se font jour».
Dans une volonté d'investigation journalistique, j'ai regardé toutes les vidéos…
Toutes.
TOUTES.
TOUUUUTES!
(Vous me devez 32min16s de vie).
Mais ce n'est pas tout. Dans une volonté d'investigation journalistique sérieuse, j'ai fait un tableau comparatif de toutes les réponses des candidat·e·s.
Toutes.
TOUTES.
(À) TOUUUUUTES!
Le tableau est disponible sur Google Drive, pour celles et ceux que cela intéresse.
De rien.
Et c'est là que le titre de cet article va enfin prendre son sens (les chroniqueurs sont comme les chats, ils dorment beaucoup et ils retombent toujours sur leurs pattes).
En effet, on constate qu'à la question: «Dry January|Spritz», deux candidates de gauche ont préféré le Spritz. Alors qu'à droite, la réponse est majoritairement (deux fois sur trois) «Dry January».
Mais, dans ces cas-là, le Dry January n'était pas toujours opposé au Spritz (il y a aussi eu la question «Dry January|Gin Tonic»).
Alors évidemment, il y a un biais et il aurait été plus juste de titrer «Le Dry January, c'est de droite?», mais c'était moins catchy, puisque nous sommes en février.
Et ce n'est pas si grave, parce que les équipes de 24heures n'ont pas non plus poussé la rigueur journalistique trop loin. Mais on apprend quand même de ces trucs…
Si le quotidien vaudois n'avait pas remarqué que dans Infotainment, il y avait info, le lecteur averti notera qu'il y a une certaine paresse intellectuelle dans les couloirs de la rédaction.
Sur le plan politique, on n'apprend rien (à droite on veut baisser les impôts, à gauche on est team Mormont, contre Holcim… WOW!) et surtout on ne peut rien apprendre, puisqu'il n'y aucune systématique dans les questions.
Sur le plan personnel non plus, aucune surprise : des adultes vaudois préfèrent le chasselas à la vodka… WOW!
Aucune surprise donc, et surtout assez peu d'intérêt: que peut-on déduire de quelqu'un qui préfère Wawrinka à Federer?
À la limite, il aurait fallu vraiment assumer le côté personnel. Et poser des questions qui permettent de réellement connaître nos politiciennes et politiciens:
À défaut d'un entre-deux, 24heures aurait dû faire un choix (éditorial) clair. Un peu comme dans une interview de 24heures, en fait.
Suite au refus de l'aide aux médias, son rédacteur en chef s'inquiétait de la hausse du prix du papier.
Et nous avec: à défaut d'écrire des conneries sur ces élections, 24heures en filme et il ne faudrait pas qu'il ne reste plus que leurs vidéos.
Ces interviews «ça ou ça» – entre opinions politiques et goûts personnels – pourraient toutefois soulever une question intéressante: est-ce que tout est politique?
Une question qui demande une rigueur journalistique que nous n'avons peut-être pas en Suisse romande (?).
En conclusion, et pour en revenir à la question en titre, je ne crois pas que le Spritz soit de gauche. Et je ne vais pas déranger un·e expert·e pour en être sûr.
Si vous souhaitez analyser plus en détail les réponses des candidat·e·s à l'élection vaudoise pour le savoir:
Parce que toutes ces réponses sont au premier degré. Chose que l'on pourrait reprocher aux personnes interrogées, mais ce serait oublier qu'une question inutile donne rarement une réponse cruciale.
(Ah oui… Cette chronique est postée sur watson.ch, entre une vidéo Battle sur le bonnet en intérieur et un article sur la femme qui a le plus gros derrière du monde. Ne me demandez pas de me justifier, je n'ai aucun argument pour défendre ce paradoxe. À part peut-être les mots d'Orelsan: «Quelle époque, mes aïeux, quelle époque.»)