Mercredi, à Giswil, sur le lac de Sarnen, on pagayait pour rejoindre son domicile. Jeudi, les chemins riverains le long de l'Aar et autour du lac de Bienne étaient encore inondés à de nombreux endroits et celui de Neuchâtel grimpait toujours. D'une manière générale, il vaut mieux enfiler des bottes hautes en caoutchouc pour promener son toutou.
La situation est sérieuse: les crues du lac de Bienne et de l'Arve, qui se jette dans le Rhône dans le bassin genevois, ont atteint le niveau de danger 4 sur 5. Le système de l'Aar est soumis à une pression particulièrement forte, comme l'écrit l'Office fédéral de l'environnement (Ofev). Mais grâce à la régulation des débits des lacs de Thoune et de Bienne, le niveau de danger 2 (modéré) n'a pas été dépassé en Argovie.
A Bienne, le lac a débordé, ce qui est exceptionnel durant la saison d'hiver, comme l'indique l'Ofev:
Pour le lac de Bienne, le maximum de décembre de l'année 1992 a été dépassé de près d'un mètre. Les lacs de Bienne et de Thoune sont particulièrement touchés, car dans le grand bassin versant comprenant l'Oberland bernois et le Jura, normalement il neige à cette période de l'année et les précipitations ne s'écoulent pas.
Mais le dégel de Noël a fait fondre la neige jusqu'à 2000 mètres d'altitude. Au début, le manteau neigeux pouvait encore stocker l'eau de pluie aux altitudes inférieures, mais une fois la neige complètement détrempée, une grande quantité d'eau s'est écoulée. Heureusement, la limite du zéro degré redescend. Mercredi, elle se situait à 1200 mètres, et jeudi, elle descendra même à 700 mètres, comme l'explique Regula Keller de Météo Suisse.
L'Ofev estime également que le niveau maximum du lac de Bienne a été atteint mercredi et que le niveau va maintenant baisser lentement. Les niveaux de la plupart des rivières sont également en baisse. La situation est différente pour les grands lacs et leurs débits, comme le Léman, le lac de Constance et le Rhin: selon l'Ofev, les niveaux maximums seront atteints au plus tôt jeudi, voire plus tard.
A la limite des chutes de neige élevée s'est ajouté un facteur provenant de l'Atlantique: de l'air très doux est arrivé en Suisse pendant plusieurs jours.
Cela a pour conséquence que l'air est plus chaud que d'habitude et peut ainsi absorber plus d'humidité.
Actuellement, le danger d'avalanche est toujours élevé sur la crête nord des Alpes et dans l'extrême ouest du Bas-Valais. Pour les amateurs de sports d'hiver, la situation reste ambiguë: certes, au-dessus de 2000 mètres, il y a deux fois plus de neige que d'habitude et, selon le WSL Institut pour l'étude de la neige et des avalanches SLF, beaucoup de neige entraîne généralement une constitution favorable du manteau neigeux.
Mais là où la pluie a ramolli la neige, des cristaux anguleux se forment et entraînent des points faibles, explique Benjamin Zweifel du SLF. Cela est pertinent pour les amateurs de sports d'hiver en dehors des pistes, en particulier dans les régions moins enneigées où les zones fragiles ne sont pas recouvertes par beaucoup de neige.
Les pluies prolongées pendant la saison fraîche ont un avantage: une grande partie de l'eau s'infiltre sous forme de nappe phréatique. Contrairement à l'été, la pluie n'est pas immédiatement absorbée par les plantes ou les sols secs ou ne s'évapore pas. Les pluies hivernales sont donc particulièrement importantes pour faire remonter le niveau des nappes phréatiques. Mais celles-ci ne réagissent que lentement: selon l'Ofev, la majorité des nappes phréatiques du nord des Alpes présentent actuellement un niveau normal à élevé.
En Suisse, 80% de l'eau potable provient des eaux souterraines, qui constituent donc un réservoir important. Jusqu'à présent, il n'a pas été fondamentalement menacé par le changement climatique. Certes, les réservoirs proches de la surface se vident de manière dramatique en période de chaleur et l'eau vient à manquer, mais plus l'eau souterraine se trouve en profondeur, plus elle y reste longtemps: des années, voire des décennies.
Pour autant qu'il y ait suffisamment de précipitations au cours d'une année, la nappe phréatique se remplit toujours à nouveau. L'Ofev écrit:
Avec le changement climatique, on s'attend justement à davantage de précipitations en hiver. Les fortes pluies en peu de temps sont toutefois problématiques, car beaucoup d'eau s'écoule alors en surface au lieu de s'infiltrer.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)