Plus personne n'a envie de rire: ni Ertan Wittwer, le fondateur de Bestsmile, ni Migros, qui avait repris la totalité des cabinets dentaires en 2022, ni les collaborateurs de Bestsmile, qui ont perdu leur emploi. Les centres de soins ont tous été fermés jusqu'au 31 janvier 2025, l'entreprise est liquidée, tous les efforts pour trouver une solution à l'amiable ont échoué.
La suite se jouera désormais au tribunal. Selon notre enquête, Migros a déposé une plainte de droit civil contre l'homme d'affaires et les deux autres cofondateurs. «Nous ne pouvons malheureusement pas nous prononcer sur une procédure en cours», déclare la porte-parole du distributeur, Prisca Huguenin-dit-Lenoir, confirmant ainsi indirectement l'information. Qui insiste: «Pour des raisons juridiques», Migros ne peut «pas donner d'autres indications».
Ertan Witter réagit, lui, avec surprise. C'est la première fois qu'il prend position de manière détaillée dans le conflit qui couve depuis longtemps. Celui-ci avait été a été rendu public suite à une enquête. Et le directeur de l'ancienne société d'ajouter:
L'aventure Bestsmile a débuté fin 2019 pour le distributeur. Il a d'abord pris une petite participation dans l'entreprise fondée en 2018 par Wittwer, Philip Magoulas et Marcel Kubli. Cela s'est fait via Sparrow Ventures, également liquidée depuis. Au printemps 2022, Migros a repris les cabinets à son seul compte. Ertan Wittwer était le seul des trois associés encore à bord, un peu comme un membre du conseil d'administration.
Aucune des parties ne veut divulguer le montant du rachat. Les observateurs du marché l'estiment à environ 100 millions de francs. Un prix clairement surfait, selon eux. Certains n'hésitent pas à affirmer que le distributeur s'est laissé rouler dans la farine.
Aujourd'hui, Migros ne veut plus s'exprimer sur le cas. De son côté, Wittwer souligne en revanche que son entreprise était «florissante au moment de la vente». Elle avait généré 50 millions de chiffre d'affaires et atteint la rentabilité. Dans un premier temps, Migros aurait voulu à tout prix prendre le contrôle de Bestsmile, puis la capacité de diriger l'entreprise aurait fait défaut.
Selon nos recherches, les «incohérences» mentionnées à la base par Migros concernent des normes comptables différentes. Celles-ci auraient été appliquées lors du bouclement annuel, peu avant la vente. En résumé, le distributeur pense que les vendeurs ont gonflé le chiffre d'affaires et donc le bénéfice juste avant le calcul de la transaction, ce qui s'est finalement traduit par un prix d'achat trop élevé. Ce que les principaux intéressés contestent, là encore.
«L'année dernière, au vu de ces reproches, nous avons procédé à une nouvelle analyse indépendante des comptes révisés en bonne et due forme par BDO», assure aujourd'hui Ertan Wittwer. BDO est la société d'audit mandatée par Bestsmile.
De plus, Migros avait une co-responsabilité dans la conclusion de l'affaire pendant et après l'achat «par le biais de son représentant au conseil d'administration». En effet, le patron de Sparrow, Lorenz Lüchinger, siégeait depuis 2019 au conseil d'administration de Bestsmile.
«Lors de l'acquisition des actions, il y avait une transparence totale sur tous les chiffres et Migros a également fait une due diligence détaillée», explique là encore Ertan Wittwer. Autrement dit, un contrôle de vigilance.
En définitive, il ne s'agit plus que d'argent, quand bien même on ne sait pas encore de quelle somme il sera question. Ce qui est sûr en revanche, c'est que les parties au litige ne sont pas parvenues à un accord à l'amiable. La justice tranchera.
(Traduit de l'allemand par Valentine Zenker)