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Suisse: Migros essuie un nouvel échec avec Sparrow Ventures

Migros essuie un échec

Avec Medbase, Migros a mis un pied dans le secteur de la santé. Mais tout ce qui a trait à ce secteur n'est pas forcément sain pour les affaires, comme le montre le cas d'une start-up en vogue.
16.02.2024, 07:3429.08.2024, 15:19
Dr. Mario Irminger et le Dr. Ursula Nold reçue au cabinet Migros.
Le «Dr.» Mario Irminger, patron du géant orange et la «Dre». Ursula Nold, sa présidente, vous reçoivent dans le «cabinet Migros» (image d'illustration).Image: ch-media
Florence Vuichard / ch media
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Les débuts étaient plutôt modestes. Lorsque Migros a rejoint Medbase, en 2010, l'entreprise de santé ne comptait que sept sites et environ 150 employés. Le groupe est ensuite devenu le plus grand fournisseur de soins médicaux de base en Suisse. Il emploie désormais près de 4000 collaborateurs, exploite 69 centres de santé, quatre centres de radiologie, 58 pharmacies et 42 centres dentaires dans toute la Suisse – et fait entrer des revenus non négligeables dans les caisses de Migros.

Si le géant orange ne donne pas de chiffres précis, il souligne néanmoins que «Medbase est rentable dans tous les domaines d'activité». Plusieurs personnes bien informées ont confié à CH Media qu'il s'agirait de plusieurs dizaines de millions. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que Medbase a survécu aux récentes turbulences de Migros.

Le secteur «Santé et bien-être» de Migros continue donc d'être l'un des quatre domaines d'activité stratégiques du groupe, selon Ursula Nold, présidente, et Mario Irminger, chef du géant orange. Et ce, bien que son ancien promoteur, l'ancien patron et véritable locomotive dans le domaine de la santé, Fabrice Zumbrunnen, soit parti depuis presque un an.

Au feu la maison brûle

Un deuxième indice de la satisfaction des instances supérieures de Migros à l'égard de Medbase est le simple fait que le dirigeant de l'entreprise de santé, Marcel Napierala, soit toujours confortablement installé dans son fauteuil de direction après toutes ces années passées dans l'entreprise.

En effet, les changements de personnel à la tête de la société sont généralement de bons indicateurs de turbulences, comme le montre le regard porté sur la grande coopérative régionale Migros Aar, qui s'étend sur Argovie, Berne et Soleure. Après le départ forcé du chef de la coopérative Anton Gäumann, en novembre 2021, une grande partie de la direction a été renouvelée. Le dernier changement en date est celui du président.

Dans la coopérative Neuchâtel-Fribourg également, tout le conseil d'administration a changé suite à la lutte de pouvoir épuisante entre la centrale Migros et le président régional de longue date Damien Piller.

Un pole d'innovation qui ferme

Un cas retient l'attention. La majeure partie de l'équipe de Sparrow Ventures a disparu. En octobre dernier, Migros a, en effet, fermé ce pôle d'innovation fondé en 2018. Il se composait d'un petit groupe d'une quarantaine de personnes qui maîtrisaient le jargon des start-up, majoritairement anglais, qui voyageaient volontiers chez Google dans la Silicon Valley et qui ne voulaient pas du tout s'intégrer dans l'environnement du commerce de détail. La décision de fermer Sparrow Ventures a d'ailleurs été bien accueillie par l'équipe du géant orange.

Si l'aventure avec Sparrow Ventures a été écourtée, elle coûte désormais cher à Migros. C'est surtout son engagement dans la célèbre entreprise Bestsmile qui pèse sur les comptes – et qui constitue une partie des corrections de valeur de 500 millions de francs que l'entreprise suisse a dû annoncer début février, selon les recherches révélées par CH Media. Migros ne veut ni confirmer ni infirmer cette information. Toutefois, d'après son porte-parole Marcel Schlatter, les dépréciations de 500 millions se composent comme suit:

  • Immobilier: 200 millions de francs
  • Projets informatiques: 80 millions de francs
  • Marchés spécialisés: 80 millions de francs
  • Prêt Globus: 15 millions de francs
  • Domaines divers: 125 millions de francs

Il est tout à fait plausible qu'une partie des 125 millions de francs, alloué aux domaines divers et dont le montant n'a pas été précisé, revienne à Bestsmile. Quoi qu'il en soit, l'entreprise suisse est en train de réduire les activités de l'entreprise dentaire puisque 36 des 330 collaborateurs ont perdu leur emploi et quart des 36 magasins actuels est fermé. Soleure, Thoune, Bienne, Morges, Yverdon, Bellinzone, Nyon, Schaffhouse et Zurich Enge ont ainsi été rayés de la liste.

Migros a constaté des «incohérences» chez Bestsmile

Bestsmile a été fondé en 2018 par Ertan Wittwer, Philip Magoulas et Marcel Kubli. Au début, l'offre comprenait des appareils dentaires transparents qui devaient corriger la position des dents en quelques mois. Migros est entrée au capital dès la fin 2019 et a repris l'entreprise dans son intégralité au printemps 2022. En contrepartie, les trois fondateurs se sont retirés. Seul Ertan Wittwer, une star dans le monde des start-up, est resté à bord en tant que membre du conseil d'administration jusqu'à l'été 2023.

Sparrow Ventures a justifié son investissement a posteriori, premièrement parce que Bestsmile promettait des traitements orthodontiques à un prix très compétitif. Et deuxièmement, parce qu'ils étaient «totalement convaincus par les fondateurs, par leur motivation, leur ambition et leur expérience. Nous sommes heureux d'être à bord en tant que partenaires.»

Les réjouissances ont été de courte durée, et pas seulement parce que l'équipe de la start-up est partie à Migros. Il semblerait que des chiffres erronés ont été présentés lors de l'achat de Bestsmile. On s'est fait rouler dans la farine, entend-on de la part des initiés. Le porte-parole de Migros déclare, d'ailleurs, à ce sujet que:

«Dans le cadre de la vérification du rapport d'activité 2021 de Bestsmile, des incohérences ont été constatées à l'automne 2023»

Des clarifications sur ces événements ont été entreprises «dès qu'ils ont été connus», dit Marcel Schlatter. Ce dernier se refuse à tout commentaire supplémentaire. On ne saura pas non plus si Migros envisage d'agir par voie juridique contre les responsables de ces «incohérences».

Intégration de Wepractice à Medbase

Le cas Bestsmile montre que tout ce qui touche à la santé n'est pas forcément bon pour les affaires. Entre-temps, Migros a également mis un terme aux plans d'expansion à coups de millions de Wepractice, un autre projet de Sparrow Ventures. L'offre d'espace co-working pour les psychothérapeutes sera supprimée en mai 2024. Wepractice doit en revanche continuer à exister et fait désormais partie du groupe Medbase. La psychothérapie est, en fin de compte, un pilier essentiel des soins intégrés, explique le porte-parole de Migros. Wepractice n'est toutefois plus un réseau pour psychologues indépendants, mais un réseau pour thérapeutes salariés.

L'entreprise n'est pas un cas isolé. Au fil des ans, de nombreuses autres sont venues s'ajouter à Medbase, comme les centres de santé Santémed, qui appartenaient auparavant à la caisse maladie Swica, la Permanence à la gare de Zurich, plusieurs pharmacies ainsi que, il y a environ un an, pour 360 millions de francs, l'activité suisse de la pharmacie en ligne Zur Rose avec son commerce de gros de médicaments, ses offres en ligne et une base logistique.

Désormais, Medbase englobe la majeure partie de l'offre de santé du groupe de commerce de détail. Mais Migros n'en a sans doute pas fini pour autant.

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