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Politique

Interdire le Hezbollah? La Suisse «peut abîmer sa neutralité»

epa11405815 Hezbollah fighters carry the coffin of late Hezbollah senior commander Taleb Sami Abdallah during a funeral procession in Beirut, Lebanon, 12 June 2024. According to the Hezbollah media of ...
L'enterrement au Liban du commandant du Hezbollah Taleb Sami Abdallah, tué par une frappe israélienne en juin dernier.Keystone

La Suisse pourrait «abîmer sa neutralité» en interdisant le Hezbollah

La Suisse doit-elle interdire le Hezbollah? Le PLR, le Centre et le Parti socialiste sont pour. L'UDC est divisée. Certains membres pourraient même se rallier à la position... des Verts. On fait le point.
15.10.2024, 16:5015.10.2024, 18:43
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Le Hamas et le Hezbollah doivent-ils être interdits en Suisse? La commission de politique de sécurité du Conseil des Etats a déposé une motion demandant l'interdiction du Hezbollah. Elle fait suite à un objet distinct du Conseil fédéral en septembre, demandant l'interdiction du Hamas. Le Parlement devrait croiser le fer lors de la session parlementaire de décembre prochain.

Les condamnations sont claires du côté du Parti-libéral radical (PLR) et du Centre. Contactés, les secrétariats des deux partis dominant le Conseil des Etats se prononcent clairement pour une interdiction du Hamas en Suisse. Pour le Hezbollah, les discussions sont en cours, mais elles penchent déjà dans une direction:

«Il nous parait évident que le Hezbollah doit être traité de façon similaire que le Hamas»
Arnaud Bonvin, porte-parole du PLR

L'UDC divisée

C'est plutôt du côté de l'UDC que des divisions se font sentir. Sur le Hamas, le parti renvoie à une prise de position ferme datant de mai dernier. Mais les discussions n'ont pas encore atteint de consensus concernant le Hezbollah. Dans le 19.30 de la RTS, le point de vue du Fribourgeois Pierre-André Page était clair:

«Je suis favorable à interdire le Hezbollah, une organisation reconnue comme terroriste par de nombreux pays. Et les terroristes, on ne doit pas les soutenir»
Pierre-André Page (UDC/FR)
Pierre-Andre Page, SVP-FR, spricht waehrend der Debatte um die Legislaturplanung 2023-2027, waehrend einer Sondersession des Nationalrats, am Dienstag, 16. April 2024, im Nationalrat in Bern. (KEYSTON ...
Pierre-André Page (UDC/FR)Keystone

Ce lundi, le secrétariat du parti agrarien nous a pourtant renvoyé vers Jean-Luc Addor, conseiller national valaisan membre de la commission de politique de sécurité du Conseil national. Mais ses dires ne sont pas les mêmes que ceux de son confrère fribourgeois:

«Je suis plus réservé quant à une interdiction du Hezbollah qu'un certain nombre de collègues du parti, qui y sont favorables»
Jean-Luc Addor (UDC/VS)
Jean-Luc Addor, SVP-VS, spricht waehrend der Herbstsession der Eidgenoessischen Raete, am Donnerstag, 19. September 2024 im Nationalrat in Bern. (KEYSTONE/Anthony Anex)
Keystone

«Le débat sera peut-être assez compliqué au sein de l'UDC», avoue le Valaisan. Il déroule: «L'interdiction du Hamas est déjà en projet et je crains qu'on ne s'embarque dans un engrenage.»

«La Suisse pourrait finir par y abîmer sa neutralité et sa capacité à entretenir de bons offices»
Jean-Luc Addor, conseiller national (UDC/VS)

Pour le Saviésan, «au-delà d’une action déclamatoire et symbolique de soutien à Israël, de quoi s’agit-il?» Car le critère qui réunit les deux organisations, «outre le fait qu'elles soient islamistes, c’est qu’elles sont aux prises avec Israël», estime-t-il. Et de lâcher:

«Est-ce suffisant pour sortir tout l’arsenal parlementaire à disposition? Je n’en suis pas si sûr»
Jean-Luc Addor (UDC/VS)

Neutralité et impartialité

Chose étonnante, une partie de l'argumentaire de Jean-Luc Addor rejoint celui de l'un de ses rivaux politiques à Berne: le Vert genevois Nicolas Walder, qui estime lui aussi qu'un «risque pour notre neutralité et impartialité» est présent.

«Une interdiction du Hezbollah et du Hamas va trop loin. Elle pourrait même s'avérer être un autogoal pour la Suisse»
Nicolas Walder (Verts/GE)
Nicolas Walder, GP-GE, kommentiert den Aussenpolitischen Bericht 2023, an der Herbstsession der Eidgenoessischen Raete, am Montag, 9. September 2024 im Nationalrat in Bern. (KEYSTONE/Alessandro della  ...
Keystone

Une position de gauche opposée à celle du Parti socialiste (PS), qui explique avoir «soutenu en commission une interdiction du Hamas», tout en insistant sur le fait que «cela ne doit pas entraver les efforts de la Suisse en matière de paix et d’engagement humanitaire au Proche-Orient». Il examinera l'interdiction du Hezbollah «avec attention lors des discussions parlementaires».

Nicolas Walder tient toutefois à indiquer que «les Verts ont soutenu depuis bien avant le 7 octobre 2023 l’adoption par la Suisse de sanctions économiques contre les mouvements ou gouvernements qui violent le droit international, en particulier humanitaire».

«Cela va des gardiens de la révolution en Iran, aux colons israéliens violents en passant par les branches armées du Hamas et du Hezbollah»
Nicolas Walder (Verts/GE)

Il ajoute par ailleurs que, dans le cadre politique international actuel, «une interdiction du Hezbollah pourrait être considérée comme une immixtion dans les affaires politiques d'un Etat tiers».

«Le Hezbollah, que cela nous plaise ou non, est un parti politique libanais»
Nicolas Walder (Verts/GE)

Si Jean-Luc Addor constate le caractère terroriste du côté du Hamas, notamment avec les attentats du 7 octobre, il estime que l'importance politique du Hezbollah ne doit pas être sous-estimée. «C'est une organisation structurée et active politiquement au Liban qui dispose d’une armée quasi-régulière.» Et s'il reconnaît qu’elle «lance périodiquement des roquettes sur Israël», il s'interroge:

«Est-on encore dans le schéma du terrorisme ou s’agit-il d’actes militaires?»
Jean-Luc Addor (UDC/VS)

Un point de vue opposé, par exemple, à celui du PLR, qui ne considère pas le Hezbollah comme faisant partie intégrante de l'Etat libanais:

«La neutralité ne s'est jamais appliquée à l'égard de mouvement terroristes. Elle s'applique entre Etats. Il n'y a donc aucun problème à ce niveau là»
Arnaud Bonvin, porte-parole du PLR
Faut-il interdire le Hamas et le Hezbollah en Suisse?

Un danger pour la sécurité intérieure helvétique?

Nicolas Walder assure d'ailleurs que «ni le Hamas, ni le Hezbollah ne présentent actuellement un danger pour la sécurité intérieure de notre pays». Jean-Luc Addor se demande également «quelles sont les raisons de penser que le Hezbollah est actif en Suisse», tout en soulignant:

«En Allemagne, le Hezbollah a été interdit en 2020, avec quels résultats?»
Jean-Luc Addor (UDC/VS)

«Je n’ai aucune sympathie pour ces mouvements islamistes», tient à noter Jean-Luc Addor. «Je fais partie de ceux qui pensent que l’islamisme et l’islam sont un danger pour l’Europe.»

«Mais je me demande quel est l’intérêt de la Suisse dans cette interdiction»
Jean-Luc Addor (UDC/VS)

Quant à Nicolas Walder, il se veut pragmatique et se projette après la terrible guerre qui secoue le Proche-Orient. Il estime tout d'abord que «la recherche d'un cessez-le-feu» devra comprendre «une discussion avec toutes les parties». Il se demande aussi comment «financer la reconstruction nécessaire dans la bande de Gaza et au Liban».

«Personne ne peut dire aujourd'hui si le Hamas et le Hezbollah joueront un rôle à l'avenir. Si c'est le cas, la Suisse se sera mise elle-même hors-jeu»
Nicolas Walder (Verts/GE)
Voilà à quoi ressemblerait la maison d’un haut dirigeant du Hamas
Video: watson
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