Le Hamas et le Hezbollah doivent-ils être interdits en Suisse? La commission de politique de sécurité du Conseil des Etats a déposé une motion demandant l'interdiction du Hezbollah. Elle fait suite à un objet distinct du Conseil fédéral en septembre, demandant l'interdiction du Hamas. Le Parlement devrait croiser le fer lors de la session parlementaire de décembre prochain.
Les condamnations sont claires du côté du Parti-libéral radical (PLR) et du Centre. Contactés, les secrétariats des deux partis dominant le Conseil des Etats se prononcent clairement pour une interdiction du Hamas en Suisse. Pour le Hezbollah, les discussions sont en cours, mais elles penchent déjà dans une direction:
C'est plutôt du côté de l'UDC que des divisions se font sentir. Sur le Hamas, le parti renvoie à une prise de position ferme datant de mai dernier. Mais les discussions n'ont pas encore atteint de consensus concernant le Hezbollah. Dans le 19.30 de la RTS, le point de vue du Fribourgeois Pierre-André Page était clair:
Ce lundi, le secrétariat du parti agrarien nous a pourtant renvoyé vers Jean-Luc Addor, conseiller national valaisan membre de la commission de politique de sécurité du Conseil national. Mais ses dires ne sont pas les mêmes que ceux de son confrère fribourgeois:
«Le débat sera peut-être assez compliqué au sein de l'UDC», avoue le Valaisan. Il déroule: «L'interdiction du Hamas est déjà en projet et je crains qu'on ne s'embarque dans un engrenage.»
Pour le Saviésan, «au-delà d’une action déclamatoire et symbolique de soutien à Israël, de quoi s’agit-il?» Car le critère qui réunit les deux organisations, «outre le fait qu'elles soient islamistes, c’est qu’elles sont aux prises avec Israël», estime-t-il. Et de lâcher:
Chose étonnante, une partie de l'argumentaire de Jean-Luc Addor rejoint celui de l'un de ses rivaux politiques à Berne: le Vert genevois Nicolas Walder, qui estime lui aussi qu'un «risque pour notre neutralité et impartialité» est présent.
Une position de gauche opposée à celle du Parti socialiste (PS), qui explique avoir «soutenu en commission une interdiction du Hamas», tout en insistant sur le fait que «cela ne doit pas entraver les efforts de la Suisse en matière de paix et d’engagement humanitaire au Proche-Orient». Il examinera l'interdiction du Hezbollah «avec attention lors des discussions parlementaires».
Nicolas Walder tient toutefois à indiquer que «les Verts ont soutenu depuis bien avant le 7 octobre 2023 l’adoption par la Suisse de sanctions économiques contre les mouvements ou gouvernements qui violent le droit international, en particulier humanitaire».
Il ajoute par ailleurs que, dans le cadre politique international actuel, «une interdiction du Hezbollah pourrait être considérée comme une immixtion dans les affaires politiques d'un Etat tiers».
Si Jean-Luc Addor constate le caractère terroriste du côté du Hamas, notamment avec les attentats du 7 octobre, il estime que l'importance politique du Hezbollah ne doit pas être sous-estimée. «C'est une organisation structurée et active politiquement au Liban qui dispose d’une armée quasi-régulière.» Et s'il reconnaît qu’elle «lance périodiquement des roquettes sur Israël», il s'interroge:
Un point de vue opposé, par exemple, à celui du PLR, qui ne considère pas le Hezbollah comme faisant partie intégrante de l'Etat libanais:
Nicolas Walder assure d'ailleurs que «ni le Hamas, ni le Hezbollah ne présentent actuellement un danger pour la sécurité intérieure de notre pays». Jean-Luc Addor se demande également «quelles sont les raisons de penser que le Hezbollah est actif en Suisse», tout en soulignant:
«Je n’ai aucune sympathie pour ces mouvements islamistes», tient à noter Jean-Luc Addor. «Je fais partie de ceux qui pensent que l’islamisme et l’islam sont un danger pour l’Europe.»
Quant à Nicolas Walder, il se veut pragmatique et se projette après la terrible guerre qui secoue le Proche-Orient. Il estime tout d'abord que «la recherche d'un cessez-le-feu» devra comprendre «une discussion avec toutes les parties». Il se demande aussi comment «financer la reconstruction nécessaire dans la bande de Gaza et au Liban».