Les voitures et motos qui accélèrent et pétardent sont insupportables pour les riverains, surtout pendant les mois d'été, comme le confirment les corps de police. Ces derniers se déplacent régulièrement en cas de signalement et font des contrôles à des endroits stratégiques afin d'attraper, par exemple, les véhicules tunés illégalement.
Mais cela demande beaucoup d'efforts pour un impact négligeable, car c'est très compliqué de choper les chauffards après-coup.
Une solution semble désormais à portée de main: le radar à bruit. L'appareil mesure le volume sonore des usagers de la route et déclenche une photo lorsqu'un véhicule dépasse certains seuils de décibels. Grâce à la plaque d'immatriculation, la police pourrait ensuite amender le fauteur de bruit. Avec un accent sur le conditionnel...
En effet, il n'existe pas encore de bases légales en Suisse pour permettre aux polices d'agir en ce sens. Suite à une intervention parlementaire, la Confédération a toutefois mené, l'été dernier, un projet pilote à Genève. L'objectif était de tester l'utilité des radars de bruit dans la vie quotidienne, à l'aide du modèle «Hydre» français.
On a désormais les résultats du projet-pilote. Conclusion: le système est techniquement au point. Il permet «d'identifier avec précision les passages excessivement bruyants et inutilement bruyants, et donc non conformes aux prescriptions», indique le rapport commandé par l'Office fédéral de l'environnement (Ofev).
Ce constat s'applique aux situations en milieu urbain où la vitesse maximale est comprise entre 30 et 60 kilomètres par heure. Les tests ont été effectués sur quatre tronçons routiers.
Les véhicules très bruyants représentaient, selon l'endroit, entre 0,2% et 1,5% du trafic total. Si l'on prend comme référence une valeur limite de bruit de 80 décibels, entre 100 et 200 véhicules se faisaient prendre au piège des radars chaque jour sur un axe très fréquenté de Genève.
Comment se répartissaient-ils?
Le nombre élevé de motos saute aux yeux: un motard sur dix passant à proximité a été flashé lors du test à Genève. Paieront-ils l'addition en cas d'introduction des radars antibruit?
Sophie Hoehn, cheffe de la section Bruit routier de l'Ofev, relativise: «La plupart des motocyclistes se comportent correctement en évitant les pics de bruit inutiles ou en ne modifiant pas illégalement leur véhicule pour le rendre plus bruyant». La spécialiste précise encore:
En exagérant un peu, on peut aussi conduire une Harley-Davidson en silence, alors que même une petite Vespa peut faire beaucoup de bruit.
Le rapport sur le projet pilote montre, toutefois, aussi les inconvénients du radar antibruit. Ainsi, l'appareil est dépassé lorsque deux véhicules passent en même temps avec un volume sonore pratiquement identique. Dans ce cas, il ne signale pas d'infraction.
Une critique souvent formulée à l'encontre des radars antibruit concerne les anciens modèles de voitures qui ont été homologués pour des valeurs limites de bruit plus élevées et qui pourraient donc être flashés alors même qu'elles sont conduites sans faire rugir le moteur. De tels cas ne sont pas à exclure, peut-on lire dans le rapport.
Mais la police s'en apercevra lors d'un contrôle ultérieur des enregistrements photo et vidéo, dit-elle. Ce contrôle ultérieur est également nécessaire pour éviter qu'un automobiliste qui klaxonne ou une ambulance ne soit verbalisé.
Malgré un bilan positif, en Suisse, ce type de radars se heurtent encore à deux obstacles majeurs:
C'est précisément ce que demande la conseillère nationale Gabriela Suter (PS/AG) dans une motion déposée en juin. Il serait aussi nécessaire de fixer un seuil de décibels et des possibilités de sanctions au niveau de la loi.
L'étude du projet pilote genevois recommande le seuil de 82 décibels, ce qui, selon les résultats des tests, rendrait environ un véhicule sur 200 trop bruyant en zone urbaine. Pour donner un peu de contexte: à partir de 85 décibels, le bruit peut être dangereux pour la santé, et le seuil de douleur est atteint à partir de 120 décibels. Quelle valeur doit être appliquée lors une éventuelle utilisation de radars antibruit? C'est désormais aux politiques de trancher.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci