Ce lundi, la police valaisanne s'est rendue sur le glacier de Corbassière, situé sur les Hauts de la commune de Val de Bagnes. La raison, des ossements découverts dans le cadre des recherches de disparus. Un mois auparavant, les 3 août, des alpinistes trouvaient des restes humains à Saas Fee, alors que fin juillet, le glacier du Stockji rendait un autre corps. Nos montagnes sont-elles en train de devenir des cimetières à ciel ouvert? On a posé la question à Pierre Mathey, directeur de l'Association suisse des guides de montagne.
Pierre Mathey, trois découvertes d'ossements humains ont eu lieu cet été. Assiste-t-on à une hausse des cas?
Pierre Mathey: Il y a effectivement une augmentation du nombre des découvertes d'objets, de matériel et des corps qui étaient renfermés dans la glace. Il peut également s'agir d'éléments naturels, comme par exemple des blocs de rochers erratiques. Cela est dû au phénomène de la fonte des glaciers. La glace se retire et libère des objets qui y étaient ensevelis.
Comment expliquer cette hausse?
Cette situation est tout d'abord due au réchauffement climatique. Ce n'est pas nouveau: ces dernières décennies, les températures de plus en plus élevées ont accéléré la fonte des glaciers. Cela dit, il y a également un élément lié à la saison.
De quoi s'agit-il?
Cet été le temps a été particulièrement beau, chaud et sec. On a eu un nombre exceptionnel de jours de canicule, avec des températures très élevées pendant une longue période. A cause de cette situation, de plus, il n'a pas reneigé au-dessus des 3000 mètres.
Quelles sont les implications de ces découvertes?
Cela peut paraître macabre, mais retrouver ces corps est une chance. Un travail d'ADN est fait après la découverte, ce qui permet d’identifier le défunt et sa famille ou ses descendants si la personne est décédée depuis longtemps. Les proches peuvent donc avoir la confirmation que la personne est bien morte en montagne et, surtout, ils peuvent faire leur deuil.
Ces découvertes ne sont donc pas forcément négatives.
De manière générale, les glaciers sont des témoins de l'histoire. Au niveau de la glace tout d'abord, mais pas uniquement. Les glaciers renferment également des éléments liés à la vie humaine: il s'agit de vestiges archéologiques et historiques très importants, qui sont en plus très fragiles. Quand un sac, une chaussure ou un corps apparait, on a très peu de temps pour le récupérer. Une fois exposés à l'air libre, ces objets se dégradent très rapidement et on ne peut plus en faire grand-chose. Pour cette raison, les alpinistes et les professionnels sont invités à signaler tout de suite leurs découvertes, notamment auprès des polices cantonales. Cela permet aux autorités d'aller récupérer très vite ces vestiges.
La plupart des corps sont retrouvés sur les glaciers valaisans. Comment l'expliquer?
Il faut savoir qu'en Valais on trouve la plus grande concentration d'alpinistes et de guides de montagne de Suisse. Sur les glaciers valaisans, il y a donc beaucoup plus de personnes que dans d'autres endroits similaires, à Berne ou dans les Grisons. Cela a forcément une influence sur le nombre de victimes. L'altitude peut également jouer un rôle.
Lequel?
Les glaciers valaisans sont plus hauts par rapport aux autres et, donc, ils ont moins fondu jusqu'à présent. Cela expliquerait pourquoi la plupart des dernières découvertes ont eu lieu dans ce canton.