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Epilation à 50%: cette pub «maladroite» profite de l'Euro 2025

Foot féminin et épilation à 50%: cette promo de Clinik passe mal.
Cette promo, en marge de l'Euro, illustre les limites du «femvertising».Image: dr

Cette pub «un peu maladroite» profite de l'Euro féminin

A l’occasion de l’Euro féminin 2025, une clinique d’épilation laser propose 50% de rabais pour «célébrer les femmes qui bougent». Une initiative qui se veut bienveillante, mais qui questionne: peut-on vraiment saluer le sport féminin en promouvant l’épilation intégrale? Entre stratégie marketing, maladresse et féminisme à géométrie variable, décryptage d’une promo.
03.07.2025, 14:5903.07.2025, 14:59
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Alors que la Suisse accueille en ce moment l’Euro féminin 2025, une promotion signée Clinik, une chaîne spécialisée dans l’épilation laser, n’est pas passée inaperçue. L’entreprise, présente presque partout en Suisse romande, a lancé une «offre sensationnelle» pour «célébrer toutes les femmes qui font du sport, s’engagent, bougent et inspirent».

A la clé: 50% de rabais sur trois séances d’épilation du corps complet, soit jambes, maillot, aisselles et lèvre supérieure, pour 1399 francs au lieu de 2900. Une promo qui se veut en soutien à l’équipe nationale féminine suisse, mais qui provoque un petit malaise.

«Se sentir bien dans sa peau»… Epilée?

Sur son site, Clinik affiche clairement ses intentions: «soutenir notre équipe nationale» et «célébrer les femmes qui bougent».

Image
capture d'écran

L’idée? Associer le dépassement de soi, le sport, et le bien-être corporel, en l’occurrence, glabre. Un lien qui ne convainc pas tout le monde.

«C’est une démarche commerciale un peu maladroite», estime Michael Kamm, CEO de l’agence de communication suisse Trio:

«On est face à un phénomène bien connu: profiter d’un grand événement pour capter l’attention, sans forcément avoir de lien pertinent avec le message de fond. Dans le jargon, on appelle ça en allemand un Trittbrettfahrer, quelqu’un qui profite du trajet d’un train pour atteindre sa destination, mais sans assumer le coût de son billet.»

L’entreprise, que nous avons interrogée sur ce lien, se justifie: 85% de sa clientèle est féminine, et parmi elles, «de nombreuses sportives». L’épilation serait choisie pour le confort, la performance, les massages ou encore les soins post-blessures. Une tentative de cohérence, qui laisse sceptique.

«On célèbre le sport féminin en incitant à l’épilation intégrale? Est-ce qu’on est plus “féminine” en étant épilée? Ce sont des questions très complexes. Et là, on a une réponse très simpliste. Dans la période actuelle, cette association d'idées est réductrice», souligne Michael Kamm.

L’humour absent, le message bancal

Le communicant pointe aussi l’absence totale de second degré dans la campagne.

«Parfois, avec un peu d’humour ou un jeu de mots bien senti, une pub peut faire passer un message plus facilement, même borderline. Mais ici, rien. C’est trop littéral, trop premier degré.»
Michael Kamm, CEO de l’agence de communication suisse Trio

Et il y a un autre détail qui grince: le message «Sans vous déplacer!» glissé dans la présentation de l’offre sur le site internet de l’établissement. «Simplifiez-vous la vie avec l’achat en ligne. Profitez de notre promotion sans vous déplacer!» lit-on. Un argument pratique qui contredit pourtant l’intention initiale de saluer le mouvement, le sport, l’effort. «C’est un peu absurde. On célèbre le fait de bouger… en disant de ne surtout pas se bouger pour acheter?», sourit Michael Kamm:

«Ce que je trouve vraiment gênant, c’est le manque de lien entre le produit proposé et l’événement que l’on tente de célébrer. Il n’y a aucun rapport réel. C’est juste un coup d’attention qui ne tient pas la route.»

Un «femvertising» à double tranchant

Dans un monde où la publicité aime surfer sur les vagues féministes, cette promo illustre parfaitement les limites du «femvertising», cette stratégie de communication qui brandit la cause des femmes pour vendre. Ici, on s’adresse à des femmes sportives, inspirantes, modernes… mais on les renvoie aussitôt à une norme esthétique: celle d’un corps sans poils.

«On joue sur l’émotion, on essaie de promouvoir l’achat avec un contexte émotionnel fort. Mais il manque cruellement de sincérité», souligne Michael Kamm. Clinik, de son côté, assume l’approche:

«Nous voulons valoriser les femmes dans toutes leurs dimensions»
Clinik

Et même si la marque précise que l’épilation est un choix libre, l’argument tombe à plat dans un contexte aussi genré.

«L’épilation est un choix, bien sûr. Mais est-ce que c’est vraiment une manière légitime de célébrer l’Euro féminin? Là est le décalage. On instrumentalise un événement ayant une symbolique pour la progression des droits des femmes… en le liant à une opération esthétique. C’est un peu tiré par les cheveux.»
Michael Kamm, CEO de l’agence de communication suisse Trio

Une offre, des doutes

Clinik affirme que la campagne, qui vient d’être lancée, a reçu un bon accueil. Soulignons toutefois que l’entreprise propose régulièrement des réductions à 50%: plusieurs offres similaires existent, tournantes, tout au long de l’année. L’Euro semble donc davantage prétexte que projet de fond.

«Le seul aspect positif dans tout ça, c’est peut-être le fait que l’Euro féminin soit devenu un événement suffisamment important pour que des marques veuillent capitaliser dessus. Il y a quelques années, personne n’aurait tenté», nuance tout de même Michael Kamm. «Mais là, ça rate son but. Et je doute que le public ne sorte pas un carton rouge pour cette promotion opportuniste.»

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La première grève féministe de Suisse le 14 juin 1991
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source: keystone
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Video: watson
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