Ce jeu vidéo veut briser les codes des superproductions
Il espère marcher dans les traces du succès français Clair Obscur: Expedition 33. «J'en avais un peu ma claque, explique à l'AFP Jonathan Jacques-Belletête, directeur de Hell is us. Je voulais essayer quelque chose de nouveau, avec plus d'agilité, plus de créativité.»
Après cinq années de développement, le jeu d'action du studio montréalais Rogue Factor est présenté à la presse cette semaine à la Gamescom de Cologne en Allemagne, plus grand salon européen du jeu vidéo, avant sa sortie le 4 septembre.
Prévu sur PC, Xbox Series et PlayStation 5, il plonge le joueur au cœur d'une guerre civile dans un pays fictif d'Europe de l'est. Epaulé par un petit drone volant, le protagoniste doit aussi affronter des créatures surnaturelles. Contrairement à la plupart des jeux, il n'y a pas de carte pour aider le joueur à s'orienter ni d'indications à l'écran lui disant quoi faire et où aller: s'aventurer dans les terres dévastées de Hell is us est loin d'être une partie de plaisir. Un choix radical que le directeur créatif assume, destiné à «briser» certains codes et s'adresser à des joueurs à la recherche d'une expérience plus corsée où la mort et la fin de partie sont fréquentes.
A 48 ans, Jonathan Jacques-Belletête a travaillé pendant près de 20 ans sur de grandes sagas du jeu vidéo comme Assassin's Creed chez le français Ubisoft, et Deux Ex à Eidos Montréal. Il a également dirigé l'adaptation vidéoludique des Gardiens de la Galaxie, superhéros issus de l'univers Marvel.
«Experimenter» davantage
«J'avais un peu fait le tour, soupire-t-il. Les AAA (jeux à gros budget) coûtent tellement cher à développer qu'il faut en vendre des quantités astronomiques pour rentrer dans ses frais et ça crée des expériences de jeu un peu insipides», ajoute-t-il, lors d'une rencontre à Paris pour une présentation du titre.
C'est ainsi qu'en 2019, il décide de rejoindre Rogue Factor et de tenter une nouvelle approche. Pour ce projet développé par une équipe d'une cinquantaine de personnes et «très peu» de prestataires externes, le Canadien s'écarte de la formule traditionnelle des gros studios et mise sur un budget qu'il assure être «beaucoup moins» élevé, sans pour autant dévoiler de montant. De quoi, assure-t-il, gagner en souplesse et «expérimenter» davantage: là où dans les gros studios, incorporer un nouvel élément nécessite une série de validations hiérarchiques chronophages, une petite équipe peut «prototyper» plus rapidement.
La formule a réussi cette année au petit studio français Sandfall Interactive dont le premier jeu Clair Obscur: Expedition 33, conçu par une équipe réduite, s'est écoulé à 4 millions d'exemplaires, une performance pour une production de cette taille. «Quand on a vu leur succès, on était très contents, ça ressemble énormément à ce qu'on a essayé de faire», affirme M. Jacques-Belletête. «Il y a un truc qui commence à ne plus tenir, une espèce de folie des gros projets», s'alarme-t-il, au moment où les plus grosses productions du secteur affichent des budgets de plusieurs centaines de millions d'euros.
«L'industrie a eu énormément de difficultés ces dernières années», et face aux vagues de licenciements qui ont balayé des acteurs majeurs comme Sony et Microsoft, les studios de taille plus modeste «semblent avoir un peu mieux résisté à la tempête». «C'est clairement une autre voie extrêmement valable et compétente qu'on est en train de mettre en place», veut croire le développeur canadien.
