L'adaptation télévisée du Seigneur des anneaux, malgré son budget titanesque, est typiquement le genre de licence si lourde à porter qu'elle ne pouvait que couler à pic, surtout lorsque s'ajoute à cela le poids de la trilogie de Peter Jackson. Ce qui n'a pas manqué au vu du résultat décevant de la première saison qui n'aura jamais eu l'aura de sa rivale Game of Thrones dans l'inconscient populaire. Cette adaptation non littérale des livres n'aura pas réussi à accaparer l'attention des fans et aura même été la cible d'attaques racistes sous prétexte que la série a mis en avant des elfes et des nains de couleurs.
Pourtant, malgré des défauts évidents, comme un début poussif et une multiplication d'intrigues secondaires pas forcément passionnantes, la première saison s'achevait sur un final relativement satisfaisant. Après avoir visionné les trois premiers épisodes de cette nouvelle saison, il faut admettre que la série reste dans cette continuité et signe un retour remarquable une fois libéré de ses obligations d'introduction.
Avec une histoire plus condensée et des moments aussi sombres qu'héroïques, la série fait dans le grandiose, aidée par une mise en scène et des paysages particulièrement réussis. Mais si cette saison 2 des Anneaux de pouvoir est particulièrement intéressante, c'est surtout grâce à l'arc narratif de son antagoniste principal: Sauron, celui par qui l'Anneau unique sera forgé. Un personnage ambivalent, charismatique et mystérieux qui porte cette saison sur ses épaules au détriment de Galadriel.
Les Anneaux de Pouvoir se déroule environ trois mille ans avant les événements contés dans Le Hobbit et Le Seigneur des anneaux. Prenant place durant le Second Âge, elle couvre la création des Anneaux, l’ascension du seigneur noir Sauron, la chute de Númenor et la Dernière Alliance entre les Elfes et les Hommes (que l'on peut voir d'ailleurs en introduction du premier volet dans la trilogie de Peter Jackson).
Amazon ne disposant pas de l'intégralité des droits sur les œuvres de Tolkien, dont les deux livres cités plus haut, les showrunners se sont inspirés des annexes créées pour les romans originaux afin de résumer l'histoire de la création des anneaux.
Une adaptation libre qui tranche à vif dans la temporalité et les personnages écrits à l'origine par J. R. R. Tolkien dans le but d'en faire un récit plus digeste. Cette réécriture de l'histoire et des personnages risque d'horrifier les puristes des romans, mais elle n'en est pas moins respectueuse de l'univers écrit par le linguiste britannique. Si la série pioche parfois dans la direction artistique des films de Peter Jackson, elle s'est forgée sa propre identité et offre des détails qui parleront forcément à ces mêmes puristes, quitte à basculer parfois dans le fan-service.
La série continue néanmoins de s'éparpiller avec des intrigues inhérentes à chaque race, que ce soit les hommes, les nains, les elfes ou les pieds velus en prévision de la corruption finale. Cependant, c'est véritablement l'intrigue entre Sauron et l'elfe Celebrimbor qui nous passionne. Sauron, l'entité aux multiples visages, qui, jusqu'à la fin de la première saison, nous laissait miroiter son identité jusqu'à sa révélation devant une Galadriel médusée. Celui-ci était en réalité Halbrand. Ce visage amical qui se présentait comme le Roi des Terres du Sud était bel et bien le disciple de Morgoth que l’elfe traquait sans relâche pour venger la mort de son frère.
Nouveau look pour une nouvelle vie, Halbrand apparait dans cette saison sous la forme d'Annatar, le Seigneur des Dons. Un nom que Sauron choisit dans le but de se faire passer pour un envoyé des Valar (noms donnés aux divinités du monde Tolkien) auprès de Celebrimbor, l'elfe forgeron de l'Eregion pour le manipuler.
Cette relation complexe et toxique aboutira à la création des Anneaux de pouvoirs pour chacune des races de la Terre du Milieu, permettant au futur seigneur des ténèbres d'asseoir son pouvoir pour les gouverner tous. Cette trame, qui est au cœur de cette seconde saison, constitue sa plus belle réussite, incarnée par le magnétisme de l'acteur australien Charlie Vickers derrière les différents avatars de Sauron.
Ces trois premiers épisodes, bien que plaisants, souffrent toujours de séquelles laissées par la saison précédente. Parce que deux ans se sont écoulés et qu'il faut bien replacer chaque personnage dans son contexte, on retrouve cet aspect récapitulatif donnant une sensation laborieuse de déjà-vu. Cependant, on sent bien que ce démarrage en douceur est fait pour amorcer le déluge d'actions qui va suivre et déployer tout son potentiel inhérent au genre, comme en témoignent les images montrées dans les bandes-annonces.
Difficile de parler trop vite, mais si la production d'Amazon réussit à nous plonger dans les manipulations de Sauron et la vengeance de Galadriel en cessant de s'éparpiller, elle pourrait bien être la série de fantasy qui nous fera oublier l'ennui que House of the Dragon nous a fait subir durant sa deuxième saison.
Les Anneaux de Pouvoir n'a peut-être pas réussi à être la série qui allait les gouverner toutes, elle n'en demeure pas moins un spectacle ambitieux et visuellement grandiose qui pourrait bien dans les ténèbres nous lier.
Les trois premiers épisodes du «Seigneur des anneaux : Les Anneaux de Pouvoir» sont disponibles sur Prime Video depuis le 29 août. Un nouvel épisode sortira ensuite chaque jeudi.