Certains ont salué le courage artistique du papa de The White Lotus. Beaucoup d’autres ont eu envie de le crucifier pour avoir osé abandonner l’un des ingrédients phares du succès de la série pour la troisième saison. Oui, vous voyez très bien de quoi on parle.
Un peu à la manière du générique de Twin Peaks, ces petites voix hantées se sont accrochées à la paroi de notre crâne, pour ne plus jamais nous libérer. Plus qu’une vocalise, plus qu’une musique, ces quelques notes expriment à elles seules le joyeux malaise qui hante l’existence des riches protagonistes de la série. Une prouesse que l’on doit au génial compositeur chilien Cristóbal Tapia de Veer et qui a donné naissance à un conflit sanguin avec Mike White, le showrunner de White Lotus «qui s’est montré hystérique» dès la première saison.
Dans une interview accordée au New York Times cette semaine, celui qui a reçu trois Emmy Awards pour sa partition musicale lève enfin le voile sur cette polémique qui n’en finit pas de déchirer les fans. Auparavant, il n’avait jamais donné d’interview et avoue d’emblée à la journaliste qu’il ne sait «par où commencer».
Dans cet article, on apprend par exemple que, dès le début de leur collaboration, les deux hommes se sont retrouvés en «profond désaccord créatif». Pour faire court, les producteurs de la série goûtaient peu aux mélodies expérimentales de Cristóbal Tapia de Veer et rêvaient d’un générique plus grand public et «entraînant».
Alors que le compositeur avait l’impression que le scénario de la première saison, par ailleurs «très bien écrit», lui faisait penser à une «télé-réalité», il a proposé à Mike White de composer une musique qui en ferait «une sorte de Hitchcock hawaïen». Le showrunner a alors éclaté de rire et la hache de guerre fut irrémédiablement déterrée. Et pour cause: ce dernier avait déjà une «bande originale temporaire, une chanson qui ressemble plus à ce qu'on pourrait écouter à Ibiza».
Aïe.
Alors quand la troisième saison est sortie sans les «ooh-loo-loo-loo» et que les internautes ont commencé à signifier leur mécontentement, le compositeur a envoyé un texto à Mike White pour lui proposer d’offrir aux fans la version longue du générique qui... abrite les fameuses vocalises hantées, dans un épisode à venir. Mais le créateur de la série aurait «refusé».
Furieux, Cristóbal Tapia de Veer a alors publié cette version longue sur son propre compte YouTube, il y a quelques jours.
Cette énième grosse dispute a fait prendre au compositeur une grave décision, qu’il a d’abord annoncée à l’équipe de White Lotus, sans penser qu’elle allait tout raconter au créateur de la série dans la foulée. Pour Cristóbal Tapia de Veer, c’est fini. Il a claqué la porte et ne travaillera pas sur la quatrième saison.
Le New York Times précise que HBO n’a pas souhaité répondre aux questions de la journaliste. Une question est désormais sur toutes les lèvres: Comment la série va-t-elle parvenir à se relever de ce divorce, alors que la musique de Cristóbal Tapia de Veer est aujourd’hui l’un des personnages les plus importants?
Le moins que l’on puisse dire, c’est que son ou sa successeur va avoir du pain sur la planche et une pression monstre sur les épaules. Morale de l’histoire, c’est souvent l’ego qui vient ruiner les plus belles histoires et les plus grands succès.