Le développement de S.T.A.L.K.E.R. 2: Heart of Chornobyl n’a pas été un long fleuve tranquille, puisque le studio GSC Game World, basé en Ukraine, a été victime de l'invasion russe en 2022. Un sentiment qui se ressent très fortement sur certaines finitions du jeu. Derrière ce premier rempart se cache néanmoins l’expérience la plus immersive de cette année, et peut-être même depuis Cyberpunk 2077.
Une expérience prenante à plus d’un titre. Un jeu qui vous hante au point d’y penser au travail, sous la douche, au moment de dormir.
La zone d’exclusion est terne et désolée, pourtant elle nous appelle en permanence. Stalker 2 est un ovni dans le jeu vidéo moderne. Un FPS/RPG plein de passion et d’amour avec une forte envie d’exceller pour proposer un produit qui a une âme.
Avant de vous laisser sur mon test, je tiens encore à préciser que Stalker 2 n’est pas un jeu qui va plaire à tout le monde. Il lutte justement contre cette mode de vouloir séduire le plus grand nombre. Il va diviser, c’est une certitude. Vous pouvez ne pas l’aimer, mais si c’est votre genre, alors vous allez être victime d’une nouvelle addiction.
Stalker 2 est troublant dès ses débuts. Il a tout d’un jeu qui peut proposer des réponses à toutes vos questions, mais il ne le fait pas. La débrouillardise est le maitre mot. Pour réussir à avancer, vous devez regarder, apprendre, subir et comprendre. La Zone autour de Tchernobyl n’a rien de familier et n’a rien d’accueillant. Les anomalies y sont courantes, les monstruosités sont légion et l’humain, omniprésent, est le plus dangereux.
Le jeu ne vous prend donc pas par la main, pire encore, il est exigeant (sauf dans sa difficulté la plus basse). La nourriture est importante, au même titre que les bandages, les boissons et les trousses de soins.
L’idée n’est pas de jouer la carte de la difficulté de manière brute, mais de vous pousser dans vos retranchements. Ici, votre ennemi à plusieurs visages avec en haut de la chaine des dangers, votre équipement. Foncer dans le tas est rarement une bonne idée, ne serait-ce que pour la quantité de balles sur vous ou encore l’usure de vos armes qui rend leur utilisation approximative.
Je vous passe les moments d’infiltration qui sont une fausse bonne idée. Si l’approche est noble, l’IA aux fraises casse complètement ce segment.
Avec son minimum de 40 heures et un plafond qui flirte avec la centaine, le temps passé sur votre canapé ou votre chaise devient une illusion. Stalker 2 aspire la notion de ce qui vous entoure. Les quêtes secondaires sont parfois lourdes de sens et proposent une histoire complète. L’exploration est bien évidemment récompensée. Si, de l’extérieur le jeu peut ressembler à un Far Cry, il a surtout tout d’une réussite immersive. Chaque chose sur la carte à une raison d’exister et risque potentiellement de vous donner un petit plus si vous ouvrez les yeux.
Bien évidemment, tout n’est pas parfait et certaines parties du jeu donnent une illusion de déjà-vu ailleurs. Autre point qui ne va pas plaire à tout le monde: la marche sera votre seul moyen de déplacement. Il y a bien un système de voyage rapide, mais il n’a rien de pratique. Je suis un amateur de paysages dans les jeux vidéo, cela ne m’a absolument pas dérangé, cela fait même partie du charme du jeu, mais c’est un point qu’il faut soulever pour celles et ceux qui ne veulent pas perdre leur temps.
Sombre, gris, dangereux et démoralisant, Stalker 2 est l’apogée du genre post-apocalyptique. Je n’ai pas ressenti de telles émotions depuis longtemps. Après deux longues journées loin d’une base, à tenter de survivre, à remplir des missions toutes aussi morbides les unes que les autres, je rentre. Je vends mon surplus, discute avec deux trois personnes dans un bar. Avant d’aller dormir, je termine ma soirée au coin d’un feu où un survivant joue de la guitare. Au bout de quelques minutes, un personnage se joint à nous, raconte une blague, l’occasion d’entendre enfin des rires. Un moment éphémère qui m’a rempli de bonheur avant de me laisser replonger dans la dure réalité de ce qui m’entourait.
Ce jeu ukrainien fait bien plus que de raconter une histoire, il nous l’a fait vivre. A l'instar de GTA Vice City qui est pour moi le meilleur épisode de la saga pour son ambiance et uniquement son ambiance, Stalker 2 suit cette même ligne directrice. Les matins sont si beaux dans la zone, au même titre que les soirées. Mais comme vous le savez, pour apprécier une chose, il faut en ressentir le manque. Ce jeu a ses mystères qui ne s’expliquent pas, mais se ressentent.
Doublé uniquement en anglais pour seconder l’Ukrainien, les développeurs de Stalker 2 ont pris le pari d’un jeu authentique. Je vous conseille d’ailleurs d’y jouer en voix originales sous-titrées en français. Les dialogues sont très bons, mais le titre excelle encore plus dans ses ambiances sonores.
À aucun moment, vous n’avez rien pour vous occuper les oreilles. C’est discret, parfois magique, souvent pesant, mais le son rythme parfaitement chaque pas que vous faites. Techniquement, c'est superbe. Au-delà de ses textures, ses magnifiques effets de lumières ou encore ses excellents effets atmosphériques, le jeu à une direction artistique qui lui colle parfaitement, bien qu'elle soit difficile à cerner en raison de sa très grosse approche photoréaliste.
En termes de bugs, je n'ai pas eu de souci après mes dizaines d’heures sur le jeu. J’ai rencontré quelques problèmes de collision et des objets derrière des textures, mais rien de bloquant. GSC World a respecté les origines de Stalker, le contrat est totalement rempli pour cette suite.
Je suis en désaccord avec beaucoup de choses que je vois sur les réseaux sociaux. Néanmoins, je ne peux que m’aligner sur les problèmes d’intelligence artificielle que les joueurs évoquent. Tout n’est pas à jeter. Les ennemis ont parfois des moments de lucidité où ils attaquent de manière intelligente, mais c’est loin d’être maitrisé.
Ce n’est pas tout, dans les missions dans lesquelles d’autres PNJs collaborent avec nous, il n’est pas rare de voir ces derniers faire n’importe quoi pour au final se placer devant notre viseur et décider de devenir hostiles.
Toujours dans cette même catégorie, je rajoute le système qui gère les PNJs. Si le premier Stalker avait mis la barre très haut sur l’écosystème dans la Zone, en particulier sur la gestion des factions, ce second volet n’est même pas à la hauteur de son grand frère. Les groupes sont dénués de logique. Pire encore, il n’est pas rare de voir des ennemis réapparaitre sous nos yeux. Un point actuellement en cours de correction qui mérite une très grosse attention de la part du studio, car elle entache parfois l’immersion.
Oui, je n’ai pas peur de le dire, Stalker 2 est le jeu qui me procure le plus d’émotions cette année. Il n’est pas nominé pour devenir le jeu de l’année et, avec le programme chargé pour 2025, il sera très certainement déjà placé parmi les grands absents. Qu’importe, je lui voue un amour particulier pour son ambiance, son rythme, sa manière de me jeter dans la gueule du loup et sa réalisation. Les développeurs de GSC World sont à contre-courant et ont osé prendre un risque. C’est un exemple pour toute l’industrie vidéoludique.
Malheureusement, le jeu souffre encore de quelques soucis, en particulier sur l’intelligence artificielle. Je note aussi que j’ai moins ce sentiment de factions qui se battent pour la Zone.
S.T.A.L.K.E.R. 2: Heart of Chornobyl est un hommage à tout un genre. Il offre un gigantesque monde ouvert ultra-complet qui arrive à être organique malgré son aspect de fin du monde. Il n’est pas facile, mais il va vous offrir au fur et à mesure les outils pour vous procurer une véritable sensation de montée en puissance.
Malgré tout le plaisir qu’il me procure et ce que je ressens en y jouant, je me dois de ne pas être généreux sur la note. Certains aspects doivent impérativement être corrigés.
S.T.A.L.K.E.R. 2: Heart of Chornobyl est disponible sur PC et Xbox. Il est également inclus dans le Gamepass.