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Qui va mourir en 2024?

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Qui va mourir en 2024?

La question est aussi sinistre qu'irrespectueuse. Or, elle se pose pour les économistes, les conseils d'administration, les gouvernements, les traders, les héritiers, les fans et, bien sûr, les journalistes. L'anticipation du décès d'une personnalité est capitale pour en absorber les conséquences. Et si Joe Biden (81), Yoko Ono (90) ou Vladimir Poutine (71) trépassaient cette année?
01.01.2024, 18:5401.01.2024, 19:14
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Le 8 septembre 2022, une bonne partie de la planète a pleuré la mort d'Elizabeth II à chaudes larmes. Les économistes, eux, planqués dans leurs bureaux sans émotion, ont sorti leur calculette au lieu d'un mouchoir: la disparition de la reine allait peser lourd sur la santé financière du Royaume-Uni. Entre 1,6 et 6 milliards de livres sterling pour être (à peu près) précis. En clair, le pays avait tout pour entrer bien plus vite et bien plus violemment dans une période de récession.

Au-delà du prix des funérailles ou des retombées sociales et politiques de l'accession au trône de Charles III, les dix jours de deuil national ont immédiatement plongé le pays dans une immense fragilité économique. Sans oublier la mise à jour des billets de banque, des passeports, des timbres, des uniformes de la police et de l'armée qui allait mettre les caisses de l'Etat à rude épreuve.

Durant près de deux décennies, la mort de la reine, retentissante à tout point de vue, fut minutieusement et discrètement anticipée, pour en amortir au mieux les chocs. Par les cerbères des tiroirs-caisses et les membres de la couronne, bien sûr, mais aussi par les journalistes. Ce n'est un secret pour personne, la plupart des rédactions, pied au plancher, dépassent quasiment la mort par la droite pour être en mesure de publier, avant la concurrence, un hommage fourni et inspiré. On appelle ça une nécrologie.

Pour accéder à nos paris un peu macabres pour 2024:

Et l'exercice est si délicat que certaines grandes plumes en ont fait leur spécialité. Pour cela, il faut se résoudre à lancer des paris d'un infini mauvais goût et se poser la question qui tue: qui est la prochaine célébrité susceptible de passer l'arme à gauche?

«L'article doit sortir dans les cinq minutes. Nous avons environ 6500 portraits de personnalités recensés dans notre base interne et stockés dans nos archives. Ils ont été écrits au fil des années (...)»
Aurélie Mayembo, cheffe du service numérique et culture de la rédaction de l’AFP, dans une interview à l'INA.

Dans cette course à la primeur, forcément un peu sordide, il n'est hélas pas rare de voir apparaître, par erreur et sur internet, la nécrologie d'un grand de ce monde, pourtant bien vivant. La faute à une panne, un piratage ou à ce malheureux stagiaire qui aura cliqué sur le mauvais bouton.

Souvenez-vous, en 2019, Le Monde publiait la nécrologie de Bernard Tapie, deux ans avant qu'il ne trépasse pour de bon. Plus grand encore fut le couac de la rédaction de RFI, en 2020, qui annoncera d'une seule salve les décès de plusieurs dizaines de personnalités, d'Elizabeth II à Alain Delon, en passant par Jean-Paul Belmondo, Pelé ou Line Renaud. Bien décidée à tromper sa propre mort, la chanteuse réagira avec humour et déterminisme: la faucheuse ne m'aura pas.

Si Line Renaud est toujours bien vivante, Belmondo, Queenie et le roi Pelé sont décédés dans les vingt-quatre mois qui suivront ce «bug informatique». Pour la petite histoire, la mort de la légende brésilienne du football fut rendue publique au beau milieu des journaux télévisés du soir: «Heureusement, on avait une rétro prête à diffuser», expliquait Guillaume Debré, directeur adjoint de la rédaction de TF1.

La légende (ou l'égocentrisme) voudrait que les stars n'attendent que ça. De lire leur propre carnet noir, de savourer les larmes qu'elles font couler sur les joues et la trace qu'elles laisseront sur Terre. Un fantasme, il faut le dire, assouvi par un certain nombre d'entre elles.

Pour être en mesure de présager d’un décès, les paris s'organisent sur la base de données plus ou moins objectives: l'âge, les maladies connues, le style de vie, l'allure générale, les confessions publiques ou encore le contexte géopolitique. Joe Biden, 81 ans, montre effectivement quelques signes de faiblesse. Vladimir Poutine, dix ans plus jeune que le président des Etats-Unis, est plus volontiers exposé à un assassinat qu'à la réelle gravité de l'un des nombreux pépins de santé qu'on lui promet depuis le début de l'agression de l'Ukraine.

Depuis le 24 février 2022, les huiles moscovites, les gouvernements occidentaux et les analystes se bousculent, dans l'ombre ou la lumière, pour redessiner la carte du monde si le maître du Kremlin venait à trébucher. Et aux Etats-Unis, la mort éventuelle de Joe Biden est devenue une stratégie politique et une arme de communication dans la course à la Maison-Blanche, là où le bilan de santé du locataire est scrutée avec la même attention que les radars du Pentagone.

Et puis, qu'on le veuille ou non, des millions de fans se préparent déjà à ne pas digérer la mort de Bruce Willis, Françoise Hardy, Renaud ou Céline Dion, qui bataillent en ce moment avec une santé qu'on dit catastrophique. A contrario, Clint Eastwood (93), Nadine de Rothschild (91) ou Jean-Marie Le Pen (95) semblent tendre fermement leur majeur à l'inévitable. Redoutées ou souhaitées, ces potentielles disparitions aboutissent toujours à de profonds bouleversements, qu'ils soient politiques, financiers ou sociaux.

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Prenons le cas de la très discrète Yoko Ono, 90 ans. Le dernier indice sur sa santé date de 2017, quand un proche déclarait à RadarOnline qu'elle «a toujours été très vive d'esprit mais aujourd'hui, cette étincelle est presque partie».

«Elle sent qu'elle est en train de mourir et elle se prépare à quitter ce monde»
Un proche de Yoko Ono, en 2017.

De telles confessions, si elles ont le pouvoir d'effrayer les fans, remuent tout un tas de dossiers et redéfinissent des stratégies. Depuis son terrible assassinat il y a 43 ans, John Lennon nourrit encore une cargaison d'avocats. Car en léguant la plus grande part de son gâteau à l'amour de sa vie, son aîné Julian a longtemps dû se contenter d'une pension alimentaire de 2400 livres par an. Sans oublier la relation tendue entre Yoko et Sir Paul McCartney.

Si Lennon pèse aujourd'hui plus de 700 millions de dollars, la mort de sa douce ayant droit va inévitablement dégoupiller une guerre financière qui n'a plus grand-chose à voir avec l'héritage musical. Et ces conflits à venir s'organisent alors que les corps sont encore chauds.

Vous vous souvenez de la série Succession?

Inspiré de la carrière du redoutable magnat des médias Rupert Murdoch, ce petit chef d'oeuvre en quatre saisons raconte le combat sanglant d'une fratrie plus ou moins prête à tout pour grignoter l'empire de papa, le terrifiant Logan Roy. Murdoch, le vrai, a tiré sur le frein à main, en septembre dernier, passant officiellement le guidon de la Fox Corporation à son fils Lachlan.

Mais, dans l'ombre, personne n'a pour autant baissé les armes et levé le drapeau blanc. Et ils sont nombreux à redouter ou souhaiter discrètement la mort physique de celui qui, à 93 ans, est considéré comme «l'homme le plus dangereux du monde». Sans oublier que les cordons de la bourse risquent de méchamment se tendre.

Parfois, on ne s'embarrasse même pas d'un certificat de décès pour enterrer les plus encombrants. C'est souvent idéologique, politique, sociologique. Quand le grand nettoyage paraît urgent et stratégique. Quand il faut tuer le père avant l'heure ou écarter prématurément certains aïeux parce que la nouvelle garde est persuadée de faire beaucoup mieux.

Pour les nouvelles élites de l'extrême droite française, Jean-Marie Le Pen est déjà six pieds sous terre. Bien sûr, Marine va pleurer quand papa, 95 ans, décédera. Mais dans les micros et les hémicycles, le voilà réduit à un détail de l'histoire d'un parti qui n'a plus le droit, ni la patience, de composer avec sa présence ou son héritage.

Parier sur la mort, Death List en a d'ailleurs fait sa macabre marotte, sans la moindre élégance. A chaque fois, début janvier, ce site britannique dresse la liste des 50 célébrités qu'il voit trépasser dans les douze mois à venir. Sans oublier de compter les points de l'année qui vient de s'écouler. Avec pas mal de cynisme, le comité précise «que les candidats ne peuvent pas être célèbres uniquement parce qu'ils risquent de mourir de façon imminente».

Force est de constater qu'ils avaient vu juste pour Tony Bennett, Tina Turner, Henry Kissinger ou encore Milan Kundera. Jimmy Carter, 99 ans, attend probablement le chiffre rond, c'est bien plus classe.

«La DeathList 2022 a obtenu un score respectable de 14 décès, bien que le record soit de 20. Nous espérons que la liste de mort 2023 sera en mesure de produire une belle performance»

Enfin, et pour être tout à fait franc, la rédaction de watson avait lancé les paris sur la mort de la reine Elizabeth II, en interne et dès les premières alertes sérieuses. Ironie du sort, et comme si Dieu avait voulu valider un savoir-faire, c'est notre Royale chroniqueuse qui s'était blottie au plus près de ce triste 8 septembre 2022. Ce qui ne l'avait bien sûr pas empêchée d'abandonner de larges larmes dans son cocktail et de réserver son billet pour Londres, la seconde d'après.

Ce qui est sûr, c'est que Poutine, Biden, Dion, Willis, Hardy, Ono, Murdoch et Le Pen ne sont de loin pas les seuls à avoir les oreilles qui sifflent dès qu'un journaliste, un adversaire ou un potentiel successeur spéculent méchamment sur leur fin prochaine.

Et de nombreuses nécrologies, déjà bien au chaud dans le tiroir des rédactions du monde entier, sont actuellement mises à jour, de par les rebonds de l'actualité, mais surtout les méchants pressentiments pour 2024.

C'est profondément humain, donc profondément injuste.

N'est-ce pas... Jimmy Carter, Britney Spears, Charles III...

  • Michael Schumacher
  • Madonna
  • Alain Delon
  • Donald Trump
  • Bob Dylan
  • Sepp Blatter
  • Nadine de Rothschild
  • Christoph Blocher
  • Renaud
  • Keith Richards
  • Mick Jagger
  • Woody Allen
  • Tom Jones
  • Elton John
  • Clint Eastwood
  • Volodymyr Zelensky
  • Bill Cosby
  • Paul McCartney
  • Harvey Weinstein
  • Alexeï Navalny
  • Bernadette Chirac
  • Le pape François
  • Morgan Freeman
  • Brigitte Bardot
  • Gérard Depardieu
Les gadgets tech les plus attendus de 2024
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