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Charlie Kirk: Trump refuse d’être le président des Etats-Unis

Trump refuse d’être président des Etats-Unis
Après l’assassinat de Charlie Kirk, Donald Trump veut punir par la force et «mettre une raclée à la gauche radicale». Chez les républicains, tous ne pensent pas comme le patron.images: getty, montage: watson
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Trump refuse d’être le président des Etats-Unis

Après l’assassinat de l’ultraconservateur Charlie Kirk, la plus grande puissance mondiale, prise en tenaille entre vœux de désescalade et appels à la guerre civile, se cherche un avenir proche. Les Etats-Unis se trouvent-ils réellement à un tournant?
15.09.2025, 18:5415.09.2025, 18:54

Ce qui aurait dû être tragiquement simpliste se révèle un poil moins évident. Depuis l’assassinat du célèbre militant trumpiste Charlie Kirk, la semaine dernière, le puzzle politique américain vole en éclats. Cette Amérique ultrapolarisée, dont on pensait avoir cerné les clans et, plus important, leur attitude face aux faits d’actualité, en profite ces derniers jours pour questionner ses fondements et ses valeurs. Sauf Donald Trump.

Car tout n’évolue pas en blocs homogènes. Il n’y a pas la réaction de la gauche, celle de la droite, et rien au milieu. La violence politique, qui a franchi un cap sanglant sur ce campus universitaire de l’Ohio mercredi, en pousse plus d’un à l’introspection plus ou moins publique et plus ou moins sincère. Il faut dire que, depuis quelques jours, la mort de l’ultraconservateur de 31 ans provoque des événements en cascade.

Des employés ont déjà été licenciés pour s’être réjouis de la disparition de Charlie Kirk. Des journalistes de chaînes nationales ont perdu l’antenne pour avoir plus ou moins suggéré que l’ex-militant d’extrême droite l’avait bien cherché. Des voix d’extrême gauche affirment que le drame de l’Utah est le «seul remède contre le fascisme».

De l’autre côté du spectre, le noyau dur du mouvement MAGA est entré dans une gigantesque chasse aux sorcières, orchestrée par le grand patron, Donald Trump, qui considère que «les radicaux de droite sont souvent radicaux parce qu'ils ne veulent pas voir de crimes». Encore plus frontal, Elon Musk s’est contenté de balancer sur son réseau social que «la gauche est le parti du meurtre».

Enfin, de son côté, l’influenceuse de l’alt-right américaine Laura Loomer, souvent guidée par une certaine paranoïa, porte manifestement la vengeance froide à son ceinturon:

«Je vais passer ma nuit à rendre célèbres tous ceux que je trouve en ligne en train de se réjouir de la mort de Charlie Kirk. Si vous êtes assez malades pour célébrer son décès, préparez-vous à voir vos aspirations professionnelles ruinées»
Laura Loomer

Le milliardaire de Mar-a-Lago ne s’est jamais vanté d’être un président rassembleur. Pas même un pacificateur, lui qui prétend apaiser la planète et mériter le Nobel de la Paix.

Celui qui déclare la guerre à tous ceux qui n’entrent pas dans sa définition de l’Amérique républicaine, vient de renommer le ministère de la Défense en «Department of War» et envoie l’artillerie lourde dans les grandes villes du pays, armé de la même excuse qu’au lendemain de l’assassinat de Charlie Kirk: «Nous devons sauver l’Amérique et mettre une raclée aux fous radicaux de gauche», tout en insistant sur une étrange «non-violence» difficilement crédible, dans sa bouche et quatre ans après l’assaut du Capitole.

«Charlie militait pour la non-violence. C'est de cette manière que je voudrais que les gens répondent»
Donald Trump, au sujet de Charlie Kirk

Une occasion rêvée?

Lorsqu’un pays se retrouve dans un carrefour, le tournant à venir peut prendre plusieurs formes. Celui qu’une bonne partie de l’échiquier politique redoute, c’est évidemment celui de la guerre civile, pure et dure. L’explosion d’un système. Le clivage irréparable. L’éclatement d’une série de valeurs. A même le bitume. Or, c’est bien souvent le virage déjà entamé par le pouvoir en place qui profite de ce type d’événements traumatiques, pour s’offrir une série de coups de volant.

Donald Trump, partisan d’une répression au service de sa propre vision de l’Amérique, brandit à demi-mot la menace d’une longue d’expédition punitive, basée sur l’orientation politique supposée du meurtrier présumé, Tyler Robinson, alors que l’enquête ne fait que commencer.

Dans le sillage du président, certains influenceurs et plusieurs élus osent une voie moins brutale. A l’image de Mike Johnson, speaker républicain de la Chambre, qui a appelé les partisans à rendre hommage à Charlie Kirk et de perpétuer son travail, «non pas timidement: avec audace, mais avec amour».

La phrase qui exprime sans doute le mieux l’état d’esprit d’une petite frange de républicains aujourd’hui est celle de Tyler Bowyer, directeur des opérations de l’organisation fondée par Charlie Kirk, Turning Point Action:

«La colère que vous ressentez en ce moment doit se transformer en activisme. C’est ce que Charlie voudrait. Considérez ce drame comme le moment décisif pour vous engager dans votre communauté locale ou vous présenter aux élections»
Tyler Bowyer, directeur des opérations de l’association de Charlie Kirk, Turning Point Action.

De la récupération politique, sur un corps encore chaud? Evidemment. Mais, face à l’ordre de marche agressif du locataire de la Maison-Blanche, obnubilé par sa propre victoire contre des ennemis qu’il peine à distinguer, de nombreux électeurs républicains y voient surtout l’opportunité de propager les valeurs chrétiennes et ultraconservatrices. Celles que Donald Trump n’empoigne souvent que pour grappiller des voix en périodes électorales.

En faisant de Charlie Kirk le martyr de toute une nation, allant jusqu’à comparer sa mort à celle de Socrate ou de Martin Luther King Jr., ses disciples, souvent très jeunes et fraîchement tourné vers la religion, annoncent vouloir continuer son travail et même lui trouver un digne successeur.

Selon le porte-parole de Turning Point Action, il y aurait eu près de 32 000 demandes de création de nouvelles antennes de l’organisation à travers le pays, en 48 heures. Sidération passagère ou réel tournant? Matthew Boedy, professeur d'anglais à l'Université de Géorgie du Nord, cité par le New York Times lundi matin, en est certain:

«J’ai su à ce moment-là que notre nation avait franchi une ligne»

Reste désormais à savoir si cette volonté pieuse d’imposer un courant politique extrême, par un militantisme supposé non violent, tiendra le coup après le choc et la période de recueillement généralisé.

Alors que les démocrates se montrent encore politiquement discrets, cinq jours après l’assassinat, le pire ennemi de ce que ses fans considèrent comme l’héritage de Charlie Kirk pourrait bien être... Donald Trump lui-même, et sa volonté personnelle de punir par la force tout Américain qui ne pense pas comme lui.

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Video: watson
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