International
Analyse

Le délire d’Elon Musk va révéler le talent de Donald Trump

Elon Musk ne sera jamais aussi talentueux que Trump.
Elon Musk pense-t-il réellement pouvoir écraser Trump avec son nouveau «Parti de l’Amérique»?images: getty, montage: watson
Analyse

Le délire d’Elon Musk va révéler le talent de Donald Trump

En froid (glacial) avec le président des Etats-Unis, le magnat de la tech est désormais persuadé d’avoir les armes nécessaires pour renverser l’échiquier politique américain avec son nouveau parti. Mais il va sans doute lui manquer un ingrédient qu’il ne maîtrise pas: la démagogie.
07.07.2025, 12:0107.07.2025, 16:14
Plus de «International»

Donald Trump a raison. Si, si. Lorsqu’il a affirmé dimanche être «attristé de voir Elon Musk dérailler complètement et se transformer en véritable catastrophe», les différents conseils d’administration et employés de ses entreprises ont dû penser la même chose. Alors qu’ils le priaient de redescendre de sa petite parenthèse enchantée au sommet du pouvoir, l’homme le plus riche du monde semble leur avoir dressé un majestueux doigt d’honneur avant de s’engouffrer davantage dans le marécage politique américain qu’il maîtrise mal.

En créant son propre parti ce week-end, pour entériner son désaccord avec son ancien meilleur ami et hurler que Donald Trump «ruine notre pays par le gaspillage et la corruption», il part sans doute du principe que les déçus seront suffisamment nombreux pour le suivre dans ce qu’il considère comme «la liberté».

Si quelques-uns sont sans doute séduits par la testostérone financière qui lui sert à la fois d’arsenal, de gilet pare-balles et de susucre, il manquera à Elon Musk ce qui fait la solidité et le succès de Trump depuis 2015: l’art de la démagogie. Le «Parti de l’Amérique», baptisé ainsi comme si la totalité de la population américaine attendait le patron de Tesla depuis des siècles pour se sentir enfin représentée, va devoir cravacher sec pour se faire une place dans le cœur des real Americans du Midwest (pour ne citer qu’eux).

Non pas que Donald Trump soit particulièrement proche des classes sociales les moins favorisées, mais il a toujours su leur faire miroiter une connexion, pourtant inexistante. Le milliardaire de Mar-a-Lago est sans doute le politicien moderne le plus adroit lorsqu’il s’agit de manier la démagogie. Et, ce, sans jamais sortir involontairement de son rôle fantasmé d’opium d’un peuple qui ne se fait plus tant d’illusions.

A l’inverse, Elon Musk a d’abord révélé sa profonde instabilité psychologique, en faisant irruption dans les jupes du président. La politique n’évoluant pas sous les mêmes règles que le business, ses échecs et réguliers coups de sang se sont inscrits sur les courbes boursières de ses différentes sociétés et la cote de popularité de ses joujoux électriques.

Il a beau jurer, aujourd’hui, «qu’une force extrêmement concentrée à un endroit précis du champ de bataille» a de sérieuses chances de «briser le système unipartite», ses délires de «liberté» (économique) devraient se contenter de séduire quelques nababs de la Silicon Valley et une poignée d’opportunistes qui estimeront n’avoir pas eu droit au traitement qu’ils méritaient avec Donald Trump.

Et certains se sont déjà avancés publiquement:

  • Anthony Scaramucci, ancien porte-parole de Trump, viré en 2017, s’est empressé d’écrire à Musk: «J'aimerais vous rencontrer pour discuter».
  • Brian Krassenstein, un créateur de contenu très actif sur X a exulté: «Génial! Où pouvons-nous trouver plus d’informations?»
  • Selon Newsweek, «Tyler Palmer, un investisseur et producteur technologique, lui a demandé où envoyer des dons».
  • Mark Cuban, l’ancien directeur de campagne de Donald Trump, s’est également dit séduit par l’idée.

Si Elon Musk a déjà réussi à lancer des fusées dans l’espace et populariser des voitures électriques à travers le monde, le chemin pour fonder un nouveau parti est semé d’embûches, particulièrement aux Etats-Unis, où le bipartisme est ancré dans le cerveau électoral des Américains. Et le patron de SpaceX n’est pas le premier milliardaire à penser qu’il peut bouleverser la politique en sortant le carnet de chèques. Les obstacles institutionnels vont se dresser face à lui, bien avant qu’il puisse prendre concrètement le pouls des Américains sur un tel projet.

«Un individu très riche ne peut pas financer un nouveau parti politique national, comme il pourrait créer une entreprise, en raison des limites fédérales en matière de contributions. La perspective qu’il participe aux élections fédérales dans tout le pays est irréalisable»
Lee Goodman, ancien président de la Federal Election Commission (FEC), sur CNN dimanche.

Enfin, si ses idées sont parfois bien accueillies, Elon Musk n’est pas l’être humain le plus populaire de pays. Et, de loin pas. Une étude réalisée le mois dernier révèle que «seulement 30% des électeurs ont une opinion favorable du milliardaire de la tech, tandis que 57% en ont une opinion défavorable», rappelait notamment The Independant.

Elon Musk, fantasque personnage digne des méchants de la franchise Marvel, est beaucoup plus franc et direct que Donald Trump. Aujourd’hui, pas grand monde ne semble prêt à avaler l’idée que l’homme le plus riche du monde en a quelque chose à ficher du peuple américain. En revanche, même s'il est sans doute trop tard pour prendre des cours du soir de démagogie électorale, le magnat aura suffisamment de pouvoir et d'argent pour mettre quelques bâtons dans les roues du président et brandit déjà ses premières menaces en vue des Midterms, l’année prochaine.

Genève célèbre l'Euro féminin avec une fresque géante
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
1 Commentaire
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
1
Jair Bolsonaro contraint de porter un bracelet électronique
L'ex-président brésilien Jair Bolsonaro s'est vu contraint de porter un bracelet électronique à partir de vendredi par un juge de la Cour suprême. Il lui reproche d'inciter, avec son fils Eduardo, à des «actes hostiles» contre le Brésil.
Actuellement en procès pour une présumée tentative de coup d'Etat contre l'actuel président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, Jair Bolsonaro a dénoncé devant la presse une «suprême humiliation» à la sortie des bureaux du secrétariat à la Justice du district de Brasilia.
L’article