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Ukraine: les avions de combat ne sont plus un tabou

A Royal Netherlands Air Force F-16 Fighting Falcon fighter jet landing at its homebase in Volkel, Netherlands. model released Copyright: DirkxJanxdexRidder/StocktrekxImages DJR100039M
Les Pays-Bas sont par principe prêts à transférer leurs avions F-16 (photo) à l'Ukraine.image: www.imago-images.de
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Les avions de combat ne sont plus un tabou

Plusieurs pays se montrent ouverts à la livraison d'avions de combat à l'Ukraine. Cela s'explique notamment par le manque de volonté de la Russie de mener des négociations concrètes.
31.01.2023, 18:4108.05.2023, 11:40
Peter Blunschi
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Olaf Scholz est actuellement en voyage en Amérique du Sud. Toutefois, le chancelier allemand ne peut pas échapper au douloureux débat sur les livraisons d'armes à l'Ukraine. La semaine dernière, il a donné son accord à la livraison de chars Leopard, après avoir longuement hésité. Le débat porte désormais sur les avions de combat.

Ces deux éléments ont longtemps été considérés comme tabous par les pays occidentaux. La crainte était trop grande que l'Otan ne soit entraînée dans le conflit. En tant que chancelier, il devait «tout faire pour que la guerre de la Russie contre l'Ukraine ne devienne pas une guerre entre la Russie et l'Otan», a déclaré Scholz dans une interview au Tagesspiegel.

Pour les chars Léopard, il avait insisté sur une large alliance, en particulier avec la participation des Etats-Unis, qui a finalement vu le jour. En revanche, il a qualifié la livraison d'avions de combat de «ligne rouge» devant le parlement allemand. Le débat avait pourtant été lancé depuis longtemps suite aux demandes de Kiev à ce sujet.

Plusieurs pays se montrent ouverts

Même en Allemagne, de plus en plus de voix s'élèvent pour dire que les avions de combat pour l'Ukraine ne doivent pas être un tabou. La chef du SPD, Saskia Esken, qui fait partie de l'aile gauche du parti, n'a pas voulu exclure une livraison dimanche sur la chaîne ARD. Lors d'une conférence de presse à Santiago du Chili, Olaf Scholz s'est agacé de ce débat «singulier».

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Il ne peut toutefois pas empêcher le débat. Ces derniers jours, plusieurs pays se sont montrés ouverts à un transfert d'avions de combat. Comme souvent, c'est la Pologne, principal soutien de l'Ukraine au sein de l'OTAN, qui s'est exprimée le plus clairement. Le ministre néerlandais des Affaires étrangères, Wopke Hoekstra, a déclaré la semaine dernière au Parlement qu'il était prêt à livrer des avions F-16.

Deux points de vue au Pentagone

Selon CNN, les Pays-Bas disposent encore de 24 F-16, qui seront désormais remplacés par le modèle F-35 pour lequel la Suisse a également opté. La condition préalable à une transmission à l'Ukraine est l'accord des Etats-Unis, a déclaré Hoekstra. Cette approbation pourrait intervenir prochainement, car à Washington, on n'exclut pas la livraison d'avions de combat.

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Lors de son voyage en Amérique du Sud, Olaf Scholz a dû s'exprimer dimanche à Santiago du Chili sur les avions de combat.image: keystone

«Nous allons en discuter très soigneusement», a déclaré la semaine dernière Jon Finer, le conseiller adjoint à la sécurité du président Joe Biden, à la chaîne MSNBC. Selon le portail Politico, toujours bien informé, il existe deux points de vue au sein du Pentagone: une partie des fonctionnaires veut mettre à disposition davantage de systèmes de défense aérienne, d'autres font la promotion du F-16.

Pour le moment, le président américain Biden lui-même exclut la livraison de ses propres F-16. A la question d'une journaliste: «Les Etats-Unis vont-ils fournir des F-16 à l'Ukraine?», Biden a répondu «non», lundi, à Washington.

La Russie sans souveraineté aérienne

L'avion de combat F-16 du constructeur Lockheed Martin est utilisé en grand nombre depuis des décennies. Il pourrait donner aux Ukrainiens un avantage considérable dans la défense de leur espace aérien et la lutte contre les envahisseurs russes. Jusqu'à présent, aucun des deux belligérants n'a réussi à s'assurer la souveraineté aérienne au-dessus de l'Ukraine.

La Russie dispose, prétendument, d'une grande flotte d'avions de combat modernes, mais ceux-ci ne sont utilisés que de manière sélective et de moins en moins souvent ces derniers temps. Cela est dû en grande partie à la livraison de systèmes de défense aérienne occidentaux. Ils sont toutefois principalement utilisés pour abattre les missiles russes et les missiles de croisière tirés sur des cibles civiles.

Liste de 50 pilotes

Selon Politico, le Pentagone craint que l'Ukraine ne soit bientôt à court de munitions pour ce système. Les avions de combat seraient donc une solution, car ils pourraient, eux aussi, intercepter des missiles et des drones et surtout agir de manière beaucoup plus flexible. Les analystes préviennent toutefois que cela nécessiterait de désactiver les systèmes de défense russes S-400 et S-300.

Les critiques se demandent également si les Ukrainiens pourront maîtriser les F-16 dans un délai raisonnable. Kiev semble toutefois avoir établi une liste comprenant jusqu'à 50 pilotes expérimentés qui parlent anglais et pourraient être formés en trois mois. Nombre d'entre eux auraient participé à des exercices militaires communs avec les Américains.

Un large arsenal pour l'Ukraine

Comme alternative au jet américain, il est en outre question de transférer des MiG-29 et Su-27 soviétiques. Ces appareils sont déjà utilisés par l'armée de l'air ukrainienne. La Slovaquie a indiqué qu'elle était prête à transférer ses MiG-29 en Ukraine, et la Pologne a déjà proposé 28 MiG-29 en échange de chasseurs américains.

Les Etats-Unis ont réagi de manière négative, par crainte d'une escalade. Cette inhibition semble tomber. Cela s'explique aussi par le fait que la Russie n'est pas prête à entamer des négociations sérieuses pour mettre fin aux combats. Le Kremlin exige comme condition que l'annexion des quatre régions de l'est et du sud soit reconnue, ce qui est impensable pour l'Ukraine.

Les alliés occidentaux ont donc compris que l'Ukraine avait besoin d'un arsenal aussi large que possible avec des systèmes d'armes modernes et efficaces. En plus des lance-missiles Himars, les chars de combat et les avions en font partie, bien qu'ils augmentent le risque que la guerre s'étende à la Russie.

C'est ce que craignent les Allemands, et c'est pourquoi Olaf Scholz s'oppose aux avions de combat et déplore la «surenchère permanente». Il n'est toutefois pas certain qu'il puisse tenir sa «ligne rouge». Même la France, très réticente en matière de livraison d'armes, a envoyé la semaine dernière des signaux indiquant que les avions de combat n'étaient pas tabous.

Traduit de l'allemand par nva

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