C'est une information qui peut faire sourire, mais qui ne prête pas à rire. La Chine avait prêté trois pandas aux Etats-Unis pour illustrer les liens entre les deux Etats. Et ceci a un nom, la «diplomatie du panda». Elle figure dans l'arsenal du soft-power chinois.
Mais voilà, quelques jours avant la visite de Xi Jinping à San Francisco, le 15 novembre, Pékin les avait rapatriés à la maison. Tout un symbole.
Les trois pandas ont été accueillis avec enthousiasme dans leur pays d'origine. Sur les réseaux sociaux, des millions de Chinois ont regardé Tian Tian, Mei Xiang et leur petit Xiao Qi Ji prendre leur premier repas à Chengdu. Le menu comprenait, comme il se doit, une énorme portion de bambou. «Enfin de retour à la maison!», peut-on lire dans un commentaire partagé des milliers de fois sur la plateforme en ligne Weibo.
Cette semaine, les trois derniers pandas ont quitté le zoo de Washington. Les adieux ont eu lieu sous une grande affluence de visiteurs et une escorte policière.
Leur retour marque également la fin d'une époque historique: pour la première fois depuis 51 ans, il n'y a plus de pandas dans la capitale des Etats-Unis, et ce quelques jours seulement avant que les deux chefs d'Etat Joe Biden et Xi Jinping n'entament un nouveau départ diplomatique lors du sommet prévu à San Francisco.
Dès la dynastie Tang, l'empereur chinois a prêté des pandas géants à des pays amis. Mao Zedong, fondateur de la République populaire de Chine, a finalement renoué avec la tradition dans les années cinquante. Ces animaux câlins étaient les parfaits représentants de leur pays: joueurs, paisibles et extrêmement populaires.
En 1972, l'ancien ennemi juré, les Etats-Unis, a lui aussi reçu ses deux premiers pandas de Chine. Le président de l'époque, Richard Nixon, s'est rendu à Pékin pour normaliser les relations diplomatiques avec l'Etat communiste. Selon la rumeur, sa femme Patricia aurait été particulièrement séduite par les pandas chinois. Le premier ministre Zhou Enlai a rapidement réagi et a immédiatement envoyé à Washington le couple Ling-Ling et Hsing-Hsing, deux pandas particulièrement grands.
Depuis les années 1980, ces animaux ne sont plus offerts par la République populaire, mais seulement prêtés contre une redevance annuelle pouvant atteindre un million de dollars. Et depuis longtemps, les pandas n'améliorent plus seulement l'image de la République populaire, mais lui apportent aussi des résultats tangibles: comme l'ont montré de nombreuses études universitaires et thèses de doctorat, les prêts de pandas ont souvent été accompagnés d'accords commerciaux bilatéraux et d'exportations lucratives.
Mais désormais, Washington devra se passer de ces représentants diplomatiques poilus. Ce n'est pas un hasard, car les relations entre les deux puissances mondiales sont en chute libre depuis des années déjà: on se dispute à propos des droits humains, de la propriété intellectuelle, des sanctions technologiques. Pendant la pandémie, il y a même eu une longue période de silence radio presque total.
Mais dans quelques jours, les deux chefs d'Etat se rencontreront à nouveau en personne, des discussions étant prévues lors du sommet de la Communauté économique Asie-Pacifique (Apec) à San Francisco. Les préparatifs de cette rencontre ont déjà permis de réchauffer la glaciation diplomatique: les deux parties ont rouvert des canaux de discussion et ont nettement réduit les provocations rhétoriques.
Pourtant, les provocations militaires n'ont pas diminué, bien au contraire. Ces dernières semaines, des manœuvres dangereuses avec des navires et des avions de combat chinois ont eu lieu toutes les semaines, en particulier en mer de Chine méridionale. Si l'opinion publique mondiale en est informée, c'est surtout parce que les services secrets américains publient pour la première fois des vidéos de preuves de ces quasi-collisions.
Le fait que la République populaire poursuive avec de plus en plus d'assurance et parfois d'agressivité ses intérêts en matière de politique étrangère est avant tout lié au nouveau style de Xi Jinping. Ces dernières années, de plus en plus d'animaux ont été rappelés en Chine, tandis que les nouveaux prêts se sont faits plus rares.
Quelques pandas chinois se trouvent encore au zoo d'Atlanta, ce sont les derniers aux Etats-Unis. Mais leur retour est imminent: ils devraient s'envoler pour la Chine en 2024, quand leur contrat de prêt prendra fin.
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder