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Sécurité, immigration, wokisme: les effets de l'élection de Trump

Republican presidential nominee former President Donald Trump arrives at an election night watch party at the Palm Beach Convention Center, Wednesday, Nov. 6, 2024, in West Palm Beach, Fla. (AP Photo/ ...
Donald Trump, Palm Beach, 6 novembre 2024Image: AP
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Sécurité, immigration, wokisme: Trump va bouleverser nos vies

La victoire de Donald Trump aux Etats-Unis aura un impact en Europe sur des questions sécuritaires et sociétales, entre autres. Allons dans le détail.
06.11.2024, 18:4607.11.2024, 13:11
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On a beaucoup parlé ces dernières années d’une possible guerre civile aux Etats-Unis, fracturés entre deux visions supposément irréconciliables de l’Amérique. Que va-t-il se passer dans la plus grande puissance du monde, à présent que Donald Trump, qui a beaucoup contribué à cette fracturation, triomphe? On verra. L'unité l'emportera peut-être sur la division.

C’est pour l’Europe qu’il faut s’inquiéter le plus. L’Europe ne forme pas un Etat et elle ne parle pas d’une même voix. Contrairement aux Etats-Unis et faute d’unité nationale, elle n’a pas les moyens de ses rêves de grandeur, si tant est qu’elle en ait. L’Europe doute de ses forces au moment où les Etats-Unis, animés d’une foi légendaire, croient en les leurs. Ce qui est sûr, c’est que la victoire de Donald Trump aura des répercussions dans une Europe sans doute encore plus fracturée que les Etats-Unis ne le sont.

Risque d'éclatement

Idéalement, le protectionnisme affiché par la «nouvelle Amérique» de Donald Trump devrait inciter les Européens, en premier lieu la France et l’Allemagne, à s’entendre sur des politiques économiques et de défense communes. Voilà pour l’idéal, car on peut penser à l’inverse que le risque d’éclatement de l’Union européenne est accru avec la victoire de Donald Trump. Il faut s’attendre à ce que la méthode tout en fracas du républicain fasse des émules sur le Vieux Continent.

Le terrain est déjà balisé. La droite populiste exerce le pouvoir en Suède, au Danemark, aux Pays-Bas, en Italie, en Autriche, en Hongrie, ainsi qu’en Suisse avec l’UDC. Des partis de type libertarien, qui n’existent pas encore, voudront peut-être s’inspirer de l’exemple américain dopé à la testostérone et au rejet de l’Etat.

Désunion militaire?

Alors que Donald Trump pourrait réduire la surface du parapluie américain protégeant l’Europe, les pays qui la composent se demandent comment ils se débrouilleront désormais face aux menaces, la menace russe en particulier. Certains, constatant leur faiblesse diplomatique et militaire, voudront traiter avec Moscou, perçu comme l'homme fort de l'Europe, d’autres ne le voudront à aucun prix. Un désaccord aussi profond pourrait faire voler la construction européenne en éclats.

Aujourd’hui, les pays européens réarment. Mais réarmer coûte extrêmement cher et pèse sur le budget des Etats. Bien plus protectrice que les Etats-Unis, l’Europe pourrait connaître des heurts à répétition si les dépenses sociales devaient diminuer ou au contraire fortement augmenter, avec pour effet une hausse insupportable des impôts, des primes ou des cotisations.

Immigration et droit à l'avortement

Donald Trump a promis de recourir aux grands moyens pour reconduire à la frontière les immigrés clandestins – le fera-t-il? Le thème de l’immigration est devenu un enjeu identitaire excédant le périmètre de l’extrême droite. En Europe, la crainte de la submersion migratoire grandit en proportion de la baisse de la natalité chez les citoyens d’origine européenne. Certains parlent d'insécurité culturelle, une notion considérée par d'autres comme raciste.

L’Europe n’a pas attendu l’élection de Donald Trump mardi aux Etats-Unis pour limiter les flux migratoires. La tendance ne devrait pas s’inverser, d’autant que les populations arrivantes sont généralement originaires de pays de culture musulmane, où se manifestent parfois des radicalités empruntant au clash des civilisations. La victoire de Donald Trump pourrait accentuer en Europe la détermination d’une partie du spectre politique à s’opposer à toute immigration. Cela pourrait avoir une incidence sur la politique de la natalité, les naissances venant à manquer, et remettre en cause, comme aux Etats-Unis, le droit à l’avortement.

Le wokisme sur la sellette

La victoire haut la main de Donald Trump marque la défaite de la gauche woke, que Kamala Harris, sans en être l’incarnation, représentait dans cette élection. On a peut-être assisté mardi au début de la fin de cette idéologie de la transformation anthropologique et sociale. Il est plus que probable que les discours sur la déconstruction des individus, en particulier des hommes blanc «cisgenres», ont joué un rôle dans le succès du candidat républicain.

Les expressions telles que «masculinité toxique» ou «culture du viol», qui sont empreintes d’idéologie et qui font passer les hommes pour des prédateurs en puissance qu’il faudrait en permanence éduquer, ont suscité un ras-le-bol dans l’électorat Trump et sûrement au-delà. A ce titre, le vote Trump, davantage qu’un vote masculin, est un vote sexué, où l’électorat homme et femme a remis de la différence des sexes, c’est-à-dire des repères, là où prévalait l’impression d’un grand marché ouvert du genre.

Cette reprise en main du sexe sur le genre devrait avoir un prolongement en Europe, où la lassitude gagne face à des démarches sociétales relayées par des administrations publiques, parfois sans mandat politique.

Avertissement pour la gauche

Le scrutin américain devrait servir de leçon aux gauches européennes qui ont fait de la défense des minorités leur axe politique. Résultat: les classes populaires – la Suisse fait exception grâce à un pôle syndicaliste protectionniste – se détournent des partis de gauche, dont le discours victimaire rabaissent ceux à qui il s’adresse. La leçon que la gauche retiendra peut-être, c’est que les programmes centrés sur les identités dites dominées, plutôt que sur le social ou le pays en tant que tel, n’est pas payant. Aux Etats-Unis, la candidate démocrate Kamala Harris peut éprouver un sentiment d’ingratitude vis-à-vis de ceux des électeurs noirs qui n’ont pas voté pour elle, parce qu’elle est une femme.

Le risque du vote Trump, c'est que le détricotage du wokisme entraîne un détricotage des libertés des minorités, notamment sexuelles, autrement dit de l'intolérance vis-à-vis d'elles. Le risque du vote Trump est bien celui de l'intolérance, partant, de la violence, même si son électorat paraît tout à fait divers, en termes de couleurs, d'origines et sans doute aussi d'orientations sexuelles.

«Le peuple a gagné, la presse-poubelle a perdu»

L'Europe comme les Etats-Unis est gagnée par des théories farfelues, complotistes et souvent hargneuses. La victoire de Donald Trump était à peine acquise que des comptes européens aux centaines de milliers d'abonnés, admirateurs de Tucker Carlson et autres faiseurs de vérités alternatives, en concluaient que «le peuple a gagné» et que «la presse-poubelle a perdu».

Le grand atout de l'Europe, c'est son attachement à l'universalisme, qui va de pair avec la raison. Le danger de la victoire de Donald Trump, ce n'est pas tant que la bigoterie l'emporte sur la raison en Europe, mais que les réseaux sociaux, où pullulent les fake news, deviennent, avec le réseau X d'Elon Musk en navire amiral de la communication trumpiste, les principaux vecteurs d'«information» – ce qu'ils sont déjà en partie –, en lieu et place de la presse traditionnelle. D'où l'intérêt, pour cette dernière, d'être diverse et surtout sans peurs.

- Trump se met en scène dans un camion-poubelle
Video: watson
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