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Museler CNews ne freinera pas l'extrême droite

Museler CNews ne freinera pas l'extrême droite
CNews, la chaîne du milliardaire Vincent Bolloré, lequel ne fait pas mystère de ses penchants catholico-conservateurs, est la cible d’un raid qui vise à la neutraliser.Image: watson/shutterstock
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Ce n'est pas en muselant CNews que vous arrêterez l'extrême droite

En France, l'Etat mobilise ses instruments de contrôle pour imposer le «pluralisme» aux radios et télés, la sulfureuse CNews en premier. Comme une impression de panique.
19.02.2024, 20:4721.02.2024, 08:55
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Comme on dit, y’a débat. Faut-il couper le micro à l’extrême droite pour réduire ses chances d’accéder au pouvoir? Ou toute forme de censure à son encontre, non seulement n’empêcherait rien, mais favoriserait plutôt ce qu’on cherche à éviter? Fin du suspense: on penche pour le deuxième scénario. En politique, la censure a tendance à faire le jeu du censuré.

En l’occurrence, la question se pose en France pour un média jugé d’extrême droite par ses adversaires de gauche: CNews. La chaîne du milliardaire Vincent Bolloré, lequel ne fait pas mystère de ses penchants catholico-conservateurs, est la cible d’un raid qui vise à la neutraliser. Ce n’est pas ainsi que les choses sont dites par ceux qui veulent la museler, mais c’est bien le but recherché. watson a donné la parole à l’un d’eux la semaine dernière.👇

Un vent de panique souffle à l’idée que le Rassemblement national puisse s’installer à l’Eylsée lors de la prochaine élection présidentielle, en 2027. CNews, chaîne de la TNT, diffusée sur l’ensemble du territoire comme TF1 ou France 2, est vue par ses nombreux détracteurs comme le marchepied médiatique de Marine Le Pen.

Ont-ils tort? Pas vraiment. Ce qu’on y entend n’est pas de nature à décourager un vote en faveur de la présidente du RN dans trois ans.

Emmanuel Macron enfourche à son tour le lexique de la disqualification. «Je n’ai jamais considéré que le RN ou Reconquête s’inscrivaient dans l’"arc républicain"», déclare-t-il dans une interview publiée dimanche par le journal communiste L’Humanité.

Le RN à nouveau indésirable à une cérémonie nationale

Visant le RN et Reconquête, le parti d'Eric Zemmour, le chef de l’Etat dit encore que «les forces d’extrême droite seraient inspirées de ne pas être présentes» mercredi à la panthéonisation du couple communiste résistant Missak et Mélinée Manouchian, issu de cette diaspora arménienne qui avait échappé au génocide commis par la Turquie entre 1915 et 1916. Alors que Mélinée a survécu à la Seconde Guerre mondiale, son époux Missak, l’une des têtes mises à prix sur la célèbre affiche rouge, a été fusillé par les Allemands le 17 février 1944.

Si l’histoire de la Seconde Guerre mondiale ne plaide pas en faveur du RN, l’époque actuelle lui est bien plus favorable. Et l'on en revient à CNews. Il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas reconnaître qu’un ton pète-sec propre à l’extrême droite s’échappe de ses plateaux en certaines occasions. Mais c’est moins pour cette raison que parce qu’elle s’autorise à dire ce qui est tu ou minimisé ailleurs, que CNews, de plus en plus souvent en tête des audiences des chaînes d'information, séduit, à l'inverse, fait peur.

«Free Palestine» au Bataclan

C’est elle, avec toute la galaxie identitaire comprenant le site Valeurs actuelles, qui, dimanche, a rendu compte des «Free Palestine» entonnés le 10 février au Bataclan, la salle parisienne marquée par les attentats islamistes du 13 novembre 2015. Cela s'est passé lors d'un concert du duo syro-allemand Shkoon. Militer pour une Palestine libre fait-il de vous un djihadiste? Non.

Mais on ne peut jurer que tous les spectateurs présents ce soir-là au Bataclan aient condamné le pogrom commis par le Hamas le 7 octobre en Israël. Ces «Free Palestine» ont été ressentis comme une «profanation» par certains, comme une faute et une douleur par beaucoup d’autres s’exprimant sur les réseaux sociaux.

Lundi matin, à part la galaxie précitée, en plus de la chaîne israélienne I24News, aucun autre média n’évoquait cette soirée du 10 février. Moralité: CNews peut se gargariser d’être la seule chaîne en France à parler de ce que ses concurrentes «taisent», pire, «cachent aux Français».

Pour l’heure, sur décision du Conseil d’Etat, la plus haute cour administrative française, l’Arcom, l'autorité de contrôle de l'audiovisuel, est chargée d’élaborer dans les six mois des mesures qui doivent permettre de faire respecter la règle du pluralisme sur l’ensemble des télés et radios bénéficiant d’une concession d’Etat. CNews n’est donc pas la seule concernée, alors que c’était bien elle et elle seule qui était visée à l’origine par cette volonté de recadrage.

Usine à gaz

Sans doute prend-on le chemin de l’usine à gaz. On voit mal en effet comment on pourra demander à chacune des personnes intervenant sur une chaîne de radio ou de télé de se positionner idéologiquement – la chose demandée pour parvenir à plus de pluralisme – sans paraître liberticide. Voilà la situation ridicule où risque de conduire l'état de panique apparent face à la progression du RN dans les sondages à cinq mois des élections européennes.

L’Arcom, jusqu’ici, a privilégié la «liberté d’expression» au «flicage». Elle n’en délivre pas moins à l'occasion des amendes salées pour manquements à la déontologie, en particulier contre TPMP et son animateur Cyril Hanouna, qui officie sur C8, la chaîne Bolloré… Peut-être l’Arcom devrait-elle envisager des interdictions provisoires d’émettre, en cas de diffusion de fake news ou d’incitation à la haine. Il n’en reste pas moins que CNews s’empare de sujets d’intérêt public, pensons à l’insécurité, que d'autres délaissent ou traitent de façon superficielle de crainte de stigmatiser.

Les arguments contre l'extrême droite

Pour contrer l'extrême droite – et l'extrême gauche, dont Emmanuel Macron ne néglige pas la dangerosité –, le mieux est encore de se montrer ferme avec les délinquants et de rappeler qu'il n'est pas dans l'intérêt de la France d'être gouvernée par des individus qui, il y a peu encore, voyaient en Vladimir Poutine un modèle.

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