L’attentat de Magdebourg, dans le Land de Saxe-Anhalt, en ex-République démocratique allemande, survient à deux mois des élections législatives anticipées en Allemagne. La complosphère y voit tout sauf un hasard. Le tueur aurait été manipulé par les «sionistes» pour discréditer le parti d’extrême droite AfD, donné deuxième dans les sondages au niveau fédéral, derrière la CDU, mais quasiment à égalité avec les chrétiens-démocrates dans les Länder d’ex-Allemagne de l’Est et en tête dans celui de Thuringe.
Le tueur étant décrit comme un proche de l’extrême-droite allemande, son acte meurtrier, contre un marché de Noël, marqueur identitaire associé à la chrétienté, fût-elle consumériste et partiellement déchristianisée, montrerait par l’absurde à quelle folie mènent les idées extrémistes, en l’occurrence, les idées d’extrême droite.
On verra ce que les sondages diront dans les prochains jours. Mais les Allemands dans leur ensemble pourraient attacher moins d’importance à l’appartenance du tueur à l’extrême droite – ses écrits sur les réseaux sociaux le laissent grandement penser –, qu’au fait qu’il est étranger et originaire d’un pays musulman. Son hostilité déclarée à l’islam n’y changerait rien. D’autant plus qu’il s’est attaqué à un marché de Noël.
Le présenter comme «islamophobe» risque d’ajouter à la colère de l’électorat, pas seulement celui de l'AfD, qui verra là une entourloupe: c’est comme si son acte consistant à tuer le plus grand nombre de gens sur un marché de Noël était à son tour islamophobe. Cela ne tient pas debout... Mais où est la logique chez ce psychiatre saoudien, dont les déclarations donnent à penser qu'il était habité par un syndrome de persécution?
On serait bien avisé, à ce propos, de ne pas abuser du qualificatif d’islamophobe, remis en selle par les islamistes à la fin des années 1970 pour interdire toute critique de l’islam et contestation des révolutions islamiques. Samuel Paty – le procès des complices et associés de son assassin vient de se terminer –, avant lui la rédaction de Charlie Hebdo, bien d’autres qui n’avaient aucune haine envers l’islam et les musulmans, ont payé de leur vie d’avoir été traités d’islamophobes par des islamistes. D'autres termes existent pour qualifier une hostilité à l’islam: haine de l’islam, anti-islam, opposition à l’islam, racisme anti-musulman, etc.
Face à la tuerie de Magdebourg, on sent que certains sont pressés de connaître le fin mot, si l’on peut dire, de cette horreur. Pour les uns, c’est signé extrême droite. Pour d’autres, c’est un attentat islamiste déguisé en haine de l’islam, selon le dispositif de la dissimulation, la taqiya. Les indices dont on dispose à cette heure témoignent surtout d’une profonde confusion mentale chez l’auteur de ce terrible forfait. On ne peut exclure la concomitance, dans sa tête d'apostat déclaré, de pensées contradictoires: d'une part, le rejet de l’islam, de l'autre, un sentiment de culpabilité, tant l'apostasie ne va pas de soi dans la sphère islamique. Ce genre de cocktail, fait de conflit de loyauté, peut être détonant.
Politiquement, l’attentat de Magdebourg, qui survient après deux autres cette année, à Mannheim en mai, à Solingen en août, commis par des requérants d’asile musulmans qui avaient été déboutés, est ce qui pouvait arriver de pire à l’approche des législatives anticipées de février. Voici qu'Elon Musk, le conseiller électron libre de Donald Trump, par ailleurs investisseur dans une «giga-usine» Tesla près de Berlin, s'ingère dans les affaires intérieures allemandes. Sur son réseau social X, tel un troll russe cherchant à semer la zizanie, il appelle à voter AfD, avec ce slogan: «Seul l'AfD peut sauver l'Allemagne.»
Only AfD can save Germany https://t.co/8TNZVEZGh5
— Elon Musk (@elonmusk) December 22, 2024
L’AfD, le parti du ressentiment qui prône la remigration et qui ne cache pas sa préférence pour Poutine plutôt que pour Zelensky, risque de mettre l’Allemagne dans une situation délicate. La CDU, qui durcira la politique de l’asile si elle arrive au pouvoir, ce qui est probable, fait figure de rempart et de refuge face à l’extrême-droite. Les Allemands en sont conscients. Heureusement qu’il reste la CDU en Allemagne.