International
Commentaire

L’UE viole ses règles et le Conseil fédéral doit en profiter

Bundesrat Beat Jans spricht waehrend einer Medienkonferenz ueber seine ersten 100 Tage im Amt, am Dienstag, 2. April 2024 in Bern. (KEYSTONE/Peter Klaunzer)
Beat Jans semble n'avoir aucun poids face à ses collègues allemands et italiens.Keystone
Commentaire

L’UE viole ses propres règles et le Conseil fédéral doit en profiter

Schengen, Dublin, Maastricht: aucun de ces accords ne fonctionne comme prévu et les exceptions tolérées par l'UE sont nombreuses, très nombreuses. Pour la Suisse, c'est le moment opportun pour réclamer une clause de sauvegarde en matière d'immigration.
28.04.2024, 15:5429.04.2024, 16:26
Francesco Benini / ch media
Plus de «International»

L'Allemagne foule au pied les accords de Schengen. Depuis octobre dernier, Berlin a remis au goût du jour les contrôles aux frontières avec la République tchèque, la Pologne et... la Suisse. Le but? Empêcher les entrées illégales de migrants dans le pays.

Il n'est pas impossible d'effectuer ces contrôles aux frontières entre pays signataires, tant qu'il s'agit de «situations exceptionnelles» et pour une «durée limitée». Est-ce le cas? Lundi dernier à Bâle, la ministre de l'Intérieur Nancy Faeser a en tout cas indiqué que ces contrôles aux frontières allaient continuer à avoir lieu du côté allemand, au grand dam du conseiller fédéral Beat Jans, en charge de l'asile.

Nancy Faeser (Bundesministerin des Innern und fuer Heimat der Bundesrepublik Deutschland) und Beat Jans (Vorsteher des Eidgenoessischen Justiz- und Polizeidepartementes der Schweiz), von links, an ein ...
Nancy Faeser et Beat Jans.Keystone

Pour Beat Jans, le problème est présent au nord et au sud du pays. Car l'Italie pose également des problèmes en s'opposant, depuis décembre 2022, aux réadmissions de clandestins attrapés en Suisse, enfreignant au passage la Convention de Dublin.

Les bilatérales III en arrière-plan

Le traité de Maastricht semble lui aussi avoir été relégué au second plan. Les critères de convergence prévoient que l'endettement des Etats membres ne doit pas dépasser 3% du produit intérieur brut au cours d'une année. Mais l'année dernière, ce chiffre était de 5,5% en France et même de 7,4% en Italie. L'Union européenne (UE) a cependant renoncé aux sanctions prévues et applique à la place des mesures «individuelles».

La Suisse ne doit pas ignorer ces violations des traités, alors qu'un nouveau paquet d'accords avec l'UE est actuellement en cours de négociation. Car le Conseil fédéral souhaite une clause de sauvegarde concernant la libre circulation des personnes et une immigration nette à 100 000 personnes. Un pari osé, puisque seul le Luxembourg enregistre un nombre d'arrivées comparable.

En Suisse, tous les partis politiques affichent un certain scepticisme face à une immigration de plus en plus forte. La clause de sauvegarde voulue par le Conseil fédéral n'est donc pas un simple caprice. Mais sans surprise, les représentants de la Commission européenne se montrent réticents. Pour eux, la libre circulation des personnes est gravée dans le marbre et elles jugent que c'est à la Suisse de plier sur cette question.

Un rigorisme déplacé

Mais ce rigorisme de la part de nos partenaires européens est parfaitement déplacé. Car la Suisse ne fait pas partie de l'UE, bien qu'elle a signé les accords de Schengen et de Dublin. Le Conseil fédéral a bien tenté de pousser l'Allemagne et l'Italie à respecter ces accords, jusqu'ici sans résultat, à l'image de la récente réunion entre Beat Jans et Nancy Faeser. Et à Berne, où on est directement concerné par le fait que les Etats de l'UE ne respectent plus ces accords, on laisse faire.

Il est évident que la réalité des choses en ce moment diffère des hypothèses retenues lors de la rédaction des accords. La Convention de Dublin prévoit que les demandes d'asile ne peuvent pas être déposées dans plusieurs pays. Une bonne idée théoriquement, mais qui a pratiquement entraîné une surcharge de la capacité d'accueil de l'Italie.

Bundespraesidentin Viola Amherd, rechts, diskutiert mit Staatssekretaer Alexandre Fasel, nach ihren Treffen in der EU-Kommission, am Montag, 18. Maerz 2024 in Bruessel, Belgien. Der Besuch der Bundesp ...
Le secrétaire d'Etat du DFAE Alexandre Fasel et la conseillère fédérale Viola Amherd, en visite à Bruxelles pour le lancement des «Bilatérales III», en mars dernier.Keystone

Il en va de même pour la libre circulation des personnes: elle n'a pas eu les effets escomptés par les fonctionnaires européens. L'harmonisation économique des pays de l'UE ne se déroule pas comme prévu. Les Pays-Bas se plaignent d'une crise du logement causée par une forte immigration. Pendant ce temps-là, la Croatie est en train de se dépeupler. Et le secteur touristique croate est tributaire de la main-d'œuvre d'Asie du Sud-Est.

Un retour programmé vers un échec?

Le paquet d'accords discuté entraînera une perte de souveraineté pour la Suisse, un obstacle de taille dans une votation populaire. Une clause de sauvegarde en matière d'immigration revaloriserait considérablement l'accord du point de vue helvétique. Le Conseil fédéral est en droit d'exiger de l'Union européenne la flexibilité que ses membres pratiquent eux-mêmes.

Y a-t-il une alternative? C'est bien simple: si la Commission européenne persiste dans sa position de refus, le Conseil fédéral devra lui faire comprendre que le paquet d'accords risque de subir le même sort que lors de la première édition en 2021: un échec.

(Traduit et adapté par Anaïs Rey)

Ce petit rat est chauffeur de taxi
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
2 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
2
Pourquoi Léon sera un pape «soft»
Léon XIV, élu pape, incarne un pontificat modéré et réformateur. Il poursuit l’héritage de François avec un focus sur la justice sociale et les périphéries, analyse un expert.

L'élection comme pape de Robert Francis Prevost marque «un succès posthume de François» et «une opposition au gouvernement américain», estime François Mabille, directeur de l'Observatoire géopolitique du religieux et auteur du livre Le Vatican: La papauté face à un monde en crise.

L’article