International
Commentaire

Ukraine: Non, Macron n'a pas échoué face à Poutine (Commentaire)

Bras de fer Macron Poutine
Image: Montage watson
Commentaire

Non, Macron n'a pas échoué face à Poutine

Il est facile, surtout de la part des prétendants à l'Elysée, de critiquer l'engagement diplomatique d'Emmanuel Macron face à Vladimir Poutine depuis que ce dernier a fait volte-face sur ses promesses. Et c'est surtout insensé.
25.02.2022, 19:4126.02.2022, 11:44
Plus de «International»

Oui, les différents appels téléphoniques entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine n'ont finalement pas porté leurs fruits. Oui, la communication d'En Marche il y a quelques jours sur l'armée russe qui recule parce que «Macron, c'est l'Europe et la paix» a pris un sacré coup de vieux le 21 février, quand Poutine a reconnu la souveraineté des séparatistes, et encore plus le 24 février au matin, quand Poutine a annoncé son intervention militaire en Ukraine.

Oui encore, le dirigeant français n'a pas manqué de se mettre en valeur. Oui, il prédisait tout le contraire du scénario qui s'est produit: une nouvelle guerre en Europe. Et, oui, le pire est arrivé.

Mais en aucun cas cela ne justifie les critiques lancées à l'encontre du président français – en particulier par ses rivaux dans la course à la présidentielle – qu'on a pu voir ou entendre depuis plusieurs jours. Citons par exemple la présidente du Rassemblement national Marine Le Pen, qui a affirmé sur RTL: «Emmanuel Macron a cherché à se servir de cette séquence diplomatie pour appuyer une entrée en campagne. (...) J’ai vu passer des photos d’Emmanuel Macron pas rasé, la tête entre les mains, tout ça est très artistique, mais ce n’est pas sérieux de faire de la communication sur ces sujets-là.» Ou la candidate des Républicains Valérie Pécresse:

«Je suis dans l’opposition, mais je fais preuve de dignité et je n’attaque pas le président de la République, même quand j’ai le sentiment qu’il instrumentalise une cause internationale à des fins électorales»
Valérie PécresseFrance Inter, 22 février

Eric Zemmour, quant à lui, déclarait le même jour à France Inter qu'«Emmanuel Macron n'est pas crédible et (...) n'est pas respecté par Vladimir Poutine.» Le candidat de Reconquête! poursuivait: «Le porte-parole de Vladimir Poutine a dit, quand Emmanuel Macron est venu à Moscou et qu'il a repris l'avion, qu'il est venu chercher un accord mais cet accord est impossible puisqu'il est membre de deux organisations, l'Union européenne et l'Otan, dont il n'est pas le patron.»

Depuis, sur les réseaux sociaux, on ne compte plus les commentaires selon lesquels l'invasion de l'Ukraine par la Russie serait la preuve que les efforts diplomatiques d'Emmanuel Macron, parfois très solitaires, l'ont discrédité, car ils n'ont servi à rien. Il faut tordre le cou à cette idée.

D'abord, tout faire pour que la guerre soit évitée n'implique pas d'être aveugle sur les objectifs de son interlocuteur. Certes, il peut paraître vain de se lancer dans une partie de cartes avec un partenaire dont le fairplay est douteux. Mais il n'est pas question ici de «jouer»: il s'agit aussi, voire surtout, de défendre des valeurs. Celles du droit, de la souveraineté, de la paix. Ces «principes qui nous ont fait et nous font tenir ensemble», qu'Emmanuel Macron a invoqués dans son allocution du 24 février et par lesquels il continue de mener son action.

Ensuite, tenter de nouer et d'entretenir une relation particulière avec Poutine n'a jamais signifié pour Macron être naïf face à son interlocuteur. C'est plutôt l'inverse: des échanges personnels, cela permet de mieux cerner l'autre. Poutine se fiche éperdument des demandes des Occidentaux, on est aujourd'hui obligé de le constater; mais aurait-il été préférable de ne même pas tenter de lui apporter la contradiction selon nos moyens, ceux des sociétés libres, quand l'espoir était encore permis?

Il faut encore ajouter que ce ne sont pas seulement les résultats qui comptent dans un dialogue entre dirigeants, mais aussi les intentions. Ce n'est pas Emmanuel Macron qui s'est discrédité avec les récents événements, mais bien Vladimir Poutine. En bafouant tous les engagements qu'il avait pris, dont les accords de Minsk, et en déclarant la guerre à l'Ukraine, l'autocrate russe a définitivement montré qu'il n'était pas une personne de confiance. Si Poutine a «gagné» en dupant l'Occident, il a dans le même temps perdu toute légitimité sur le plan international.

Et vous, vous en pensez quoi?

Et puis surtout, reprocher au président de la République d'avoir profité de cette crise pour se mettre en avant, d'avoir soigné sa communication et poussé la mise en scène jusque dans des vidéos de séance du Conseil de défense, cela prête à sourire.

Car, même si tout est vrai, il y a autant d'électoralisme dans cette opération macronienne que dans la dénonciation de cet électoralisme par ses adversaires. D'autant plus quand c'est le fait de candidats à l'Elysée comme Valérie Pécresse – représentante en chef de l'absence totale de naturel.

Un peu de décence en ces moments tragiques s'impose. Saluons l'engagement en faveur de la paix et ne mélangeons pas tout.

L'opération militaire russe en images
1 / 18
La guerre en Ukraine en images
Un bâtiment en flammes après un bombardement russe, Kiev.
partager sur Facebookpartager sur X
Des Suisses en Ukraine: «Je suis encore plus déterminé à rester!»
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
1 Commentaire
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
1
Musk porte «le coup de grâce» aux ennemis de Poutine et Orban
Supprimé par Elon Musk, le programme USAID soutenait des médias indépendants œuvrant contre des régimes autocratiques, notamment en Europe de l'Est. De quoi faire les affaires de la Russie et de la Hongrie.

Dans la Russie de Vladimir Poutine, la liberté d'expression et les médias indépendants n'existent plus depuis longtemps. Mais il existe encore des journalistes russes en exil qui font des reportages critiques sur leur pays. Ils travaillent par exemple pour le portail Internet Meduza, dont le siège principal se trouve à Riga, en Lettonie.

L’article