La femme qui pourrait faire gagner le Nobel de la paix à Trump se confie
Ils sont tous arrivés trop tard. Benjamin Netanyahou, le gouvernement pakistanais, plusieurs figures du Parti républicain… Tous ont recommandé Donald Trump pour le prix Nobel de la paix cette année. Cependant, pour être considéré, un nom doit être soumis avant le 31 janvier. Eux ont attendu l’été.
Aucune nomination officielle n’avait été confirmée pour le président américain. Et même si ses chances de remporter le Nobel sont jugées faibles, il aurait pu être écarté pour une simple question de date. Mais non. Anat Alon-Beck a bien envoyé sa lettre dans les temps. Ce qui signifie qu’au moins une nomination valide figure sur le bureau du comité Nobel.
Une lettre qui peut faire toute la différence
Alon-Beck enseigne le droit à la Case Western University, dans l’Ohio. Cette année, elle est professeure invitée à la prestigieuse Harvard Law School. Elle confie:
Ce mardi marque le deuxième anniversaire de l’attaque terroriste du Hamas contre Israël, point de départ d’une guerre sanglante à Gaza. C’est aussi cette semaine que doivent commencer les négociations autour d’un plan de paix porté par Donald Trump. Un accord entre Israël et le Hamas serait un séisme historique. Et ce vendredi, le Nobel de la paix 2025 sera décerné.
Pourquoi avez-vous nominé Donald Trump?
Anat Alon-Beck: Bien avant même d’être élu, Trump disait vouloir s’engager personnellement pour la libération des otages israéliens détenus à Gaza. Il avait déjà établi des contacts avec les familles et leur avait promis qu’il ferait tout pour ramener leurs proches. J’étais présente à sa cérémonie d’investiture en janvier.
Vous avez précisé dans votre lettre que la nomination dépendait de la réussite d’un accord sur les otages.
Oui, et ce ne serait pas rien. Libérer ces otages est d’une complexité extrême: ils sont entre les mains d’une organisation terroriste qui les utilise comme monnaie d’échange. Si le Hamas les libère, il perd toute sa force de négociation.
Il a la capacité de mettre la pression nécessaire pour arrêter ce conflit, cette boucherie. On ne peut pas continuer comme ça. Il faut que ça s’arrête.
Quand avez-vous envoyé la nomination?
Quelques jours après sa prise de fonction. Juste avant la date limite.
Parce que vous saviez que Trump voulait ce prix, et qu’il serait motivé à agir?
En tant que professeure de droit des affaires, je m’intéresse aussi aux mécanismes d’incitation. Un ami à moi, Kobby Barda, a écrit un livre sur Trump, dans lequel il consacre tout un chapitre au prix Nobel de la paix. Je l’ai lu et je me suis dit: Ok, c’est intéressant.
Pourquoi cet engagement personnel pour les otages?
Je suis à la fois israélienne et américaine, et je veux de tout cœur qu’ils soient libérés. Ces gens souffrent. Ils sont torturés, abusés. Sauver une seule vie, c’est sauver un monde entier. C’est ce que ma religion enseigne, et je le crois profondément. Je travaille aussi pro bono comme avocate pour le Jewish Advocacy Center, une organisation juive. Je représente plusieurs anciens otages, comme Shlomi Ziv, Almog Jan ou Andrey Kozlov. Ils m’ont raconté les tortures qu’ils ont subies. Ça m’a bouleversée et déterminée à aider davantage.
Pas seulement entre Israël et Gaza, mais dans toute la région. Ce serait une nouvelle ère. C’est pour ça qu’un prix Nobel de la paix existe: pas pour célébrer des bombes, mais pour célébrer la paix. Et j’y crois.
Depuis le 7 octobre 2023, les positions se sont extrêmement radicalisées. Vous pensez malgré tout qu’une paix durable est possible?
Je me suis moi-même fait attaquer, dans mon université aux Etats-Unis, simplement parce que je suis israélienne.
Ce qui se passe en Europe. Pendant Yom Kippour, deux Juifs ont été assassinés en Angleterre. J’enseigne à Harvard, et récemment, à Cambridge, un professeur a brandi une arme et tiré devant une synagogue. Il faut que la haine cesse.
Concrètement, comment se passe une nomination au Nobel? Et pourquoi aviez-vous le droit de proposer un nom?
En tant que professeure d’université, j’en ai le droit. Je me suis enregistrée sur le site du comité Nobel. Ils ont validé mon profil. Ensuite, j’ai pu soumettre officiellement ma proposition.
C’est la première fois que vous nommez quelqu’un?
Oui, c’est la première fois. Avant, j’étais encore professeure assistante, donc je n’étais pas éligible. Petite précision: je suis plutôt libérale. J’écris sur le développement durable, je soutiens la diversité. Et quand je ne suis pas d’accord avec une décision politique, je le dis. Mais je pense aussi qu’il faut rendre à César ce qui est à César. Trump est très mal traité par les médias. Pourtant, jusqu’à maintenant, il a respecté la loi.
Traduit et adapté de l'allemand par Léon Dietrich