Depuis plusieurs semaines, Donald Trump et Kamala Harris dépensent tous deux une fortune en Pennsylvanie. Plus qu'un Etat clé, la Pennsylvanie pourrait bien avoir le pouvoir d’élire à lui seul le prochain président des Etats-Unis. Plus généralement, les candidats donnent de leur personne dans les territoires les plus disputés, de la Géorgie au Wisconsin, en passant par la Caroline du Nord, histoire de faire pencher les urnes de leur côté.
A l'inverse, on n'a pas encore vu Kamala Harris grimper sur une estrade en Floride, devenue rouge vif en 2015 à l'arrivée du milliardaire MAGA. Et ce dernier n'a aucune chance de remporter la Californie et New York le 5 novembre prochain. Sauf que...
Faisant fi des sondages qui le donnent largement perdant, à plus de 23 points de son adversaire démocrate en Californie et 13 à New York, Donald Trump a démoulé deux annonces qui ont de quoi décontenancer. Pourquoi organise-t-il un imposant rallie à Coachella ce samedi et projette d’investir le Madison Square Garden le 27 octobre, à seulement neuf petits jours du scrutin?
Donald Trump claims that renting Madison Square Garden means his campaign is “going to make a play for New York” where he trails by 23 points.
— Jim Stewartson, Counterinsurgent 🇺🇸🇺🇦💙🎈 (@jimstewartson) October 9, 2024
This is exactly how you know the reason for it is to honor the Nazi rally in the same venue 85 years ago.
pic.twitter.com/zyoZ8TlAMj
Si vous êtes en train de vous poser la question, sachez que le tarif de location du mythique Madison Square Garden, qui peut accueillir jusqu'à 19 500 personnes, oscille entre 100 000 et 500 000 la journée.
Pour de nombreux démocrates, la stratégie du candidat républicain n'a rien d'électoral, puisqu'un simple meeting, aussi fancy soit-il, ne sera jamais en mesure de renverser la tendance. Rappelez-vous, en 2020, Joe Biden avait raflé l'Etat de New York avec plus de 20 points d'avance sur son ennemi.
Certains observateurs évoquent simplement l'égo démesuré du candidat pour justifier ces deux rassemblements en terres bleues. Mais quelques heures après cette annonce tonitruante, le sénateur démocrate Brad Hoylman-Sigal est allé plus loin en cherchant le point Godwin:
Brad Hoylman-Sigal, qui représente le 47e district de New York, là où est érigé le Madison Square Garden, a ensuite prié les propriétaires de la salle d'interdire l'événement. Tout en insistant sur le fait qu'il ne «traite personne de nazi», mais souligne «simplement une similitude historique». Mais, comme souvent avec la loi Godwin, il est difficile de revenir en arrière lorsqu'on fait référence à Hitler.
Il y a 85 ans, 20 000 sympathisants nazis s'étaient effectivement réunis dans la célèbre salle, sous l'impulsion du Bund germano-américain. Un événement qui verra notamment des portraits de George Washington flanqués de croix gammées dans les gradins, comme le rappelle The Guardian.
Une comparaison osée, qui n'a pourtant pas l'air de gêner les voix qui représentent les démocrates juifs, contactés par Politico cette semaine:
Le timing, aussi, est important. A trois semaines de l'élection présidentielle, bon nombre d'électeurs juifs de Big Apple ne sont plus si certains de voter pour la candidature démocrate, à l'aune du conflit au Moyen-Orient et du soutien du gouvernement américain à Israël. Même si un récent sondage montre que «71% des électeurs juifs des 7 Etats clés sont favorables à Kamala Harris». Donald Trump lui-même a redoublé d'efforts, ces dernières semaines, pour s'avancer en «président des juifs», allant jusqu'à affirmer que ceux qui envisagent de voter pour son adversaire «devraient se faire examiner le cerveau».
Sans surprise, la fronde du sénateur Brad Hoylman-Sigal a suscité un déluge de réactions outrées dans le clan républicain. Le porte-parole de la campagne de Donald Trump a notamment rappelé, vendredi, que ce «sont ces rhétoriques dangereuses qui ont conduit à deux tentatives d'assassinat contre le président Trump et a divisé notre pays». Il faut dire que les démocrates avaient passablement freiné les comparaisons avec le nazisme, pour évoquer le mouvement MAGA.
On rappellera qu'en mai dernier, le président Biden avait accusé le milliardaire d'utiliser «le langage d'Hitler», quand ce dernier avait parlé d'un «Reich unifié».
Si les rassemblements prévus au Madison Square Garden et à Coachella font autant jaser, c'est aussi parce que ces deux régions abritent un large vivier d'électeurs républicains inscrits, dont 5,25 millions rien que pour la Californie (record national). En ajoutant New York, cela fait près de huit millions de républicains isolés dans des Etats bleus. C'est gigantesque, même s'ils ne vont pas parvenir à catapulter Trump à la Maison-Blanche.
Et pour certains, c'est la preuve que le candidat républicain a prévu ces deux meetings comme un ordre de marche militaire, pour «préparer à la guerre» en cas de défaite le 5 novembre prochain. C'est du moins l'avis du groupe Veterans For Responsible Leadership.
Si cette théorie reste encore à confirmer, il est fort probable que ces deux rassemblements trumpistes en terres démocrates soient pensés comme de puissantes démonstrations de force. Et un moyen de motiver des troupes qui, on le sait, abritent un certain nombre de militants d'extrême droite et du suprémacisme blanc.
Ce qui est sûr, c'est que l'annonce de Donald Trump inquiète les démocrates et fait méchamment causer. Les deux plus grandes passions du milliardaire de 78 ans.