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Taux d'intérêt et Fed: une décision capitale menace la Suisse

Le «coup unique» de Trump risque de faire mal à la Suisse

Donald Trump a réussi à faire entrer un allié dans la Banque centrale américaine, une menace pour l’indépendance de celle-ci. Si le président parvient à imposer ses volontés à la Fed, l’impact se fera sentir jusque chez nous.
17.09.2025, 12:2217.09.2025, 12:22
Niklaus Vontobel / ch media

Ce mercredi soir, la Fed devra une nouvelle fois trancher sur ses taux d’intérêt, sauf que cette décision s’inscrit dans un contexte inhabituel. Et si Donald Trump obtient gain de cause, tout changera. Peter Conti-Brown, historien à l’Université de Pennsylvanie, avertit dans un article du Financial Times: la Banque centrale américaine perdra son indépendance, et il n’y aura plus de retour en arrière possible.

Il prédit une «vallée de larmes».

Ce qui différencie la décision de mercredi des précédentes, c’est que Donald Trump a placé à la Fed son conseiller économique, Stephen Miran. Neil Dutta, économiste en chef chez Renaissance Macro Research, explique:

«Miran est le bras armé du président. Il reste le président du Conseil des conseillers économiques et siège dans le bureau du président».

Ce qui sera dit lors de cette réunion sera peut-être plus mesuré, moins transparent, prévient Neil Dutta. Comme si «le fils ou la fille du patron» était à la table. Certains membres pourraient vouloir prouver qu’ils ne se laissent pas impressionner par Donald Trump, qui pousse pour une baisse des taux, et pourraient donc voter une réduction plus modérée qu’à l’accoutumée.

FILE - Stephen Miran, chairman of the Council of Economic Advisors, walks at the White House, June 17, 2025, in Washington. (AP Photo/Alex Brandon, File)
Stephen Miran
Le Sénat étasunien a confirmé ce lundi 15 septembre la nomination de Stephen Miran à la Fed.Keystone

Donald Trump a réussi un «coup unique» en parvenant à faire entrer un allié à la Fed, selon le Wall Street Journal. Mais là n’est pas la plus grande menace qu’il fait peser sur la banque centrale: son objectif ultime est de limoger la gouverneure de la Fed Lisa Cook, qu’il accuse de fraude dans une demande de prêt hypothécaire.

Peter Conti-Brown dénonce la procédure juridique en cours. Pour qu'elle soit conforme à l'Etat de droit, le parquet aurait d’abord dû découvrir un crime, puis, dans sa recherche d’un coupable, tomber sur Lisa Cook. Or, les autorités sont parties de la patronne de la Fed et ont ensuite cherché n’importe quel crime à lui coller dessus, affirme l'historien.

Les démocrates s’inspirent de Trump

Si Trump parvenait à avoir la tête de Lisa Cook, cela enverrait un signal fort: quiconque s'oppose à la volonté présidentielle est en danger. Selon Peter Conti-Brown, «si cela arrive, c’est la fin de l’indépendance dont la Fed jouit aujourd’hui».

A partir de ce moment-là, un retour en arrière sans douleur ne serait plus possible, estime l'expert. Si les républicains remportent les prochaines élections, Trump pourrait continuer comme avant, sans opposition parlementaire. Mais même en cas de victoire démocrate, le retour à une politique plus indépendante n’est pas garanti.

L'historien s'attend à ce que personne chez les démocrates ne prenne les décisions désagréables nécessaires pour rendre son indépendance à la Fed. Ces dernières années, les démocrates ont souvent été critiqués par leur base pour leur stratégie «perdante» face à l’actuel président étasunien: ils respectent toutes les conventions, alors que lui brise toutes les règles. Peter Conti-Brown le résume ainsi:

«C’est un bon moyen de perdre à chaque fois»

Selon lui, le chemin pour rétablir l’autonomie de la banque centrale sera long et tumultueux. Cela passerait par une inflation galopante, avec des dégâts si importants qu’ils seraient perceptibles pendant plusieurs générations, jusqu’à ce qu’une de ces générations réalise que l’indépendance de la banque centrale est essentielle. L’historien étasunien met en garde: ce serait très pénible.

Les exemples ne manquent pas dans l’histoire: Turquie, Venezuela, Zimbabwe… En Turquie, par exemple, le président Recep Tayyip Erdogan a imposé à la banque centrale de ne pas suivre la doctrine classique pour lutter contre l’inflation. Au lieu de relever les taux, comme le recommandaient les économistes, il les a maintenus très bas. Résultat: l’inflation annuelle a été multipliée par huit, atteignant 85%.

Un risque pour la Suisse

Un scénario inquiétant aussi pour la Suisse. Car si la confiance dans le dollar s’érode encore, les conséquences seront lourdes, comme l’ont analysé les économistes d’UBS. Les investisseurs mondiaux pourraient se tourner massivement vers le franc. Mais ils se heurteraient alors à une limite: l’offre de placements sûrs et liquides en francs reste très restreinte.

Une offre limitée face à une demande croissante: le franc s’envolerait. Et avec lui un risque accru:

«Le statut du franc comme valeur refuge deviendrait un fardeau croissant pour l’économie suisse».

Dans les périodes de crise, la force du franc pourrait donc se transformer en problème. Les taux d’intérêt suisses sont déjà très bas, en partie parce que la monnaie est jugée sûre et que les créanciers se contentent de rendements modestes. Mais si une récession mondiale éclate et que le dollar perd son rôle de refuge, la pression sur le franc s’intensifiera encore, au point de l’apprécier bien plus qu’au cours des crises précédentes.

La Banque nationale suisse devra alors intervenir davantage, mais avec des marges réduites. Son taux directeur est déjà à zéro. Le risque: qu’elle doive de nouveau plonger en territoire négatif.

Adapté de l’allemand par Tanja Maeder

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