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Remaniement: le divorce Macron-Borne est imminent

«Macron veut éviter une forte ascension du RN»
Emmanuel Macron sur le point de se séparer d'Elisabeth Borne à la faveur d'un remaniement qu'on dit imminent?Image: watson

Macron-Borne: divorce imminent? Suspense dans le remaniement

A cinq mois des élections européennes, qui donnent pour l'heure le Rassemblement national largement en tête, Emmanuel Macron serait sur le point de remanier son gouvernement. Elisabeth Borne est sur un siège éjectable. Interview de Frédéric Dabi, directeur général de l'institut de sondage Ifop.
05.01.2024, 18:4710.01.2024, 11:59
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Au revoir Elisabeth Borne? Un remaniement ministériel serait imminent en France. Emmanuel Macron pourrait choisir de se séparer de sa première ministre, depuis 20 mois à ce poste, un record pour une femme en France. Edith Cresson, la seule avant elle, avait «tenu» onze mois, entre 1991 et 1992, confrontée à la misogynie d’une partie des députés. François Mitterrand était président de la République.

Trente-deux ans ont passé. Si la chose se confirme, qui pour remplacer l'actuelle cheffe du gouvernement, cette ancienne proche du Parti socialiste ayant rejoint La République en marche d'Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2017?

Des hommes, pas de femmes

Plusieurs noms sont cités. Uniquement des hommes. Le ministre de la Défense Sébastien Lecornu, le ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire, le ministre de l’Education nationale Gabriel Attal, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, l'ancien ministre de l'Agriculture Julien Denormandie (2020-2022), passé dans le privé, et Richard Ferrand, président de l’Assemblée nationale entre 2018 et 2022, un proche d’Emmanuel Macron. Sur les six, trois viennent de la droite, deux du Parti socialiste (Attal et Ferrand), seul Denormandie est un véritable République en marche.

Les ministres qui ont fait connaître leur opposition à la loi immigration, votée avec les voix de la droite (Les Répulicains) et celles, non désirées, de l’extrême droite (Rassemblement national), pourraient se voir indiquer la sortie. Parmi eux, Clément Beaune (Transports) et Rima Abdul Malak (Culture), par ailleurs désavouée par le président de la République le 21 décembre dans l’émission «C à vous», au sujet d’un possible retrait de la Légion d’honneur à Gérard Depardieu.

«Ce quinquennat n’a jamais vraiment démarré»

Alors, pourquoi un remaniement et pourquoi maintenant? Les réponses de Frédéric Dabi, directeur général de l'institut de sondage Ifop.

Quelles sont les raisons de ce possible remaniement?
Frédéric Dabi: Il y a sûrement des raisons personnelles. Emmanuel Macron peut vouloir travailler avec un premier ministre qui soit plus à sa main. Il y a aussi des signaux d’alerte. Ce quinquennat n’a jamais vraiment démarré, on dit parfois qu’il est mort-né, qu’il a été phagocyté par la réforme des retraites dont les Français ne voulaient pas. Et puis, il y a la préparation des élections européennes de juin, le seul scrutin national du quinquennat, sauf dissolution en cours de route.

«Deux éléments fragilisent Elisabeth Borne»

Quel est le parti le plus menaçant pour Renaissance?
Indiscutablement, le Rassemblement national. Il importe pour Emmanuel Macron et Renaissance d’éviter une irrésistible ascension du RN. Comme aux dernières européennes, en 2019, il s’agit pour la liste du parti majoritaire de sauver les meubles. Il y a cinq ans, le RN était arrivé premier avec 23%, devançant Renaissance d’un point. Aujourd’hui, le RN est donné à 30% et Renaissance à 18%. Que le remaniement soit large ou restreint, les Français ne sont pas dans une logique de casting, mais de résultats.

Qui pour succéder à Elisabeth Borne, si elle s’en va?
En tant que sondeur, je n’ai pas à me livrer à ce genre de pronostics. Plusieurs noms sont évoqués publiquement. Mais restons un moment sur le cas de la première ministre, sur son bilan, tel que les Français le perçoivent et qui explique en partie la situation actuelle.

«Ce qu’on peut dire d’Elisabeth Borne, c’est qu’elle a une image personnelle plutôt bonne, elle passe pour compétente, sérieuse et courageuse, elle qui porte comme un chemin de croix cette majorité relative»

Mais deux éléments la fragilisent: on l’associe trop à l’article 49.3, synonyme d’autoritarisme, qui permet de faire passer des lois sans vote parlementaire. Or, on ne voit pas qu’en dehors de quelques 49.3, elle a fait voter beaucoup de textes. Ensuite, les Français, hors réforme des retraites, lui associent très peu de mesures, très peu d’actions. Rien à voir avec Edouard Philippe, premier ministre d’Emmanuel Macron lors de deux crises majeures: les gilets jaunes et le Covid, durant la première phase de la pandémie.

Dans la continuité de la loi immigration passée avec les voix de la droite, va-t-on vers une alliance entre bloc majoritaire (Renaissance, Démocrates et Horizons) et Les Républicains, de manière à disposer d’une majorité de gouvernements, sachant qu’il manque 39 sièges au bloc majoritaire pour avoir la majorité absolue à l'Assemblée nationale?
C’est une possibilité. Quand on manque la majorité absolue de peu, on fait ce qu’avait fait le premier ministre socialiste Michel Rocard entre 1988 et 1991: une fois je vote avec les communistes, une fois je vote avec le centre droit. Mais quand on a une majorité relative très relative, le cas de l’actuel parti majoritaire, il faut chercher des alliances. C’est l’injonction qu’avait adressée le président à sa première ministre.

«Il est vrai que ce qui s’est passé lors du vote de la loi immigration, qui aurait pu déjà se passer avec les retraites, montre qu’il y a une alliance naturelle entre le bloc central d’Emmanuel Macron et LR»

Et une alliance avec la gauche?
En France, le champ politique est constitué de trois blocs: le bloc de gauche, qui est malade, le bloc RN-Reconquête en mode conquérant, et le bloc central formé de Renaissance, Démocrates et Horizons. Et puis il y a LR, 62 députés à l’Assemblée nationale, moins que le RN et la Nupes chacun. Il y a certes des sociaux-démocrates qui soutiennent toujours Macron, mais ils ne souhaitent pas s’allier avec une Nupes dominée par La France insoumise qui s’est complètement discréditée, notamment sur la question de l’antisémitisme. On entre peut-être dans une nouvelle séquence.

«Jusqu’ici, l’équilibre macroniste reposait sur la notion d’en même temps. On pourrait passer du "et gauche et droite" à "et droite et droite"»
Frédéric Dabi

La liste socialiste aux européennes, emmenée par Raphaël Glucksmann, actuellement créditée de 10% des intentions de vote, constitue-t-elle un danger pour Renaissance?
Il est trop tôt pour le dire. En 2019, la liste PS-Génération.s conduite par Benoît Hamon avait fait seulement 3%. Mais il est vrai que Renaissance veut capter le vote des pro-Européens. Il y a peut-être une concurrence ici avec la liste de Raphaël Glucksmann, qui avait conduit celle des écologistes aux européennes de 2019, obtenant à l’époque 6% des voix.

L’affaire Depardieu peut-elle faire perdre des voix à la liste Renaissance, après que le chef de l’Etat a apporté un soutien à l’acteur, accusé de viols et d’agressions sexuelles? Le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a visiblement tenu à atténuer les propos présidentiels, en déclarant jeudi être «choqué» par ceux tenus par Gérard Depardieu dans «Complément d’enquête».

«Je pense que l’immense majorité des Français se moque de l’affaire Depardieu, comme elle se fiche des simagrées de la famille Delon»

Les Français tels qu’on les voit dans nos enquêtes regardent plus la santé, le pouvoir d’achat, le prix de l’électricité, l’insécurité. Il peut y avoir, à la marge, un mauvais vent du côté de l’électorat jeune et féminin, bien sûr. Le président a peut-être cédé à son péché mignon d’être trop cash et direct, quitte à dire n’importe quoi. Mais ce n’est pas du tout, pour l’heure, un levier de mobilisation et de vote aux élections européennes.

Elle mange plus vite que vous
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