Si vous aviez l'honneur - ou l'horreur, c'est selon - de faire partie des quelques rares VIP autorisés à déambuler librement dans le club clinquant de Mar-a-Lago, à Palm Beach, il est probable qu'un invité incontournable se placerait sur votre chemin vers la piscine ou le green de golf. Elon Musk.
A Mar-a-Lago, «Tonton Elon», flanqué de son fils de quatre ans et d'une nounou, est partout. Sur la terrasse. Le green. Dans la voiturette de golf. Face au buffet. Dans le bureau du propriétaire. Sur les photos. Partout.
Depuis qu'il a atterri mardi dernier à West Palm Beach pour assister à l'élection, Elon Musk campe dans le QG de son allié et n'en a presque pas bougé. Si son jet privé est effectivement reparti le mercredi 6 novembre en direction d'Austin, au Texas, où il possède un complexe à 35 millions de dollars, c’était pour mieux revenir dès le vendredi. Le jet n'a ensuite pas bougé pendant quatre jours, à en croire le compte @ElonJet sur Bluesky, qui utilise des données de vol accessibles au public.
Depuis le 5 novembre, le vainqueur de l'élection présidentielle et son plus généreux donateur sont inséparables. Elon Musk fait partie des meubles. Il a même réussi à se glisser sur la photo de famille, la nuit de la victoire à la Maison-Blanche. «Elon, mets-toi en scène avec ton fils», lui a glissé Donald Trump, dans une vidéo du moment postée en ligne. «Nous devons mettre Elon en scène avec son fils – son magnifique et parfait garçon.»
Le week-end dernier, entre une balade en voiturette et un dîner en privé et en plein air sur la terrasse du club, aux côtés de Donald et de sa femme Melania, Elon Musk a posé avec Kai Trump, qui lui a exprimé son affection en des termes peu équivoques. «Elon devient un oncle», s'est réjouie non sans un poil d'ironie l'adolescente de 17 ans, sur ses réseaux sociaux.
Un invité désormais si incontournable que Donald Trump, qui officie comme DJ à temps partiel depuis son iPad, lui a attribué sa propre «chanson de présentation» lorsqu'Elon Musk entre dans la salle à manger: Space Oddity de David Bowie. Il a également plaisanté sur ce séjour longue durée lors d'un discours donné à l'occasion d'une soirée de gala jeudi soir.
Et cet invité particulier ne fait pas que de vagabonder entre la piscine et le spa du club. S'il n'a pas de titre officiel au sein de l'équipe de transition de Trump, il travaille quotidiennement avec les coprésidents de la transition, Howard Lutnick et Linda McMahon. Sans oublier qu’il peaufine déjà sa mission de consultant, aux côtés de Vivek Ramamswamy, pour le compte de son baroque «département de l’Efficacité gouvernementale», avec lequel il menace de purger les étages de l’administration américaine.
Selon plusieurs médias présents sur place, il a également assisté à tous les coups de fil avec des chefs d'Etat étrangers, ainsi qu'à la plupart des réunions et entretiens d'embauche.
Les aspirants candidats à un poste de ministre, qui font le pied de grue dans le salon situé à l'extérieur du bureau de Donald Trump, sont prévenus: s'ils veulent faire valoir leur cause auprès du grand patron, il est tout aussi fondamental d'apparaître sur le radar d'Elon Musk.
Evidemment, la présence quasi constante du «first buddy» autoproclamé du nouveau président n'est pas sans susciter quelques jalousies. En particulier parmi les personnes incluses dans le cercle intime de Trump depuis plus longtemps que lui, glisse certains initiés à NBC News.
«Il se comporte comme s'il était coprésident et s'assure que tout le monde le sache, s'est ainsi étranglée une source auprès de la chaîne. Et il s'attribue certainement une grande part du mérite de la victoire du président. Il se vante d'America PAC et de X à tous ceux qui veulent l'entendre».
Peut-être. Il n'en reste pas moins que, selon de fameuses «sources proches du dossier» dans le Wall Street Journal, Elon Musk se serait personnellement délesté de 200 millions de dollars pour s'assurer de l'élection de son poulain. Une somme extraordinaire pour un seul homme et nettement supérieure à celle que le milliardaire avait annoncée publiquement cet été.
Des aigreurs dont le principal intéressé, Donald Trump, ne semble guère se soucier, trop content de l'attention que lui porte l'homme le plus riche du monde. De lui faire faire le tour de son club en voiturette de golf et de s'arrêter ici et là pour le présenter aux membres du club. Sans oublier, ajoute Politico, de le «conduire à la boutique de cadeaux de Mar-a-Lago, pour admirer des casquettes».
Les courtisans vont devoir s'y faire. Tant que le roi de Mar-a-Lago trouve un intérêt à sa présence, Elon Musk pourra continuer à se complaire dans son royaume. Et il ne partira qu’une fois la fête terminée.