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Ukraine: Macron va-t-il livrer des chars Leclerc à Zelensky?

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La livraison de chars Leclerc à Kiev serait-elle une étape de plus vers une guerre avec la Russie?keystone / wikimedia commons (montage watson)

Macron va-t-il livrer des chars Leclerc à Zelensky? La question agite Paris

Après l'Allemagne, la France se demande, désormais, s'il serait judicieux pour elle de livrer des chars de combat à l'Ukraine. Mais personne ne veut encore se lancer.
24.09.2022, 11:4924.09.2022, 15:27
Stefan Brändle, Paris / ch media
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Jusqu'à quel point l'Europe soutiendra-t-elle l'Ukraine? La question devient brûlante en France. L'Hexagone n'a jusqu'à présent fourni «que» 230 millions d'euros d'armes aux troupes ukrainiennes.

Ce n'est pas grand-chose, comparé aux 25 milliards d'euros dépensé par les Etats-Unis, aux 4 milliards du Royaume-Uni ou aux presque 2 milliards de la Pologne.

Les Allemands hésitent

L'Allemagne aussi, avec 1,2 milliard d'euros, a été nettement plus généreuse que la France, même si Berlin ne veut pas trop s'immiscer, pour des raisons historiques notamment.

Pour le chancelier allemand Olaf Scholz, aucune livraison directe de char n'est prévue. Mais Berlin est devenu maître des tours de passe-passe entre armées européennes: si la Grèce cède des camions-citernes soviétiques à Kiev, l'Allemagne promet de lui céder en échange des chars Leopard 2.

Mais ce n'est pas la seule raison. Hésitant, Berlin justifie son incertitude par le fait que l'Allemagne ne veut pas livrer seule des chars à Kiev. Et jette son regard vers la France.

Macron, médiateur entre Kiev et Moscou

A Paris, si le poids historique vis-à-vis de la Russie n'est pas aussi fort, c'est la relation d'Emmanuel Macron avec Poutine qui rend la livraison d'armes difficile. Car le président français s'est positionné dès le début de l'invasion (et même avant) comme un médiateur entre Kiev et Moscou, faisant l'intermédiaire par téléphone entre Zelensky et le Maître du Kremlin.

Dans les colonnes du Monde, l'expert militaire Pierre Haroche évoque la question de la livraison de chars, discutée depuis le début de l'invasion principalement au sein des cercles militaires français. Le titre de sa tribune ne laisse que peu de place au doute:

«Un geste fort pourrait être de livrer une cinquantaine de chars Leclerc»
Pierre Harochle monde

Leclerc, tout un symbole

Le symbole est fort: celui du général Jacques-Philippe Leclerc, «libérateur» de Paris durant la Seconde Guerre mondiale. Le char qui porte son nom symbolise à lui seul la puissance de l'armée la plus expérimentée d'Europe continentale.

Pour Pierre Haroche, chercheur en stratégie à l'université Queen Mary de Londres, l'Ukraine serait un terrain approprié pour lancer les chars Leclerc. Il estime que la contre-offensive des Ukrainiens a clairement montré que l'aide occidentale porte ses fruits:

«La rapidité de l’offensive sur Kharkiv laisse penser que le meilleur moyen de mettre un terme à cette guerre est d’accélérer le mouvement vers la victoire de l’Ukraine»
Pierre Harochle monde

Caesar ou Leclerc?

Mais si Emmanuel Macron n'a pas voulu livrer de chars pour ne pas trop froisser Poutine, la France a déjà livré 18 de ses canons Caesar à l'Ukraine.

Il s'agit d'une arme polyvalente que la France a déjà utilisée au Mali ou en Irak, nous indique Pierre Haroche:

«Mais sur le front ukrainien, ce sont surtout les chars comme les Leclerc qui sont utiles»
Pierre Haroche

L'envoi de chars Leclerc serait pourtant un signal européen qui pourrait ouvrir la voie à la livraison des chars Leopard 2 allemands, estime l'expert en stratégie. Berlin attend donc de recevoir un «signal» de la part de la France pour agir.

La défense européenne en question

A l'adresse d'Emmanuel Macron, Pierre Haroche s'oppose à l'argument souvent entendu à Paris selon lequel les chars livrés pourraient manquer en France en cas d'urgence:

«Plus vite la menace russe sera interceptée en Europe de l'Est, moins ils seront nécessaires en France ou dans le reste de l'Europe occidentale»
Pierre Haroche

Et ce, d'autant plus que le tank a été quasiment prévu pour être utilisé contre la Russie:

«Le char Leclerc a été initialement conçu pour se battre contre la menace soviétique»
Pierre Haroche

Pierre Haroche estime que les paroles de Macron sur la défense européenne doivent être suivis d'actes pour être bien entendues en Europe de l'Est.

Le chercheur français argumente également sur la base d'intérêts nationaux: si Paris veut vraiment construire une défense européenne, comme l'envisage le président français, la France ne doit pas déléguer le soutien à l'armée ukrainienne aux seuls Américains et Britanniques, qui ont d'ailleurs formé 10 000 soldats ukrainiens».

Autre argument, plus économique: la livraison de chars Leclerc serait également «la meilleure publicité possible» pour l'industrie française de l'armement.

Une opposition très politique

La voix de Pierre Haroche compte dans les cercles de défense parisiens. Mais sur le plan politique, il se heurte à l'opposition de nombreux partis jusqu'ici favorables à la Russie.

Marine Le Pen à droite tout comme Jean-Luc Mélenchon à gauche sont opposés à la livraison d'armes aux Ukrainiens et aux sanctions occidentales. Et Emmanuel Macron sait qu'il peut tirer un trait sur ses conversations téléphoniques avec Poutine s'il devait livrer un train rempli de chars Leclerc à Kiev.

Pas de chars Leclerc, mais...

Le blog parisien Lignes de défense, plutôt bien informé, estime que la France n'est pas prête à livrer des chars Leclerc, en tout cas à court terme.

Selon des sources proches de l'armée française, «du nouveau matériel est prévu pour bientôt». Il s'agirait de missiles et de canons, de véhicules P4 et de véhicules blindés de reconnaissance de type AMX-10 (voir Tweet ci-dessous).

Mais pour ce qui est des chars Leclerc (et de la libération de l'Ukraine?), il faudra aller les trouver uniquement sur la liste de courses de Volodymyr Zelensky.

Traduit de l'allemand par Tanja Maeder

LCI sur Poutine: "Mais pourquoi vous aimez tant la bombe nucléaire?"
Video: watson
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