International
France

Hanouka: Macron a commis une «erreur impardonnable»

Le président français est accusé d'avoir foulé au pied la laïcité pour avoir hébergé jeudi soir à l'Elysée une célébration de la fête juive Hanouka.
Jeudi 7 décembre à l'Elysée. Image: watson

Macron accusé d’avoir commis une «erreur impardonnable»

Le président français est accusé d'avoir foulé au pied la laïcité pour avoir hébergé jeudi soir à l'Elysée une célébration de la fête juive Hanouka. Au lieu de combattre l'antisémitisme, ce «happening» risque de l'entretenir, alors que la guerre fait rage à Gaza.
08.12.2023, 12:0609.12.2023, 16:00
Plus de «International»

Pour une fois, la classe politique française est unanime – excepté Renaissance, mais c’est normal, il s’agit du parti présidentiel et le président est ici en cause. De La France insoumise au Rassemblement national, en passant par la droite LR et la gauche PS, tous reprochent à Emmanuel Macron d’avoir hébergé jeudi soir à l’Elysée, fût-ce à titre symbolique, une célébration religieuse à l'occasion d’Hanouka, la fête juive des Lumières. Garant des lois, et de leur esprit si l’on peut dire vu le sujet, le chef de l’Etat aurait splendidement ignoré celle sur la laïcité, pourtant omniprésente dans le débat public hexagonal, à deux jours, qui plus est, de sa date anniversaire – elle a été adoptée le 9 décembre 1905.

Que s’est-il passé? Jeudi soir, l’Elysée accueillait une «Conférence européenne des rabbins», venue remettre au président français le prix Lord Jakobovits, qui récompense les gouvernants européens luttant contre l'antisémitisme. L’ex-chancelière allemande Angela Merkel avait reçu cette distinction en 2013.

Alors que commençaient dans le monde entier les célébrations d’Hanoukka, le Grand Rabbin de France, Haïm Korsia, présent à la cérémonie de remise du prix en question, a allumé une bougie d'un chandelier à sept branches, symbole du judaïsme, objet central de la fête des Lumières. Emmanuel Macron assistait à ce moment. L’Elysée transformé en lieu de culte?

«Une faute politique impardonnable»

Florilège des réactions :

  • Emmanuel Bompard, coordinateur de La France insoumise: «Une faute politique impardonnable», Emmanuel Macron «foule au pied» la loi de 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat «en organisant une cérémonie religieuse à l'Élysée».
  • Jérôme Guedj, député socialiste (de confession juive): «Aucun élu de la République ne devrait participer» à une cérémonie d’Hanoukka, «comme à toute manifestation religieuse».
  • Même le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France, à ne pas confondre avec le Grand Rabbinat) a estimé par la voix de son président Yonathan Arfi que «[l'allumage de cette bougie] n'aurait pas dû se produire», que «c’est une erreur».

Les commentaires réprobateurs n’ont pas manqué de souligner une forme d’inconséquence chez Emmanuel Macron dans sa manière de mener la lutte contre l’antisémitisme, ravivé par la guerre au Proche-Orient:

  • «Comment peut-on refuser de participer à une marche civique contre l’antisémitisme (réd: celle du 12 novembre à Paris) au motif incongru et fallacieux de la sauvegarde de l’unité nationale, et célébrer une fête religieuse au sein du palais présidentiel?», s'interroge le maire Les Républicains de Cannes, David Lisnard.
  • De son côté, le député RN Laurent Jacobelli «comprend que puisse étonner le fait que le président de la République célèbre une cérémonie religieuse au cœur de l'Élysée».
  • L’ancien sénateur et membre du PS David Assouline a résumé sèchement ce qui lui apparaît ainsi qu’à d’autres comme un fâcheux paradoxe:
«La République l'attendait pour manifester contre l'antisémitisme, il n'était pas là. Laïque, elle ne l'attendait pas pour une fête religieuse à l'Élysée»
L’ancien sénateur et membre du PS David Assouline

«Deux poids, deux mesures»

Bref, aux yeux de beaucoup sinon de tous, Emmanuel Macron a voulu, jeudi soir, se faire pardonner sa non-participation à la marche du 12 novembre. Ce faisant, il aurait abîmé la laïcité sans se rattraper de rien. L'historien Eric Anceau, spécialiste des questions de laïcité, s'est étranglé:

«Se rend-on compte de la boîte de Pandore ainsi ouverte par Macron en contravention avec 145 ans d'histoire républicaine?»

En ne choisissant pas ou à mauvais escient, Emmanuel Macron donnerait des arguments à tous ceux qui lui reprochent, au premier chef La France insoumise, un «deux poids, deux mesures» au détriment des musulmans. En pleine guerre à Gaza, le tancent ses détracteurs après ce «happening Hanouka» à l’Elysée, pouvait-il y avoir pire moment pour renforcer l’impression, vivace chez les antisémites, que les juifs sont les «petits protégés» du pouvoir? Quand on interdit le port de l’abaya à l’école, on se garde de brouiller sa communication sur la laïcité, lui rappellent certains. Jeudi soir, Emmanuel Macron s'est pris les pieds dans le chandelier d'Hanouka.

Notre commentaire après deux mois de guerre entre Israël et le Hamas👇

Tsahal révèle en vidéo un bunker du Hamas sous l’hôpital Al-Shifa
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
0 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
    Le président sud-coréen a encore pris une décision problématique
    Dans une allocution télévisée défiante, le président Yoon Suk Yeol a défendu sa décision d'instaurer la loi martiale. Son sort politique semble pourtant déjà scellé, car les événements se précipitent en Corée du Sud.

    Jeudi, Yoon Suk Yeol s'est adressé à son peuple de manière totalement inattendue. Mais ce que les gens ont vu devant leur écran de télévision n'était pas du tout un président repentant qui voulait s'excuser pour la plus grande crise nationale de ces dernières décennies. Bien au contraire.

    L’article