Ils alertent sur une «introduction massive» de la grippe avaire en France
Du Nord-Est au Sud-Ouest français, l'influenza aviaire fait des ravages chez les grues cendrées en pleine période de migration, ravivant les inquiétudes des éleveurs de canards et volailles qui espèrent néanmoins éviter une nouvelle épizootie grâce à la vaccination.
Michel Larrère, président de la FDSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles) des Landes, qui élève 25 000 poulets à quelques dizaines de kilomètres de la réserve d'Arjuzanx où ont été retrouvées une centaine de grues mortes ces derniers jours, explique:
De 2015 à 2017, puis de 2020 à 2023, son département, principal producteur français de canards gras et réputé pour ses volailles, a beaucoup souffert de la grippe aviaire.
Dans l'ensemble du pays, des dizaines de millions d'oiseaux d'élevage ont été abattus ces dernières années pour enrayer la progression de l'influenza aviaire hautement pathogène (IAHP), qui a coûté des milliards d'euros.
Grippe aviaire: abattages massifs en Allemagne
Relativement épargnée depuis le lancement, en octobre 2023, de la vaccination des canards, espèce amplificatrice du virus, la France est repassée en «risque élevé» la semaine dernière, plus tôt que les années précédentes. Depuis, les élevages sont confinés, en raison des risques de contamination par des animaux sauvages malades.
Après de premières morts de grues cendrées en Allemagne, où la propagation de la maladie dans des élevages a entraîné l'abattage d'un demi-million d'oiseaux, des milliers d'autres ont été recensées en France sur leur parcours de migration des zones de reproduction vers les zones d'hivernage.
En Champagne-Ardennes, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) a comptabilisé «au minimum» environ 6500 grues cendrées mortes.
Le lac du Der-Chantecoq, en Champagne, est particulièrement touché car «des centaines de milliers» de grues cendrées y observent une «halte» chaque année, précise Alexandre Portmann, directeur du Centre de sauvegarde de la faune lorraine (CSFL), qui n'a «jamais vu une mortalité pareille».
Dans les Landes, «le phénomène ne s'était pas produit sur les dernières années», indique la préfecture. La plateforme d'épidémiosurveillance évoque, elle, un risque d'«introduction massive» du virus en France «par l'intermédiaire des migrations de grues cendrées».
Le gouvernement français montré du doigt
La contamination aux élevages peut se faire «par les fientes, les plumes ou les rongeurs qui vont circuler», explique Julien Mora, qui élève entre 2500 et 4000 canards dans les Landes. Egalement porte-parole du Modef (Mouvement de défense des exploitants familiaux), il ajoute:
Défenseur d'un modèle autarcique en plein air, il précise que «les animaux développent une meilleure immunité que ceux claustrés toute leur vie» et le risque de diffusion y est plus faible.
Selon lui, la vaccination permet «d'éviter des flambées historiques» en «limitant la propagation de proche en proche».
Comme les autres syndicats, il regrette donc que l'Etat ne participe plus qu'à hauteur de 40%, contre 70% la saison dernière, à la vaccination - estimée à 100 millions d'euros par an. Il évalue le coût par animal entre 80 centimes et 2 euros:
Les filières canards «ont joué le jeu» de la vaccination jusqu'ici malgré la baisse du soutien de l'Etat, assure Yann Nédélec, directeur de l'interprofession des volailles de chair Anvol qui gère aussi les canards à rôtir, mais estime que des «cas isolés» pourraient «passer outre à l'avenir» sans «un accompagnement un peu plus important».
La FDSEA des Landes avait d'ailleurs menacé d'une «grève vaccinale» avant l'été pour protester contre cette baisse de la participation de l'Etat, mais «ne l'a pas mise à exécution, car on sait très bien le risque que l'on court», précise Michel Larrère. Il conclut:
(afp/ysc)


